Violence endémique, pauvreté, corruption, trafic de drogues… autant de raisons qui poussent des milliers de jeunes d’Amérique centrale à quitter leurs pays pour les Etats-Unis. Le pape François, qui participe au Panama aux troisièmes Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) de son pontificat, a pris la défense des migrants qui ne sont pas, selon lui, porteurs du « mal social », vendredi 25 janvier.

« Nous voulons être l’Eglise qui favorise une culture qui sait accueillir, protéger, promouvoir et intégrer ; qui ne stigmatise pas et, surtout, qui ne généralise pas, par la condamnation la plus absurde et la plus irresponsable, en identifiant tout migrant comme porteur de mal social », a déclaré le souverain pontife devant 400 000 personnes, selon les organisateurs.

Le pape argentin, qui a fait de la question des migrants l’un des thèmes centraux de son pontificat, a appelé à accueillir et à prendre en charge « tous ceux qui sont abandonnés et contraints de quitter, ou de perdre leur terre, leurs racines, leurs familles et leur travail ». Il avait déjà abordé ce thème à bord de l’avion l’emmenant au Panama. « La peur nous rend fous », avait-il dit en réponse à une question sur le projet de Donald Trump d’ériger un mur à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique.

Des mots qui ont trouvé un écho particulier chez Herberth Cruz, étudiant salvadorien de 29 ans qui a fait quarante heures d’autocar pour venir au Panama. « Mes voisins ont dû émigrer à cause des gangs. On peut te tuer si tu passes par la mauvaise rue. Je ne pouvais pas aller à la messe dans ma paroisse car elle était sur le territoire d’une autre bande », a-t-il déclaré

Chaque année, environ un demi-million de personnes d’Amérique centrale traversent le Mexique à la recherche du rêve américain, mais l’an dernier les migrants ont décidé de circuler en groupe, en caravanes misérables, provoquant la colère du président Donald Trump. L’année 2018 a également été marquée par l’exode massif de Vénézuéliens fuyant la crise économique et politique dans leur pays.

« Un mur invisible »

Dans la matinée, le chef des 1,3 milliard de catholiques dans le monde s’est rendu dans une prison pour mineurs à proximité de la capitale panaméenne. « Avec la vie des gens, il semble plus facile de mettre des pancartes et des étiquettes qui figent et stigmatisent, non seulement le passé mais aussi le présent et l’avenir des personnes. Etiquettes qui, en définitive, ne font que diviser : ici il y a les bons et là-bas les mauvais ; ici les justes et là-bas les pécheurs », a déclaré François devant les jeunes détenus du centre de détention de Pacora. « Cette attitude pollue tout parce qu’elle élève un mur invisible qui laisse croire qu’en marginalisant, en séparant, ou en isolant, se régleront magiquement tous les problèmes », a-t-il poursuivi.

Au cours de cette même journée, le scandale des affaires de pédophilie au sein du clergé, absent jusqu’ici des JMJ, a refait surface. Lors d’une conférence de presse, le porte-parole par intérim du Vatican, Alessandro Gisotti, a été interrogé pour savoir pourquoi ce dossier n’avait pas été abordé la veille par le pape lors d’une rencontre avec les évêques d’Amérique centrale. Alessandro Gisotti a assuré que ce thème était « au cœur des préoccupations » de François, qui prépare pour fin février au Vatican une réunion mondiale de prélats très attendue sur « la protection des mineurs » au sein de l’Eglise. « Il s’agira d’une occasion sans précédent d’affronter le problème et de trouver de vraies mesures concrètes pour que, lorsque les évêques repartiront de Rome vers leurs diocèses, ils soient en mesure de faire face à ce terrible fléau », a poursuivi le responsable du Vatican.

En fin de journée, alors que le thermomètre affichait encore 36 degrés, le pape de 82 ans s’est rendu sur la scène géante montée au bord du Pacifique pour le chemin de croix.