L’avis du « Monde » – à voir

On s’en pincerait, mais voici un « Transformer » gagné par l’esprit de Noël ! Le roi du blockbuster catastrophiste Michael Bay avait signé, de 2007 à 2017, l’inénarrable pentalogie de ces boîtes de sardines géantes dotées, en moins mélodieux, du virilisme vocal de Barry White. Quelques milliards de profits plus tard, il cède la main à Travis Knight, fils du fondateur de Nike, pour le compte duquel Bay avait signé, dans sa première carrière de réalisateur publicitaire, quelques clips. Juste retour des choses, entre montagnes il faut bien s’entraider.

Or Travis Knight, auteur d’un film d’animation déjà remarqué (Kubo et l’Armure magique), signe avec Bumblebee un deuxième long-métrage non moins réussi. Mélange de film d’action et de « teen movie », Bumblebee tire la saga vers une douceur bienvenue.

On y retrouve évidemment l’univers Transformer (originellement hérité d’une gamme de jouets américano-nippone), qu’on présente, pour les novices, en deux coups de cuillère à pot. Soit une planète nommée Cybertron, peuplée de robots transformables livrés à une guerre civile séculaire dont l’extension, comme s’il manquait de planètes dans l’Univers, a régulièrement lieu sur notre Terre. Là-dessus, les urticants Decepticons veulent nous raser, projet auquel s’opposent avec ténacité les aimables Autobots.

Ame meurtrie, Charlie (Hailee Steinfeld) trouve en Bumblebee un magnifique exutoire, un monstrueux réconfort

Quelque chose d’une autre saga, également mécanisée mais bon enfant, traverse aussi ce film : celle inaugurée en 1968 par Un amour de coccinelle, de Robert Stevenson, l’histoire d’une gentille Volkswagen qui n’en fait qu’à sa tête et pense à rapprocher les cœurs. Les deux influences créent cet objet étrange qu’est Bumblebee, « spin-off » de la saga, localisé en Californie en 1987 et consacré à l’intempestif mais charmant Autobot jaune et noir qui porte ce nom et qui se transforme tantôt enChevrolet Camaro tantôt en Coccinelle. C’est sous cette dernière forme que le découvre Charlie, dans une décharge où travaille cette adolescente passionnée de mécanique, en souvenir d’un père dont la mort l’a laissée inconsolable. Bumblebee s’y est en vérité mis en sommeil, traqué par deux puissants Decepticons qui veulent l’éliminer, et avec lui, notre espèce.

Une sorte de romance s’engage entre la belle orpheline et le tas de ferraille, dont on se dit qu’il n’y a qu’un lieu sur terre pour la rendre vraisemblable : Hollywood. Ame meurtrie, Charlie fuit son beau-père, pourtant sympa, et passe sa vie recluse dans le garage de sa maison à retaper une voiture que voulait réparer son père. Elle trouve en Bumblebee un magnifique exutoire, un monstrueux réconfort. Hailee Steinfeld interprète remarquablement cette fille simple, loin de l’image sophistiquée que l’actrice cultive à la ville.

Nostalgie des années 1980

S’adjoignent à ces aventures hautes en couleur plusieurs personnages. Memo, soupirant énamouré mais très timide de Charlie, trop heureux d’ajourner sa déclaration d’amour en raison de la guerre des mondes en cours. Otis, le petit frère karatéka de Charlie. Ou encore une tripotée de militaires obtus qui jouent aux plus malins, et dont l’origine pourrait être cherchée du côté du Docteur Folamour, de Stanley Kubrick.

Il ne faudrait pas oublier de citer ce personnage à part entière que sont les années 1980, soigneusement reconstituées tant dans le décor que sur la bande-son (The Smiths, Joy Division, Elvis Costello…), et qui apportent au film la patine nostalgique de la dernière décennie qui précède, au sens technologique, politique et sociétal du terme, ce que l’on pourrait nommer « notre temps ». Tout cela fait de Bumblebee un candidat inattendu à la trêve familiale de fin d’année.

BUMBLEBEE : Bande-Annonce finale #2 VF [Au cinéma le 26 décembre]
Durée : 02:31

Film américain de Travis Knight. Avec Hailee Steinfeld, John Cena, Jorge Lendeborg Jr. (1 h 54). Sur le Web : www.paramountpictures.fr/film/bumblebee et www.facebook.com/bumblebeemovie