Site Pernod Ricard à Vendeville (Nord), le 31 janvier 2013. Le fonds américain Elliott a pris  2,5 % du capital de Pernod Ricard. / PHILIPPE HUGUEN / AFP

Cela fait longtemps que la France et son capitalisme jugé entre-soi ne font plus peur aux fonds activistes. Mais ces derniers hésitaient encore à s’attaquer à de « gros morceaux ». En prenant 2,5 % du capital de Pernod Ricard – soit une mise équivalant à près de 1 milliard d’euros à la clôture mercredi 12 décembre – l’américain Elliott démontre qu’il est prêt à en découdre avec un des fleurons de l’establishment français. Rien d’étonnant en cela, le fonds créé par Paul Singer est considéré comme le plus tenace, le plus agressif parmi ses pairs.

Qui sont-ils ? Nelson Peltz, Dan Loeb ou Carl Icahn, ces financiers activistes investissent dans des entreprises dont ils espèrent améliorer la performance boursière, que ce soit en préconisant un changement de gouvernance, des rachats d’actions, des plans sociaux ou même la cession pure et simple. Souvent leur présence reste discrète. L’agence Reuters vient ainsi de dévoiler qu’Elliott était actionnaire du chimiste allemand Bayer depuis plus d’un an.

Mais si les fonds sont déçus du cours de Bourse ou s’ils estiment ne pas être écoutés, ils lancent alors des campagnes publiques afin de rallier d’autres actionnaires ou des administrateurs, histoire de mettre une pression maximale sur les dirigeants. Souvent avec succès, grâce notamment au soutien des investisseurs institutionnels.

Le Royaume-Uni reste la terre promise

La méthode, venue des Etats-Unis, s’est étendue à l’Europe. Dans une étude publiée le 12 octobre, Lazard estimait à 40 le nombre de sociétés européennes prises pour cibles par des activistes au cours des neuf premiers mois de l’année. Le Royaume-Uni reste la terre promise, captant à lui seul 21 campagnes contre Unilever, Vodafone ou encore Hammerson.

Sur la même période, deux sociétés françaises se sont retrouvées sous pression : le réassureur Scor, auquel le fonds CIAM reproche notamment de ne pas avoir accepté l’offre de rachat de Covéa, et l’équipementier aéronautique Latécoère, à qui Sterling Value Fund et la Financière de l’Echiquier ont réclamé un changement de gouvernance.

Le 7 décembre, en outre, L’Agefi a révélé que le fonds Amber, très actif depuis des mois pour influencer la stratégie de Lagardère, s’était invité au capital de Suez. Encore un débat de gouvernance en vue ? Le groupe de services à l’environnement prépare la succession de son directeur général Jean-Louis Chaussade, qui remettra son mandat lors de l’assemblée générale de 2019.

Le cas de Casino enfin reste à part. La plupart du temps, en effet, les fonds activistes entrent au capital d’une entreprise et souhaitent faire monter son cours de Bourse pour réaliser une plus-value à la sortie. Le distributeur, lui, est la cible de fonds qui ont vendu son action à découvert et s’agitent en espérant faire baisser son cours de Bourse.