Dans le futur système de retraite universel promis par le gouvernement, les droits à la retraite s’exprimeraient uniquement en points. / Eric Audras/Onoky / Photononstop

Exit les fameux trimestres ! Dans le futur système de retraite universel promis par le gouvernement, les droits à la retraite s’exprimeraient uniquement en points. Plus question, donc, de décrocher ou non sa pension « à taux plein ».

Dans le cas général, on obtient aujourd’hui le taux plein au régime général soit en ayant l’âge du taux plein automatique (65-67 ans), soit en ayant le bon nombre de trimestres (il varie selon les générations). Cette notion aujourd’hui centrale disparaîtrait. Le principe d’un âge minimal de la retraite serait toutefois lui conservé, fixé, comme aujourd’hui, à 62 ans (hors exceptions).

Sans la carotte que constitue le taux plein, les seniors ne seront-ils pas tentés de partir plus tôt qu’ils ne l’auraient fait dans le système actuel ? Pour tenter d’éviter cet écueil, les artisans de la réforme privilégient une piste : appliquer aux pensions de ceux qui continent à travailler après 62 ans un coefficient majorant.

Un taux de 3 % à 5 % par année supplémentaire a été évoqué. Ce n’est pas anodin : les experts estiment généralement qu’un taux entre 3 % et 5 % permet d’assurer la « neutralité actuarielle » du dispositif pour le système de retraite (ce qui signifie qu’une telle surcote compenserait, pour l’assuré, les mois de pension qu’il ne toucherait pas en choisissant de reporter sa retraite, mais ne coûterait pas au système).

On peut noter que de tels outils existent déjà aujourd’hui : le régime général accorde par exemple une surcote de 1,25 % par trimestre à ceux qui prolongent leur activité, alors qu’ils ont à la fois l’âge légal de la retraite et le bon nombre de trimestres.

Un exemple pour y voir plus clair

Que ce bonus représenterait-il en euros ?

Imaginons un assuré de 62 ans, ayant à son compteur 5 000 points de retraite du nouveau régime, et un point valant 6 euros.

S’il part à 62 ans, sa pension annuelle s’élèvera à 30 000 euros, soit 2 500 euros par mois.

S’il part à 63 ans, et qu’il engrange à la fois 120 points de plus (acquis en continuant à cotiser) et une surcote de 4 %, sa pension annuelle atteindra alors 31 948,80 euros (30 720 euros + 4 % de surcote), soit 2 662,40 euros par mois.

S’il part à 65 ans, il engrangera 360 points supplémentaires et 12 % de surcote (3 x 4 %), sa pension atteindra 36 019,20 euros (32 160 euros + 12 % de surcote), soit 3 001,60 euros par mois.

Il faut noter que ces simulations sont fictives : elles ont été réalisées sans tenir compte de la revalorisation annuelle de la valeur du point.

Attention, cet exemple suppose que le coefficient majorant accordé soit le même pour chaque année d’activité supplémentaire (ici, 4 % par an donnent 12 % au bout de trois années).

Alternative possible : que la progression du bonus ne soit pas linéaire. On pourrait par exemple dire que la première année de prolongation d’activité rapporte une majoration de 3 %, la seconde 4 %, les troisième et quatrième chacune 5 %, et les suivantes de nouveau chacune 3 % (dans ce cas, la surcote appliquée au bout de trois ans serait d’ailleurs aussi de 12 %, 3 % + 4 % +5 %.)

Linéarité

Cette question de la linéarité ou non du taux reste à trancher, indique l’équipe de Jean-Paul Delevoye, le haut-commissaire à la réforme des retraites. Tout comme celle d’un éventuel plafonnement de la surcote – on pourrait par exemple décider que le taux global de majoration n’augmenterait plus à partir de 67 ans.

Si ce dispositif de surcote est la piste privilégiée par le haut-commissariat à la réforme, un plan B a aussi été proposé aux partenaires sociaux durant les concertations qui se sont déroulées la semaine dernière. L’idée serait de fixer un âge de référence, par exemple celui permettant d’atteindre une pension garante d’un certain taux de remplacement (rapport entre la première pension et le dernier salaire).

Cet âge de référence pourrait être un âge moyen, le même pour tous les assurés, ou un âge personnalisé, au cas par cas. Un départ avant cet âge s’accompagnerait d’une décote alors qu’un départ après serait déclencheur de surcote. Afficher un âge de référence, universel ou personnel, serait a priori plus incitatif au regard du prolongement de l’activité, mais moins facile à faire accepter, car dans le vocabulaire employé, la notion de décote serait réintroduite.

Les détails du dispositif devraient être dévoilés dans les semaines à venir (peut-être fin février ou début mars), à l’issue du second cycle de concertations sociales entre Jean-Paul Delevoye et les partenaires sociaux. Un troisième round devrait alors s’ouvrir pour trancher les questions en suspens. Les recommandations du haut-commissaire au gouvernement, puis la présentation du projet de loi, sont pour l’instant annoncées après les élections européennes, donc a priori au début de l’été 2019.