Bahreïn a rejeté, vendredi 11 janvier, un appel des Nations unies (ONU) à libérer l’opposant et défenseur des droits de l’homme Nabil Rajab, directeur du Centre for Human Rights (BCHR), une ONG interdite. Il a été condamné en février à cinq ans de prison pour des tweets qui critiquaient le gouvernement yéménite.

La déclaration des autorités de Manama a été diffusée quelques heures avant l’arrivée du secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo. On ne sait pas si M. Pompeo évoquera la question des droits de l’homme pendant sa visite à Bahreïn.

L’appel du bureau des droits de l’homme de l’ONU à libérer M. Rajab, au nom de la « liberté d’expression », date du 4 janvier. Dans une déclaration, la « direction générale des crimes électroniques » de Bahreïn l’a rejeté, arguant que le militant des droits de l’homme avait posté des tweets « faux et malveillants »

Selon le communiqué officiel, l’opposant purge une peine de cinq ans de prison pour avoir « insulté publiquement des Etats frères en temps de guerre », une référence à la coalition menée par l’Arabie saoudite qui intervient militairement depuis 2015 au Yémen. Toujours selon ce texte, M. Rajab a également « retweeté » des messages sur des cas présumés « d’attaques physiques et de torture » à la prison de Jaw, à Bahreïn, « insultant » ainsi notamment le ministère de l’Intérieur.

Des dizaines de dissidents emprisonnés

La situation dans cette monarchie du Golfe s’est tendue depuis les troubles de février et mars 2011, à l’époque du printemps arabe. Ces révoltes avaient alerté les autres familles régnantes du Golfe. Et les forces saoudiennes et émiraties avaient maté la rébellion. Depuis, la situation s’est considérablement dégradée pour les opposants au régime, les autorités ayant repris au cours de ces derniers mois les derniers gages de pluralisme donnés à l’opposition.

Des mouvements d’opposition ont été dissous et des dizaines de dissidents et défenseurs des droits de l’homme emprisonnés, condamnés, déchus de leur nationalité. M. Rajab, 54 ans, a été l’un des meneurs officieux du mouvement de 2011, et il est aujourd’hui devenu l’un des symboles de cette répression, condamné à plusieurs reprises. Le Bahreïn, pays de 600 000 habitants, est tenu par un pouvoir sunnite, qui ne cesse de rogner les possibilités d’expression de la majorité, chiite, de la population.

Les autorités de Bahreïn nient toute discrimination, affirmant être la cible de groupes violents soutenus par l’Iran voisin. Téhéran dément toute implication. La position des Américains, elle, a évolué depuis l’élection de Donald Trump, lequel s’est rapproché des monarchies du Golfe. Les critiques de Washington se font beaucoup plus rares que sous l’ère Obama.