Pendant la messe de l’église protestante Bethel, à La Haye, le 13 décembre. / Eva Plevier / REUTERS

C’est la fin d’un marathon d’un genre inédit. L’église protestante Bethel, à La Haye, a annoncé, mercredi 30 janvier, qu’elle mettait fin à un service religieux commencé il y a quatre-vingt-seize jours, pour empêcher l’expulsion d’une famille de migrants arméniens.

La famille Tamrazyan, qui compte trois enfants, était arrivée aux Pays-Bas il y a neuf ans ; elle avait quitté l’Arménie à la suite de menaces de mort visant le père de famille en raison de ses activités politiques. Leur demande d’asile ayant été rejetée, le couple et leurs enfants s’étaient réfugiés, le 25 octobre, dans une petite église protestante : aux Pays-Bas, la police n’a pas le droit de pénétrer dans un lieu de culte pendant un office religieux.

Les Tamrazyan s’étaient ainsi installés au premier étage du lieu de culte pendant que les messes attirant de nombreuses personnes du quartier mais également des quatre coins du pays ont commencé à être célébrées au rez-de-chaussée à partir du 26 octobre. Près de six cent cinquante pasteurs de tout le pays, mais aussi de France, d’Allemagne et de Belgique ont participé à l’organisation de messes sans discontinuer.

Espoir déçu à Noël

A l’occasion des fêtes de fin d’année, l’église Bethel caressait l’espoir d’un geste de la part du ministère de la justice néerlandais : celui-ci a le pouvoir d’accorder un permis de séjour à des mineurs faisant face à un ordre d’expulsion. Espoir déçu.

C’est finalement après trois mois de prières qu’un accord a été conclu avec le gouvernement pour un nouvel examen des demandes d’asile refusées. Cette mesure concerne les dossiers d’environ sept cents enfants ayant grandi aux Pays-Bas.

L’église Bethel « arrête les offices continus organisés depuis le 26 octobre », a déclaré le président du conseil général de l’Eglise protestante de La Haye, Theo Hettema. « L’accord politique conclu mardi offre à la famille arménienne Tamrazyan une perspective d’avenir sûr aux Pays-Bas », s’est-il réjoui dans un communiqué. « Nous avons gardé espoir pendant des mois et, maintenant, cet espoir se concrétise », a-t-il ajouté.

Avenir incertain pour la famille

Hayarpi Tamrazyan, au centre, la fille aînée de la famille, exprime son soulagement lors d’une conférence de presse. / ROBIN VAN LONKHUIJSEN / AFP

Mercredi, Hayarpi Tamrazyan, l’aînée de la famille, âgée de 21 ans, a exprimé son soulagement lors d’une conférence de presse, qui était précédée d’une dernière cérémonie à l’église Bethel. La jeune fille espère que l’accord lui permettra « d’avancer dans [sa] vie et [ses] études ». Elle a cependant précisé ne pas connaître de manière officielle l’avenir réservé à sa famille.

« L’accord dit nous allons réévaluer les dossiers”. Donc nous ne savons pas encore officiellement si nous pouvons rester puisque le dossier doit encore être jugé. »

L’histoire de la famille Tamrazyan fait écho à une affaire qui avait profondément ému les Néerlandais en septembre, lorsque deux adolescents arméniens, dont l’expulsion prévue vers leur pays avait suscité une vive émotion, ont en fin de compte été autorisés à rester aux Pays-Bas.

Cette victoire constitue aussi un symbole dans une Europe tétanisée par la montée des nationalismes et de la xénophobie, où les responsables politiques européens continuent à ne pas trouver d’approche commune et humaniste face à des migrants prêts à tout pour fuir la misère et la guerre.