Un employé d’AngloGold Ashanti sur le site aurifère d’Obuasi, au Ghana, en octobre 2003. / Luc Gnago / REUTERS

L’Afrique de l’Ouest dispose d’un potentiel minier important et encore sous-exploité, mais elle doit davantage attirer les investisseurs internationaux pour le développer, selon des experts réunis à Abidjan, en Côte d’Ivoire.

C’est l’or, dont le Ghana est le deuxième producteur africain derrière l’Afrique du Sud, qui attire pour l’instant le plus d’investissements, selon des chiffres divulgués lors du forum Ecomof, une rencontre régionale annuelle des acteurs des mines et du pétrole qui se tenait lundi 10 et mardi 11 décembre. Avec une croissance record de 81 % depuis quinze ans, l’Afrique de l’Ouest est devenue la quatrième région mondiale pour le métal jaune : elle a produit 8 millions d’onces en 2016, selon les chiffres du Conseil mondial de l’or reproduits par la compagnie Endeavour Mining. C’est deux fois moins que la Chine (15 millions d’onces), mais quasiment autant que l’Australie et la Russie (9 millions d’onces).

Mais le meilleur est à venir : c’est en Afrique de l’Ouest qu’on a découvert le plus de nouveaux gisements de 2006 à 2016, avec 79 millions d’onces, loin devant la Colombie (50 millions), le Chili (42 millions), le Canada, les Etats-Unis et la Russie. Un tiers des découvertes sont situées au Burkina Faso, devant le Ghana, le Mali et la Côte d’Ivoire. Et les compagnies minières ont investi pas moins de 5 milliards de dollars (4,4 milliards d’euros) dans l’exploration aurifère en Afrique de l’Ouest ces dix dernières années. Des majors minières sont présentes dans la région, comme AngloGold Ashanti (avec cinq mines), Barrick Randgold (trois), Newmont (deux), ainsi qu’une petite dizaine de compagnies plus petites, comme Endeavour, qui exploite cinq mines.

« Environnement géologique très prometteur »

« Les codes miniers ouest-africains fixent dans l’ensemble des niveaux d’imposition et de royalties à reverser aux Etats à peu près équivalents à ceux de l’Australie, du Canada ou des Etats-Unis, mais attention à ne pas aller au-delà », note Patrick Bouisset, le vice-président chargé de l’exploration d’Endeavour. Selon lui, les gisements aurifères de la région offrent de très bons niveaux de rentabilité, parmi les plus élevés du monde.

Les pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) offrent un avantage de taille, ajoute-t-il : la stabilité monétaire, grâce à leur monnaie commune, le franc CFA, arrimé à l’euro. Pourtant, beaucoup d’investisseurs nord-américains hésitent à y miser des capitaux, d’abord par méconnaissance de l’Afrique. « Ils ont tendance à assimiler tout le continent à un seul pays » et à prendre peur dès qu’une crise éclate quelque part, estime M. Bouisset.

« Cette dépendance forte à l’or expose les pays producteurs aux aléas du marché mondial, avec un risque de brusque baisse des revenus fiscaux », avertit cependant Sulemanu Koney, directeur exécutif de la fédération de la chambre des mines de la Cedeao, pour qui la région doit se diversifier dans les métaux de base. « Partout en Afrique de l’Ouest, il y a des minéraux intéressants : or, fer, nickel, manganèse, entre autres. Mais il y a un vrai travail à faire pour attirer les investisseurs et diversifier les projets, trop centrés sur l’or », estime Kadjo Kouame, directeur général de la Société d’Etat pour le développement minier de Côte d’Ivoire (Sodemi).

« Dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, par exemple, l’environnement géologique est très prometteur », explique à l’AFP le PDG de la compagnie canadienne Sama Resources, Marc-Antoine Audet : « On trouve la même séquence géologique que dans le Bushveld », l’une des régions les plus riches en minéraux de la planète, à cheval entre l’Afrique du Sud, le Botswana et le Zimbabwe. Pour le cuivre, le nickel, le cobalt et le palladium, « le secteur minier n’est pas à son plein potentiel », poursuit M. Audet. Mais « pour encourager les compagnies à venir explorer, il faut doubler la durée des permis d’exploration dans les codes miniers, jusqu’à quinze ans », plaide-t-il. Car il faut plus de temps pour les métaux de base, souvent enfouis à grande profondeur, que pour les métaux précieux, plus en surface.