L’avis du « Monde » – à voir

Bootleggers et vendeurs de crack à la sauvette, importateurs d’héroïne indochinoise et fabricants de « crystal meth », la chronique de ces métiers raconte l’histoire des Etats-Unis aussi précisément que le Congressional Record (compte-rendu officiel des débats et des délibérations du Congrès américain). Lorsque Hollywood s’empare de la grande saga des addictions qui est aussi celle du pays, l’histoire tourne à la légende dorée. Les exploits de Denzel Washington dans American Gangster ou de Tom Cruise dans Barry Seal : American Traffic, sont « inspirés de faits réels », ces derniers étant sacrifiés – avec plus ou moins de succès – sur l’autel de l’arc scénaristique.

Richard Wershe sort lui aussi de la chronique de la « guerre contre la drogue » que les Etats-Unis mènent depuis des décennies

Richard Wershe, le protagoniste d’Undercover, sort lui aussi de la chronique de la « guerre contre la drogue » que les Etats-Unis mènent depuis des décennies. Pour son premier film tourné outre-Atlantique, Yann Demange – né en France, grandi au Royaume-Uni où il a réalisé son premier et remarquable long-métrage ’71, situé à Belfast, cette année-là – refuse avec énergie les pièges du crime à grand spectacle comme ceux de la reconstitution historique nostalgique.

On est au début de la présidence de Ronald Reagan dont l’épouse, Nancy, conseille aux jeunes Américains de « simplement dire non » à la drogue. A Detroit, les recommandations de la première dame ne trouvent guère d’écho. C’est là que grandit Rick Wershe, adolescent d’une quinzaine d’années, dont le père Rick senior vend des armes, entre autres à un gang de narcotrafiquants afro-américains. Ceux-ci font bon accueil à Rick Junior, qui acquiert ainsi le sobriquet de « White Boy Rick ».

Scénario un tantinet didactique

Dans les rangs du FBI, l’entrée du garçon dans les rangs de la pègre ne passe pas inaperçue. Plutôt que de l’encourager à poursuivre ses études, les agents fédéraux proposent à l’adolescent (sans lui laisser beaucoup le choix) de se lancer dans le trafic en gros sous leur supervision. Il devient ainsi le plus jeune informateur que le Bureau ait jamais engagé. Le scénario un tantinet didactique de Undercover, fait se heurter amoralité des représentants de la loi (incarnée avec superbe par Jennifer Jason Leigh) et les hésitations de White Boy Rick, ballotté entre les tentations de l’argent facile et l’espoir d’échapper à son destin de citoyen d’une ville fantôme. On trouvera sur ce site Internet la relation du triste sort que le système policier et judiciaire a réservé à cet auxiliaire.

Les allers-retours entre le portrait et la fresque sont parfois un peu raides

Dans ses meilleurs moments, Yann Demange parvient à inscrire ce personnage étonnant, à qui le jeune Richie Merritt prête une sensibilité inattendue, dans le labyrinthe infernal de Detroit, métropole brisée par les émeutes de 1967 et l’effondrement de l’industrie automobile, rongée par le racisme et la corruption. Mais les allers-retours entre les deux échelles – le portrait et la fresque – sont parfois un peu raides, ralentissant le rythme du film, le maintenant un peu en deçà du registre politique et cinématographique auquel il aspire, non sans raison.

Undercover : Une Histoire Vraie - Bande-annonce 2 - VF
Durée : 01:31

Film américain de Yann Demange. Avec Matthew McConaughey, Richie Merritt, Bel Powley, Jennifer Jason Leigh (1 h 51). Sur le Web : www.facebook.com/UndercoverUneHistoireVraie.LeFilm et www.sonypictures.com/movies/whiteboyrick