Une manifestation anti-Brexit devant le parlement britannique à Londres, le 10 décembre, signe de l’incertitude qui règne autour du processus actuel. / TOLGA AKMEN / AFP

L’Assemblée nationale française a voté dans la nuit de lundi 10 à mardi 11 décembre le projet de loi habilitant le gouvernement à prendre par ordonnances les mesures de préparation du retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. Il s’agit ainsi de faire face à toutes les éventualités, y compris un Brexit sans accord.

Le début du débat à Paris a coïncidé avec l’annonce par la première ministre britannique, Theresa May, du report du vote prévu mardi à la Chambre des Communes dans l’espoir d’obtenir des garanties supplémentaires concernant la question de l’Irlande du Nord.

« Ce dernier développement ne doit pas nous faire perdre de vue qu’un rejet de l’accord de retrait est de plus en plus probable. Un risque d’une sortie sans accord l’est lui aussi, sortie qui serait sans aucun doute extrêmement coûteuse pour le Royaume-Uni mais qui pénaliserait aussi l’Union européenne », a déclaré devant les députés la ministre des affaires européennes, Nathalie Loiseau.

« La confusion à Londres reste particulièrement forte », a-t-elle ajouté à l’approche de la sortie de l’Union, programmée le 29 mars à minuit, qui aura quoi qu’il arrive des conséquences juridiques en cascade pour tous les pays de l’UE. « Il n’y a pas d’autre accord possible : je le dis devant vous comme nous le disons à nos amis britanniques. Et cet accord est un bon accord », a insisté Nathalie Loiseau à propos des termes négociés entre Londres et Bruxelles.

Protéger Français et Britanniques

Dans ce contexte mouvant, le texte préparé à Paris vise notamment à protéger les Français ayant vécu au Royaume-Uni et revenant en France et les Britanniques se trouvant en France pour qu’ils ne se retrouvent pas brutalement en situation irrégulière.

Il précise les droits sociaux applicables pour chacun. La reconnaissance des diplômes et des qualifications professionnelles, la validation des droits au chômage et à la retraite sont notamment concernés. « Je veux dire aux Britanniques qui vivent sur notre sol qu’ils seront les bienvenus demain comme ils le sont aujourd’hui », a dit Nathalie Loiseau. « Ils ne doivent pas devenir les otages d’un Brexit sans accord. » Au moins 150 000 ressortissants britanniques sont installés en France, dont 52 % occupent un emploi, selon une étude d’impact du gouvernement français.

Des mesures sont prévues pour les quelque 1 700 fonctionnaires britanniques - enseignants et praticiens hospitaliers pour la plupart – vivant en France, où la fonction publique exige d’être ressortissant de l’Union européenne. « Le gouvernement s’engage à ce qu’ils soient maintenus dans leur statut », a dit Nathalie Loiseau qui en a appelé aux autorités britanniques afin qu’elles garantissent les mêmes droits aux Français vivant sur leur sol.

Intérêts français

Le texte aborde par ailleurs la question d’éventuels contrôles sur les marchandises et passagers à destination et en provenance du Royaume-Uni ainsi que des examens vétérinaires et phytosanitaires et l’encadrement du transport routier de marchandises ou de personnes sur le territoire français par des personnes établies au Royaume-Uni.

Nathalie Loiseau a rappelé que la question du contrôle des frontières relevait de l’accord du Touquet signé en 2003 entre Paris et Londres. « Cette question reste ouverte et quelles que soient les formes que prendra le Brexit, le gouvernement est déterminé à défendre avec engagement la défense des intérêts français dans la gestion des flux migratoires à destination du Royaume-Uni. »

Les exportations vers le Royaume-Uni représentent 3 % du PIB français et environ 30 000 entreprises françaises exportent des marchandises ou des services outre-Manche. En sens inverse, 4 millions de Britanniques se rendent en France chaque année. Le ministre des comptes publics Gérald Darmanin a préparé un renforcement des effectifs de douaniers dans les ports des Hauts-de-France.