Une femme évacuée par les pompiers après l’explosion de la rue de Trévise, à Paris, le 12 janvier. / THOMAS SAMSON / AFP

Quand rentrera-t-il chez lui ? Dominique, un jeune retraité, a quitté son appartement dans la précipitation, samedi 12 janvier au matin, juste après l’explosion d’une poche de gaz qui a fait quatre morts et une cinquantaine de blessés, samedi, rue de Trévise, dans le 9e arrondissement de Paris, à côté de chez lui. « J’ai eu le temps d’attraper ma carte bleue, mes papiers d’identité, c’est tout. » Depuis, il n’a pas eu le droit de revenir dans son immeuble, mitoyen de celui soufflé par l’explosion. « Mon assurance m’a financé cinq nuits d’hôtel, raconte-t-il. Mais jeudi matin, je suis à la rue. Comme je ne travaille plus, je vais certainement aller vivre en province, chez ma sœur. Ici, les travaux vont prendre des semaines. Ou des mois… »

Quatre jours après le drame, les habitants des rues de Trévise, de Montyon, Sainte-Cécile et Bergère découvrent à quel point cet accident va bouleverser leur vie. Nombre d’entre eux ne pourront pas regagner leur foyer de sitôt, car tout ce quartier bourgeois du centre de Paris, à deux pas des Folies-Bergère, a été profondément secoué par la déflagration. « Après le bang de l’explosion, il y a eu comme un tremblement de terre », témoigne Dominique. Les bâtiments ont vacillé.

Mercredi 16 janvier, après les inspections effectuées par les architectes de la préfecture de police, la Mairie de Paris a pris des arrêtés de péril visant neuf d’entre eux. « En conséquence, les occupants de ces neuf immeubles, soit une centaine de personnes, ne pourront pas réintégrer leurs logements pour le moment », indique la Mairie. Ils ne pourront même pas y passer quelques minutes, le temps de récupérer des affaires. La décision a été annoncée aux résidents mercredi en fin d’après-midi.

« Personne sans solution »

Lors de la réunion, les représentants de la Mairie ont voulu se montrer le plus rassurant possible : « L’ensemble de ces personnes va bénéficier d’un accompagnement dans son relogement. La Ville de Paris ne laissera personne sans solution. »

Quatre immeubles supplémentaires vont rester temporairement inoccupés, le temps d’être mis « hors d’eau » et que l’électricité y soit rétablie. Au total, treize bâtiments vont donc rester vides dans l’immédiat.

C’est évidemment le cas de l’immeuble haussmannien au numéro 6 de la rue de Trévise, celui d’où tout est parti, à l’angle avec la rue Sainte-Cécile. Rien ne subsiste de la boulangerie et du restaurant qui se trouvaient au rez-de-chaussée. La façade sur la rue, datant de 1892, a tenu bon. « Mais la façade intérieure, qui donne sur la courette, est ouverte, décrit Gabriel Plus, le porte-parole des sapeurs-pompiers. C’est là que le phénomène a été le plus violent, et qu’un de nos camarades s’est retrouvé enseveli plus de deux heures sous les décombres, avant d’être sauvé. »

Sur place, les équipes poursuivent un double travail. Elles fouillent les parties de l’immeuble qui ne l’ont pas encore été, dégagent les gravats, en particulier dans ce qui reste de la cage d’ascenseur. « Cela devrait permettre de mieux comprendre ce qui s’est passé », espère le porte-parole des pompiers. Mais l’urgence consiste aussi à étayer le bâtiment, spécialement le sous-sol, pour éviter qu’il ne s’effondre. Toute cette phase pourrait se conclure « dans une semaine ou dans quinze jours », évaluent les pompiers.

« De nombreux mois »

Au-delà de cet immeuble à l’épicentre de la catastrophe, tout un périmètre de sécurité est interdit, les bâtiments y étant dévastés ou jugés trop dangereux. Les policiers tiennent à l’écart résidents et curieux. Là aussi, les experts, les pompiers, les architectes doivent passer sur place, vérifier si la structure risque de bouger et définir les travaux à effectuer.

Pour six des neuf adresses visées par les arrêtés de péril, « il faudra des travaux très lourds de remise en état, qui pourront prendre de nombreux mois », anticipe-t-on déjà à la Mairie de Paris. Cela concerne l’immeuble où a eu lieu l’explosion, celui mitoyen rue Sainte-Cécile, et quatre bâtiments de la rue de Trévise, qui abritent notamment des hôtels Ibis et Mercure (groupe Accor).

Trois autres immeubles, fragilisés, sont exposés à un « risque d’effondrement », rue de Montyon et rue Sainte-Cécile. « Pour ces bâtiments, les arrêtés pourront être levés à l’horizon de quelques semaines, sauf impondérable, le temps de pallier les risques d’effondrement des immeubles voisins les plus fragiles », avance la Mairie.

D’autres immeubles encore paraissent moins touchés, mais ne peuvent être réoccupés tant qu’il n’y a ni eau, ni gaz, ni électricité. « Les travaux de mise hors d’eau viennent de débuter et sont intégralement pris en charge par la Ville de Paris », précise la Mairie. Objectif d’Anne Hidalgo et de son équipe, permettre aux habitants de les réintégrer « dans les jours qui viennent ». D’ici là, les habitants concernés peuvent y récupérer des affaires, sur présentation d’une pièce d’identité et accompagnés par la police.