France 5, dimanche 6 janvier à 22 h 35, documentaire

Après l’attentat manqué contre Adolf Hitler, le 20 juillet 1944, l’Allemagne sombre dans la folie meurtrière et la destruction. Le Führer ordonne l’anéantissement de plusieurs métropoles européennes, dont Londres et Varsovie. La Luftwaffe largue 50 000 tonnes de bombes sur les villes britanniques. L’attaque de Coventry donne naissance à un nouveau verbe en allemand, ­coventrieren (« coventriser »), ou détruire une ville en totalité. Lorsque la 2e division blindée s’apprête à libérer Paris début août 1944, Hitler est catégorique : « Paris ne peut tomber entre les mains de l’ennemi ou seulement comme un champ de ruines », télégraphie-t-il au gouverneur militaire du « Grand Paris », le général Dietrich von Choltitz.

Dans ses Mémoires publiés en 1950, celui-ci racontera comment il a sauvé la capitale en refusant d’obéir. Un récit qui sera célébré par la littérature et le cinéma, notamment dans Paris brûle-t-il ?, de René Clément (1966). Le film de Françoise Cros de Fabrique s’applique à déconstruire ce mythe : son enquête établit tout d’abord que von Choltitz était un officier discipliné qui détestait les Français. Il ordonne le minage des ponts et des monuments. Les archives de la Préfecture de police de Paris, retrouvées avec l’aide de Luc Rudolph, ancien contrôleur général de la police nationale, montrent que le service des explosifs est intervenu fin août 1944 pour déminer certains édifices.

Une enquête brillante

Si von Choltitz échoue à appliquer les ordres d’Hitler, c’est parce qu’il manque de temps et de troupes. Celles-ci ne sont pas assez nombreuses pour mater l’insurrection parisienne. Comme l’explique l’historien Fabrice Virgili, von Choltitz accepte le cessez-le-feu négocié par le ­consul de Suède Raoul Nordling avec les gaullistes, non pour sauver Paris, mais sa peau.

Malgré cet accord, Hitler ne renonce pas à son projet de réduire Paris en poussière. Il ordonne des tirs de missile V1 depuis la coupole d’Helfaut, dans le Pas-de-Calais. L’officier Hans Speidel affirmera n’avoir pas transmis cet ordre qu’il jugeait « absurde ». En réalité, ces tirs étaient impossibles à exécuter.

Cent vingt avions larguent des centaines de bombes incendiaires sur la capitale dans la nuit du 26 août

Hitler commande ensuite à la Luftwaffe de bombarder Paris. Cent vingt avions larguent des centaines de bombes incendiaires sur la capitale dans la nuit du 26 août. Des missiles V2 tirés depuis la Belgique feront également de nombreux dégâts dans vingt-deux communes autour de Paris. A Alfortville (Val-de-Marne), soixante maisons sont réduites en cendres. Alors que les tirs se font de plus en plus précis et se rapprochent de leur cible, la capitale, ceux-ci s’arrêtent le 6 octobre, lorsque Hitler décide de concentrer les bombardements sur Londres.

Au lendemain de la seconde guerre mondiale, les ingénieurs allemands qui ont conçu les missiles V1 et V2 ne seront pas inquiétés. Ceux-ci sont recrutés pour participer aux programmes militaires nucléaires américain, soviétique et français. De même, von Choltitz sera longtemps ­considéré comme un héros par les Parisiens. Dans le contexte de la guerre froide, il devient capital pour les Occidentaux de réintégrer l’Allemagne dans le jeu politique international. Au total, une enquête brillante, s’appuyant sur un solide corpus d’images d’archives, qui exhume des pages effacées par l’histoire officielle.

[TEASER] Détruire Paris : les plans secrets d'Hitler - 6/01/2019
Durée : 01:22

Détruire Paris, les plans secrets d’Hitler, de Françoise Cros de Fabrique et de Richard Poisson (Fr., 2017, 55 min). www.francetvpro.fr/france-5 et www.eclecticprod.com