Face à l’Espagne, Ludovic Fabregas a réalisé un grand match. / ANNEGRET HILSE / REUTERS

« Didier, on ne la lui fait pas deux fois d’affilée ! » Un jour avant la rencontre, dans la fraîcheur d’un gymnase omnisports dans la périphérie de Cologne, le Directeur technique national (DTN) français Philippe Bana a synthétisé l’enjeu du match. La demi-finale du dernier Euro, perdue l’an passé par la France face à l’Espagne (23-27), constituait l’unique défaite en compétition du « Roc » Didier Dinart depuis qu’il a pris la barre du bateau bleu, à l’automne 2016. Et cet échec trottait dans la tête de de ses joueurs à l’heure d’affronter les « Hispanos », samedi 19 janvier. L’équipe de France a répondu présent pour son premier match du tour principal du Mondial, s’imposant (33-30) après avoir mené de bout en bout.

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« Les joueurs avaient vraiment à coeur d’effacer l’affront de janvier dernier, et au moins sur l’engagement, je savais qu’on n’allait pas pécher », a savouré le sélectionneur après la rencontre. Et les Bleus n’ont pas fait mentir celui qui a soufflé sa 42e bougie vendredi. Concernés, appliqués, les coéquipiers de Nikola Karabatic ont d’emblée dominé la rencontre. « On a tout de suite montré qu’on était les patrons, a asséné Kentin Mahé, auteur d’une nouvelle rencontre pleine. D’entrée, on a été très agressifs, en attaque comme en défense . On leur a posé beaucoup de problèmes et ça n’a pas été comme le match d’il y a un an. »

Si la rencontre n’a pas eu grand chose à voir avec la demi-finale de l’Euro, les Bleus avaient rendez-vous avec eux-mêmes, a-t-on senti par instants. Après un tour préliminaire de rodage, où ils ont alterné le chaud et le froid, les champions du monde en titre avaient à coeur de montrer leurs progrès. « Les premiers matches nous ont servi de leçon, observe Luc Abalo. Dès qu’on rencontrait une défense très haute, on attaquait mal. »

Les « tours jumelles » imprenables

Des séances de travail collectif ont permis de remettre l’attaque française, qui perdait énormément de ballons, dans le sens de la marche. « Aujourd’hui, notre jeu était clair, poursuit Abalo. Tout le monde savait ce qu’il devait faire, et ça facilite les ententes entre nous. On s’est mieux trouvés, et les pivots ont touché beaucoup de ballons. »

Si les Bleus déplorent depuis deux matchs l’absence de leur capitaine Cédric Sorhaindo, ils avaient pourtant évolué, l’an passé, en demi-finales, sans leur paire de pivots de niveau mondial. Ludovic Fabregas, absent, et Luka Karabatic, diminué par une blessure au dos, avaient manqué à la défense bleue. Samedi, ils ont répondu présent. « On a pu voir deux tours jumelles au centre de la défense nous stabiliser pendant une heure », a salué Didier Dinart. Opposés à une Espagne jouant beaucoup en contournement autour de son pivot, les deux tours ont mis en échec l’atout de leur adversaire. Sans oublier d’attaquer.

Ludovic Fabregas, jeune pivot barcelonais, s’est ingénié d’entrée à démolir la défense espagnole. Celui que nombre d’observateurs considèrent comme le meilleur pivot de la planète a fait un bien fou à l’équipe de France. « Le niveau d’intensité qu’il met en attaque et en défense, c’est surréaliste ! Il n’y a pas un être humain qui peut faire ce qu’il peut faire pendant 60 minutes », s’exclame le DTN Philippe Bana. D’autant que le sélectionneur n’économise pas son jeune pivot.

Entrée décisive de Melvyn Richardson

Et même quand Arpad Sterbik est sorti de sa boîte et l’a mis en échec, Fabregas ne s’est pas découragé. Comme l’an passé, l’éternel gardien de l’Espagne (39 ans), débarqué samedi matin en remplacement de Corrales- blessé, alors « qu’il buvait des coups vendredi soir en Hongrie », à en croire le DTN français-, a réalisé une performance de haut vol. Mais es onze arrêts n’ont pas suffi à venir à bout des Bleus. Et même les onze buts de Ferran Sole n’ont permis aux Espagnols de perturber l’organisation française.

Dans l’arène de Cologne acquise à la cause de leur adversaire - l’Allemagne et dans leur groupe, et craint les Bleus - les hommes de Didier Dinart ont mené tout au long de la partie. Les changements parfois inattendus du « Roc » ont été payants. Entré en seconde période, le jeune Melvyn Richardson ne s’est pas posé de questions. Positionné en demi-centre, le gaucher a lacéré à plusieurs reprises la défense adverse, signant quatre buts à 100 % de réussite. Imperméable à la pression à l’instar de son père Jackson, quand il évoluait sur le terrain, le gamin (21 ans) a « apporté sa vivacité et son orgueil » à l’équipe, savoure Mahé.

« On sait que ce genre de match se joue toujours dans le money time, et ils ont été sereins, s’est félicité Didier Dinart, n’hésitant pas à sortir la performance de Melvyn Richardson du lot. On a été tout simplement sereins en espérant que le score se fasse, et c’est ce qu’on a pu faire progressivement dans la rencontre. »

En fin de match, les « Hispanos » sont revenus à deux buts d’écart, laissant planer quelques instants le spectre d’une contre-performance. Mais Cyril Dumoulin, le second gardien français a enchaîné deux arrêts, mettant un point final à la partie. Les Bleus ont fait preuve de sérénité tout en étant spectaculaires. En témoigne le kung-fu de Guigou pour Remili en fin de première période. Les joueurs de Didier Dinart entament parfaitement le tour principal de la compétition, conservant la tête de leur groupe. Rendez-vous dimanche, face à l’Islande (20 H 30), pour confirmer. « Ce serait dommage de ne pas poursuivre sur notre lancée », insiste Nikola Karabatic.