Asia Bibi devrait pouvoir quitter le Pakistan prochainement. La Cour suprême pakistanaise a rejeté mardi 29 janvier un dernier recours contre son acquittement, à l’issue d’une longue saga judiciaire au retentissement international.

Dénoncée par des voisines pour avoir bu de l’eau d’un puits réservé en principe aux musulmans, cette chrétienne de 52 ans avait été condamnée à mort pour blasphème en 2010, avant d’être reconnue innocente le 31 octobre 2018 et libérée le 8 novembre. Cette décision avait suscité des manifestations de milliers d’islamistes exigeant sa pendaison.

A la suite de ces manifestations, le gouvernement du premier ministre, Imran Khan, avait signé un accord controversé avec les islamistes. L’exécutif s’était engagé à lancer une procédure visant à interdire à Asia Bibi de quitter le territoire et à ne pas bloquer la requête en révision du jugement que devait examiner la Cour suprême. L’accord a été critiqué par de nombreux Pakistanais, furieux que l’Etat ait cédé face aux extrémistes.

« Ce recours est rejeté », a finalement déclaré mardi le juge Asif Saeed Khosa à l’issue d’une audience tenue devant la plus haute instance judiciaire pakistanaise. Plus rien n’empêche désormais Asia Bibi de quitter ce pays musulman très conservateur où elle vit sous haute protection, étant de longue date une cible pour les extrémistes.

Les islamistes dénoncent « un jugement contre le Coran »

« Nous n’accepterons en aucun cas un jugement contre le Coran », avait averti plus tôt mardi le parti islamiste Tehreek-e-Labaik Pakistan (TLP), promettant « un mouvement qui sera vu par le monde entier » si la justice rendait une décision favorable à « la blasphématrice ».

Alors que la France s’est dite favorable à l’accueil de Mme Bibi, le premier ministre canadien, Justin Trudeau, avait affirmé en novembre que son pays était « en discussions » avec Islamabad à ce sujet.

Les défenseurs des droits de l’homme voient en Asia Bibi un symbole des dérives de la loi réprimant le blasphème au Pakistan souvent instrumentalisée, selon ses détracteurs, pour régler des conflits personnels.

Une quarantaine de personnes condamnées pour blasphème se trouvent actuellement dans le couloir de la mort au Pakistan, selon une estimation de la Commission internationale pour la liberté religieuse des Etats-Unis datant de 2018.