Pas d’armes. Du moins pas d’armes à feu. Anne Hidalgo le promet, sa future police municipale sera équipée de matraques et de bombes lacrymogènes, ainsi que de caméras-piétons pour filmer les interventions, mais pas d’armes létales. Les policiers municipaux n’auront pas non plus de pistolets à impulsion électrique, les fameux Taser. Motif invoqué : cette « police du quotidien » chargée de lutter contre les incivilités, « n’a pas à se substituer à la police nationale », celle qui s’attaque au terrorisme, au trafic de drogue, etc.

La maire de Paris a beau invoquer l’exemple de Bordeaux ou celui des « bobbies » londoniens, le fait de ne pas armer la police municipale a immédiatement été critiqué à droite. « Sans armement ni compétence générale, la police municipale parisienne ne pourra répondre au besoin de sécurité criant, alors que les crimes et délits ont augmenté de 20 % entre 2012 et 2017 », juge Florence Berthout, maire (Les Républicains) du 5ᵉ arrondissement. « Dans un contexte de risque terroriste, il est hasardeux de fermer cette porte », commente de façon plus modérée le député parisien Pierre-Yves Bournazel (Les Constructifs).

« Au premier fait divers, la police parisienne sera armée »

La question risque de se poser assez vite. Depuis les années 1980, la France a vu se multiplier les polices municipales, dans un contexte où la sécurité s’est imposée comme un sujet majeur dans le débat public. En 1984, le pays comptait 5 500 policiers municipaux. Près de 22 000 sont recensés aujourd’hui. Depuis les attentats de 2015, ces polices ne sont plus guère contestées. Et le débat qui subsistait sur leur armement s’est presque éteint, notamment à la suite de la mort de Clarissa Jean-Philippe, une policière municipale prise pour cible à Montrouge au seul motif qu’elle portait un uniforme. Après ce drame, « nombre d’élus locaux jusqu’alors rétifs ou indécis se résolvent à armer leurs agents, relate la sociologue Virginie Malochet dans une note publiée en janvier par l’Institut d’aménagement et d’urbanisme d’Ile-de-France. Le point de vue de ceux qui s’y refusent devient minoritaire, presque inaudible dans un tel climat. »

En février 2018, un rapport parlementaire propose même d’inverser la règle en vigueur : au lieu que les polices municipales soient non-armées sauf demande justifiée du maire, l’armement deviendrait obligatoire, sauf refus motivé des élus.

« L’évidence, c’est qu’au premier fait divers, au premier attentat, au premier changement de majorité, la police parisienne sera armée, comme dans de très nombreuses villes », anticipe Laurent Mucchielli, chercheur à l’Université d’Aix-Marseille et spécialiste du sujet. A ses yeux, pourtant, Paris n’a même pas besoin d’une police municipale : « C’est déjà la ville française qui compte le plus de policiers par habitant, et de loin. »