Un manifestant porte une pancarte dénonçant l’usage du lanceur de balles de défense  (LBD40) lors des manifestations, pendant l’acte XII des « gilets jaunes » à Paris, samedi 2 février 2019. / ZAKARIA ABDELKAFI / AFP

En pleine polémique sur les lanceurs de balles de défense (LBD), plusieurs milliers de « gilets jaunes » ont manifesté samedi 2 février à travers la France pour dénoncer les violences policières, lors de l’acte XII du mouvement des « gilets jaunes », lancé le 17 novembre 2018. A Paris, une « grande marche des blessés » s’est élancée vers midi du douzième arrondissement, pour rejoindre la place de la République. D’autres défilés ont eu lieu à Valence, Tours, Rouen ou encore Bordeaux.

A 14 heures, 17 400 personnes étaient mobilisées dans toute la France, contre 21 000 à la même heure la semaine précédente, selon des chiffres du ministère de l’intérieur régulièrement contestés par les « gilets jaunes », qui accusent le gouvernement de minorer l’ampleur de la mobilisation.

  • A Paris, Jérôme Rodrigues acclamé, des incidents en fin de parcours

Parties de la place Félix-Eboué à Paris, plusieurs milliers de personnes ont d’abord rallié dans le calme la place de la République en milieu d’après-midi, derrière des banderoles réclamant l’interdiction des grenades et des lanceurs de balles de défense (LBD) et un kaléidoscope de visages tuméfiés.

Devenu l’emblème des manifestants blessés, le « gilet jaune » Jérôme Rodrigues, gravement touché à l’œil droit samedi dernier, a été acclamé à chacune de ses apparitions. « Jérôme courage. Jérôme on t’aime. Jérôme on est avec toi », ont scandé des manifestants. D’autres figures du mouvement, notamment Eric Drouet et Maxime Nicolle, ont également participé à la marche.

Après un défilé sans heurts, de premiers incidents ont éclaté Boulevard Saint-Martin, aux alentours de la place de la République, où les forces de l’ordre ont commencé à faire usage de lacrymogènes et de canon à eau pour maintenir à distance des manifestants qui leur lançaient des projectiles. Des affrontements épars se sont ensuite poursuivis place de la République, où du matériel urbain a été incendié et des manifestants interpellés.

« Tout le monde déteste la police », ont scandé des manifestants. L’un d’eux a été évacué par les pompiers après avoir été atteint au visage par un tir de LBD, a constaté un journaliste de l’AFP. Saisi en urgence d’une demande d’interdiction du LBD, le Conseil d’Etat avait estimé vendredi que le risque de violences dans les manifestations rendait « nécessaire de permettre aux forces de l’ordre de recourir » à cette arme controversée. Le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, a reconnu que cette arme – utilisée plus de 9 200 fois depuis le début de la contestation – pouvait « blesser » et a promis de sanctionner « les abus ». Il en a toutefois défendu l’utilisation « pour faire face aux émeutiers ».

Dans la capitale, 10 500 personnes selon la police, 13 800 selon un comptage réalisé par le cabinet Occurence pour un collectif de médias, ont participé au cortège.

  • A Valence, une marche régionale dans une ambiance bon enfant

Quelque 5 400 manifestants, selon la préfecture, ont bravé froid et pluie à Valence (Drôme) pour une marche régionale. Le cortège s’est ébranlé vers 13 h 30 au sud du centre-ville dans une ambiance bon enfant alors que dès la fin de la matinée, des « gilets jaunes » venus de Lyon, de Saint-Etienne, d’Ardèche, de Marseille ou de Corse notamment s’étaient rassemblés aux cris de « Macron démission ». De brèves échauffourées ont éclaté lorsque les manifestants ont bifurqué vers la préfecture, contrairement à ce qui était prévu.

La préfecture, qui avait dit craindre la venue de casseurs, a annoncé l’interpellation de 18 personnes et la saisie d’une centaine « d’armes blanches ou par destination », dont des haches, des sabres, des couteaux, machettes et gourdins sur plus de 30 points de contrôle mis en place autour du centre-ville.

Le maire Les Républicains (LR) de Valence, Nicolas Daragon, a également rapporté que deux policiers avaient été blessés, un CRS victime d’un jet de pavé et un autre qui se trouvait dans un véhicule dont une vitre a été brisée.

  • Mobilisation à Bordeaux, Toulouse, Lyon, Lille, Caen…

- A Bordeaux, la préfecture refuse depuis deux semaines de donner des chiffres concernant la mobilisation. Sous un vent froid, le cortège a défilé dans les rues du centre-ville aux cris habituels de « Macron démission » ou d’appels à la grève générale pour le 5 février, confirmant malgré la place de Bordeaux comme l’un des bastions des « gilets jaunes ».

- A Toulouse, autre place forte du mouvement, plusieurs milliers de personnes ont manifesté pour rendre hommage aux blessés du mouvement.

- Dans la matinée, des marches ont également eu lieu dans le grand ouest, à Caen où des « gilets jaunes » arboraient cache œil ou bandages et à Rouen, des pancartes appelant Macron à « faire (sa) valise ».

- A Lille, plusieurs centaines de manifestants ont marché aux cris de « Castaner démission », arborant là aussi des bandeaux sur le front ou les yeux, tachés de faux sang.

- A Lyon, le cortège a tenté d’emprunter les rues commerçantes du centre-ville, mais en a été empêché par les forces de l’ordre. « On va forcément se faire gazer à un moment ou à un autre, l’idée c’est de partager le gaz avec tout le monde », a scandé un manifestant dans un haut-parleur.