Un sacré grain de sable s’est introduit in extremis dans le mécanisme de nomination des membres du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Richard Ferrand, le président de l’Assemblée nationale, a renoncé mardi 15 janvier à proposer Mireille Faugère parmi les deux personnalités extérieures qu’il doit nommer au CSM. L’audition de l’ancienne directrice générale de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) par la commission des lois de l’Assemblée nationale devait se tenir mercredi matin, avec celles d’Yves Saint-Geours et Sandrine Clavel, les deux personnalités proposées par le président de la République, et d’Hélène Pauliat, la seconde personne proposée par M. Ferrand.

Un article du Canard enchaîné paru le 16 janvier est venu rappeler une condamnation récente de Mireille Faugère pour une histoire d’argent indûment perçu lorsqu’elle dirigeait l’AP-HP. L’imprudence du président de l’Assemblée dans son choix peut surprendre puisqu’il suffisait de taper le nom de Mme Faugère dans un moteur de recherche sur Internet pour trouver la mention du jugement du tribunal administratif de Paris du 12 juillet 2018 qui lui impose de rembourser à l’administration hospitalière 148 934 euros.

Ce jugement avait été révélé le 27 juillet par le site d’information spécialisé sur la santé Hospimedia. Mme Faugère a cumulé des revenus issus d’entreprises privées pendant son mandat à la tête de l’AP-HP, de 2010 à 2013. Elle touchait des jetons de présence en tant que membre des conseils d’administration d’EDF et d’Essilor. Un cumul de rémunérations publiques et privée interdit. Le tribunal administratif a jugé qu’elle avait donc mené des « activités privées prohibées » et a « indûment » perçu ces 148 934 euros.

Hausses de la rémunération et de l’indemnité de licenciement

La Chambre régionale des comptes avait par ailleurs relevé en 2016 que l’ancienne directrice générale de la branche SNCF Voyages avait augmenté de 50 % sa rémunération par rapport au précédent patron de l’AP-HP et avait perçu à son départ en novembre 2013 une indemnité de licenciement de 125 000 euros alors qu’elle aurait dû toucher 25 881 euros.

Mme Faugère a fait appel de ce jugement du tribunal administratif. Mais cette affaire a paru sans doute compromettante pour la nommer au Conseil supérieur de la magistrature chargé de veiller à l’indépendance de l’autorité judiciaire, de nommer les juges, de les conseiller en matière de déontologie et de les sanctionner dans le cadre des procédures disciplinaires.

M. Ferrand va devoir trouver un autre candidat dans des délais très brefs alors que le mandat de l’actuel CSM prend fin le 23 janvier. Les magistrats élus sont déjà choisis, mais les personnalités qualifiées proposées par le président de la République et les présidents du Sénat et de l’Assemblée ne peuvent être nommées qu’après soumission aux commissions des lois qui peuvent exercer un droit de veto avec vote contre aux trois cinquièmes.