Le Crédit municipal de Paris accorde environ 230 millions d’euros de prêts par an, dont 60 millions d’euros de nouveaux prêts. / Gilles Rolle

Sommé d’honorer une dette de jeu, le prince de Joinville, fils du roi Louis-Philippe, avait, raconte la légende, déposé en gage la montre à gousset offerte par ses parents. A sa mère qui lui demanda où elle était, il aurait répondu l’avoir oubliée chez sa tante, Eugénie-Adélaïde-Louise d’Orléans. Ainsi serait né, durant la première moitié du XIXe siècle, le surnom « ma tante » des monts-de-piété.

Deux siècles plus tard, ces institutions continuent de prêter de l’argent à ceux qui ont un besoin urgentissime, ou qui ne peuvent accéder à un crédit normal. A la seule condition, toujours, qu’ils déposent un objet en gage. Alternative, notamment, aux très coûteux découverts bancaires, elles ont célébré en octobre 2018 le centenaire du décret les ayant réorganisées et leur ayant donné leur nom actuel de « crédits municipaux », établissements publics présents aujourd’hui dans une quarantaine de villes françaises.

Pour célébrer cet anniversaire, le Crédit municipal de Paris organise une opération de « dégagement gratuit » : tous les clients dont la somme des prêts ne dépassait pas 100 euros au 31 octobre 2018 se voient remettre le ou les objets gagés sans avoir à rembourser ni la somme prêtée, ni les intérêts du crédit. « Un courrier a été envoyé aux personnes concernées, qui ont jusqu’au 31 mars pour venir chercher leur(s) bien(s) dans nos locaux [55 rue des Francs-Bourgeois, dans le Marais, NDLR] », explique Frédéric Mauget, le directeur général du Crédit municipal de Paris.

120 000 euros d’objets gagés à rendre

« L’idée de cette opération est d’être fidèles à nos valeurs, nous sommes une institution financière à vocation sociale », souligne M. Mauget. « Tout en respectant, aussi, une tradition du Crédit municipal la dernière opération de ce genre remontait à 2012. »

Coût estimé de l’opération aux frais de l’enseigne : 120 000 euros. Quelque 1 700 personnes sont concernées, sur les 100 000 clients du Crédit municipal de Paris. Depuis le lancement de l’opération début janvier, un peu plus de 300 emprunteurs ont d’ores et déjà fait le déplacement pour reprendre leur objet.

Le Crédit municipal de Paris accorde environ 230 millions d’euros de prêts par an, dont 60 millions d’euros de nouveaux prêts. Montant moyen : 1 079 euros en 2017. Durée moyenne : deux ans et demi. Un peu plus de huit clients sur dix sont des femmes. Et 10 % ne récupèrent pas leur objet. Montant total actuellement emprunté ici : 216 millions d’euros. L’enseigne a le statut d’établissement de crédit et propose, par ailleurs, des livrets d’épargne solidaire.

Comment obtenir un prêt sur gage ?

Pour bénéficier d’un prêt sur gage à Paris, il faut se rendre sur place, au mont-de-piété, pour faire expertiser son objet. Si 95 % des biens gagés sont des bijoux en or, il est aussi possible de déposer argenterie, œuvres d’art, mobilier, tapis, livres de collection, instruments de musique, vins de grands crus, timbres, vélos, etc. Pas d’objets électroniques ou numériques, en revanche.

Si le bien est accepté, on vous proposera immédiatement un prêt d’un an (de 30 euros à 5 millions d’euros). Les intérêts (le TAEG, taux annuel effectif global, varie selon le montant, de 4% à 8,45 %) seront à régler au remboursement du crédit (qui est possible, d’ailleurs, avant un an).

Pour prolonger l’emprunt douze mois supplémentaires, vous devrez d’abord régler la première année d’intérêts. Vous ne souhaitez pas récupérez l’objet ou si vous ne pouvez pas rembourser ? Il sera mis aux enchères. S’il est vendu plus cher que ce que vous deviez, l’excédent vous est reversé. Les modalités d’emprunt varient quelque peu selon les communes.