Instituée en 2002 à l’initiative des ministres de l’éducation des États membres du Conseil de l’Europe et suivie par les Nations unies, la Journée de la mémoire des génocides et de la prévention des crimes contre l’humanité est célébrée chaque année. La date a été laissée libre de choix à chaque pays. La France et l’Allemagne ont choisi le 27 janvier, date symbolique qui correspond à l’anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau le 27 janvier 1945 par les troupes soviétiques.

Cette journée de mémoire vise notamment à encourager les États à promouvoir des projets éducatifs et à protéger les lieux de mémoire liés à l’Holocauste. Elle a également pour but d’intégrer à ce travail de mémoire toutes les victimes des crimes contre l’humanité.

Des survivants de l’Holocauste sont morts récemment. Après Simone Veil en 2017, deux anciennes déportées d’Auschwitz, qui témoignaient dans les collèges et lycées, sont décédées en septembre : Ida Grinspan, à l’âge de 89 ans et Marceline Loridan-Ivens, à l’âge de 90 ans. Face à cette disparition progressive, et à l’occasion de la Journée internationale des victimes de la Shoah, historiens, enseignants, institutions s’interrogent sur la façon de faire perdurer les témoignages et la mémoire des rescapés.

« On espère que tous ces jeunes devant qui on a témoigné prendront le relais, quand on se sera plus là »: c’est ainsi qu’Esther Senot, 91 ans, rescapée d’Auschwitz s’adresse aux quelque 60 élèves venus l’écouter vendredi au Mémorial de la Shoah. Ce message, Elie Buzyn, 89 ans, autre rescapé le répète aussi, que ce soit dans le froid glacial du camp d’Auschwitz où il s’est rendu récemment, à plusieurs reprises, avec des lycéens ou lors de conférences: « Puisque nous allons disparaître sous peu, je vous charge de devenir les témoins des témoins que nous sommes ».

« C’est un défi, à nous d’écrire cet avenir »

« C’est évidement dramatique car c’est une richesse humaine qui va s’éteindre », affirme Olivier Lalieu, responsable de l’aménagement des lieux de mémoire et des projets externes au Mémorial de la Shoah. « On est en butte à cette disparition mais aussi à la nécessité de la dépasser ». « C’est un défi, à nous d’écrire cet avenir », renchérit Francis Kalifat, président du CRIF (institutions juives), dont l’organisation travaille sur les questions de la transmission et de la commémoration.

Selon une étude (Ifop pour la Fondation Jean-Jaurès) en décembre, 90 % des Français disaient avoir entendu parler du « génocide des Juifs », mais ils n’étaient plus que 79 % chez les moins de 24 ans. « Il faudra qu’on raconte. Il y a une responsabilité. Les anciens nous le demandent et les jeunes ont accepté », estime Haïm Korsia, le grand rabbin de France qui a à coeur depuis quinze ans d’emmener chaque année une centaine d’élèves à Auschwitz.

Depuis plusieurs années, de nombreuses campagnes d’enregistrements ont été menées, en France ou ailleurs (comme à l’institut Yad Vashem à Jérusalem). Le Mémorial de la Shoah possède ainsi 13 000 films et 2 300 enregistrements. En 2018, il a accueilli (sur les sites de Paris et de Drancy) 283 000 visiteurs, dont 67 000 scolaires.

L’Union des déportés d’Auschwitz a également un site internet, « Mémoires des déportations », qui rassemble un millier d’extraits de témoignages, textes et vidéos. « On aura fait tout ce que l’on peut pour laisser une trace. Cela ne m’angoisse pas », confie Henri Borlant, autre rescapé d’Auschwitz, 91 ans.