Netflix, à la demande, série

On va d’emblée situer l’esprit de la série américano-britannique Sex Education : on y trouvera des personnages et des situations connexes à celles des séries Skins (2007-2013) et ­American Crime (saison 2, 2016), épicées de quelques gauloiseries drolatiques à la manière de la franchise de films American Pie. Le lexique est cru, les images explicites. Mais il n’y a pas de quoi traumatiser les parents, le doigt prêt à actionner la fonction ­ « contrôle parental »…

Le cadre et les personnages ? Un lycée dans la campagne anglaise, où étudie le jeune Otis Milburn (Asa Butterfield), 16 ans, geek maladroit aux yeux bleu myosotis, et son meilleur ami, Eric, qui, gay affiché, subit les brimades d’un harceleur qui se trouve être le fils du proviseur. Une jeune et jolie fille, Maeve, dégourdie et à la réputation sulfureuse, constitue bientôt un trio avec les deux amis.

La série évoque assez finement les fausses routes et les ravages identificateurs qu’induisent la pornographie

Maeve a remarqué qu’Otis, sans la moindre expérience sexuelle, a pourtant un don pour faire parler ses camarades de leurs problèmes intimes (qui sont parfois carabinés). Elle met sur pied un service de conseil individuel payant (dont elle partage les bénéfices) qu’Otis a d’autant moins de mal à animer que sa mère est sexologue – jouée de manière savoureuse par Gillian Anderson, connue pour le rôle de Dana Scully dans la série X-Files : aux frontières du réel.

A l’usage des adolescents

Au long de huit épisodes, cette touchante « dramédie » trace avec beaucoup d’agrément et d’humour un chassé-croisé sentimentalo-sexuel digne d’un Songe d’une nuit d’été des temps actuels où les réseaux sociaux créent des liens, mais aussi des cassures terribles en colportant de fausses informations et des photos volées.

Le sexe pornographique, c’est-à-dire inspiré de ce que les adolescents voient sur Internet, d’une manière ou d’une autre, est l’une des thématiques les plus intéressantes de Sex Education : le propos évoque assez finement les fausses routes et les ravages identificateurs qu’elles induisent.

« Sex Education » témoigne d’une douceur attendrie sur les adolescents et leurs familles, mais sans jamais tomber dans la complaisance et le parfum écœurant d’eau de rose

L’homosexualité (féminine, masculine, affirmée, émergente ou réprimée) n’est pas absente du propos, mais elle n’est plus évoquée comme un « douloureux problème »… Ce qui fait d’ailleurs dire à l’un des personnages adolescents voyant un camarade se faire insulter : « L’homophobie, c’est has been… » Il y a, bien entendu, ici et là, quelques moments conventionnels et attendus, qu’on peut aussi considérer comme des figures imposées et joliment exécutées. Mais on notera l’équilibre entre les bons sentiments dans la description des situations familiales et personnelles, et celle de la crue et cruelle réalité des psychés tourmentées des jeunes gens.

Le regard des auteurs de Sex Education témoigne d’une douceur attendrie sur les adolescents et leurs familles (libertaires, religieuses, sévères ou absentes), mais sans jamais tomber dans la complaisance, le gnangnan et le parfum écœurant d’eau de rose, comme en déverse à l’envi l’insupportable série nord-américaine This Is Us

En faisant un tour des thématiques sexuelles et existentielles de l’âge postpubère, la série de ­Laurie Nunn fournit ce que son titre promet : une assez fine et complète éducation à l’usage des jeunes générations avec quelques décrochages bienvenus sur les usages libidineux de certains adultes et de désopilantes caricatures dont les cibles concernées s’amuseront les premières.

Sex Education | Qui est qui | Netflix
Durée : 02:14

Sex Education, série créée par Laurie Nunn. avec Asa Butterfield, Emma Mackey, Gillian Anderson, Ncuti Gatwa (US-RU, 2019, 8 × 47 - 52 min.)