Le nouveau président malgache Andry Rajoelina lors de son investiture à Antananarivo le 19 janvier 2019. / REUTERS

Andry Rajoelina n’a pas tardé à former son équipe gouvernementale. Quelques jours après avoir confirmé Christian Ntsay au poste de premier ministre, le président, investi le 19 janvier, a nommé les vingt-deux ministres qui seront chargés de mettre en œuvre son programme. Une équipe resserrée comme il s’y était engagé et « sous contrat d’un an ». « Ce gouvernement a une obligation de résultats et il sera évalué à l’issue des six prochains mois et au bout d’un an, nous reviendrons ici pour voir qui a pu relever les défis posés et qui en a été incapable », s’est engagé Andry Rajoelina, jeudi 24 janvier. L’Initiative pour l’émergence de Madagascar (IEM) autour de laquelle le candidat Rajoelina avait mobilisé des experts nationaux et internationaux, mais qui doit encore être déclinée en objectifs précis, servira de feuille de route.

La composition du nouveau gouvernement est dominée par des techniciens issus du secteur privé et par des chefs d’entreprise, même si quelques proches en font également partie. « Le chef de l’Etat a su puiser dans un vivier de compétences sans forcément céder aux appels de ceux qui demandaient à être récompensés pour leur soutien. C’est une bonne surprise », analyse un politologue malgache qui ne souhaite pas être cité. Parmi eux, Vonjy Andriamanga, nommé à l’énergie, est ingénieur et il a réalisé une grande partie de sa carrière chez EDF et chez Engie. Julio Rakotonirina, à la santé, est un épidémiologiste issu de l’Institut national de la santé d’Antananarivo. Le directeur général de l’agriculture, Lucien Ranarivelo, devient ministre de l’agriculture.

L’arrivée de l’homme d’affaires et ancien président du Groupement des entreprises de Madagascar, Naina Andriatsitohaina, au poste des affaires étrangères est également perçue comme un signe fort à l’égard des opérateurs économiques en indiquant que la diplomatie malgache devrait avoir pour priorité la défense des intérêts économiques de la Grande Ile.

Promesses de changement

Sur le front des relations avec les bailleurs étrangers, dont Madagascar – sous programme avec le Fonds monétaire international – dépend notamment pour le financement de ses programmes sociaux, Andry Rajoelina a choisi de nommer un homme qu’ils connaissent déjà. Héritant d’un portefeuille qui regroupera l’économie, les finances et le budget, Richard Randriamandranto était chargé dans le précédent gouvernement de Christian Ntsay de la relation avec les partenaires techniques et financiers. Il est aussi l’un des hommes les plus impliqués dans la plateforme IEM.

Deux autres nominations méritent également d’être soulignées, car elles concernent des secteurs où les promesses de changement seront particulièrement scrutées. A la justice, c’est l’ancien procureur général de la cour d’appel d’Antananarivo, Jacques Randrianasolo, qui a été choisi. Le magistrat n’avait pas craint en 2017 de mettre en cause le premier ministre, Olivier Mahafaly, dans le plus grand scandale ayant secoué le mandat d’Hery Rajaonarimampianina. L’affaire portait sur des détournements de subventions publiques et impliquait une proche du chef de l’Etat, Claudine Raizamamonjy, aujourd’hui en prison.

La corruption à grande échelle et l’impunité dont bénéficient les personnalités les plus puissantes de l’île, notamment celles impliquées dans le trafic de bois de rose, sont l’un des héritages du régime « de la transition » dirigée par Andry Rajoelina lui-même entre 2009 et 2014. M. Randrianasolo était déjà en poste à cette époque. Le pillage des bois précieux en dépit de l’embargo international imposé par la Convention sur le commerce international des espèces menacées d’extinction (Cites) n’est à ce jour toujours pas endigué. La nomination d’Alexandre Georget, fondateur du Parti vert de Madagascar, au ministère de l’environnement changera-t-elle la donne ? C’est le signal qui veut être adressé. Rendez-vous dans six mois.