• Erich Wolfgang Korngold
    Trio avec piano op.1. Trio avec piano op.3 de Zemlinsky. Trio Stefan Zweig.

Pochette de l’album du Stefan Zweig Trio consacré à Erich Wolfgang Korngold. / ARS PRODUKTION

Le jeune Trio Stefan Zweig a débuté à Vienne en 2012. En choisissant pour patronyme le nom de l’illustre écrivain autrichien, les trois musiciens – la pianiste Sibila Konstantinova, le violoniste Kei Shirai et le violoncelliste Tristan Cornut – affichent d’emblée leur affinité avec la tradition musicale viennoise. D’où l’exigeant programme présenté dans cet enthousiasmant album, aussi captivant par sa rigueur et sa finesse, sa plasticité technique que par son hyperbolique expressivité. Korngold a 13 ans lorsqu’il compose son opus 1, l’œuvre d’un prodigieux « Wunderkind », alliant fulgurances, intuition, imagination. Toutes qualités que possèdent sans compter nos jeunes talents. Entre passion et extase, vigueur et sensualité, puissance, voire exubérance, les Stefan Zweig magnifient le jeune génie du futur compositeur de La Ville morte (Die Tote Stadt). Même chose dans l’opus 3 de l’aîné Zemlinsky (qui fut un temps professeur de Korngold), version magistrale où le violon a remplacé la clarinette mais où les intermittences du cœur le disputent aux mouvements profonds de l’âme. Marie-Aude Roux

1 CD Ars Produktion

  • Hanna Paulsberg Concept
    Daughter of The Sun

Pochette de l’album « Daughter of The Sun », d’Hanna Paulsberg Concept. / ODIN RECORDS / OUTHERE

Lors d’un concert au festival Jazz à La Villette, le 10 septembre 2017, la saxophoniste Hanna Paulsberg avait fait forte impression. En ancrage avec le jazz classique – Stan Getz a été sa première influence – autant qu’une forme d’abstraction que l’on peut entendre dans les compositions de Wayne Shorter. Tout cela, dans le son, l’interprétation, la complicité avec les membres de son groupe Concept – le pianiste Oscar Grönberg, le contrebassiste Trygve Fiske et le batteur Hans Hulbækmo – se retrouve dans un nouvel album, Daughter of The Sun, qui accueille en plus le trompettiste Magnus Broo. Souvent dans un lent développement des compositions, avec par endroits des poussées venues du free (Bouncing With Flower Buds), la musique de la formation évolue aussi vers des sources africaines (Serianna). Le charme, l’intérêt de Daughter of The Sun s’affirmant par un sens de l’allusion plus que de l’affirmation. Sylvain Siclier

1 CD Odin Records/Outhere

  • Cass McCombs
    Tip of The Sphere

Pochette de l’album « Tip of the Sphere », de Cass McCombs. / ANTI / PIAS

Personnage mystérieux, peu disert avec les journalistes, le Californien Cass McCombs préfère s’exprimer à travers le prisme de son inspiration, plutôt fertile et d’une constance remarquable. Dans le prolongement de Mangy Love paru en 2016 (élu album rock de l’année par le site américain Pitchforkmedia), ce neuvième opus consacre la versatilité de ce dandy né en 1977, traînant son spleen aussi bien vers la pop à guitares rêveuse (The Great Pixley Train), la country exotique un peu absurde (Prayer for Another Day) que les sonorités jazz (Tying Up Loose Ends) et latines (Estrella). Sa dernière obsession : détourner habilement le soft rock estampillé 80’s. Sleeping volcanoes, dont les paroles célèbrent une fin du monde imminente, contraste avec une esthétique pop FM légère façon Roxy Music. Rounder, qui boucle l’album, ressuscite le blues enfumé du Grateful Dead au long de ses dix minutes, avec une décontraction suprême. Franck Colombani

1CD Anti/PIAS

  • Junius Meyvant
    Across The Borders

Pochette de l’album « Across The Borders », de Junius Meyvant. / RECORD RECORDS

Depuis le milieu des années 2010, le chanteur, guitariste et auteur-compositeur islandais Unnar Gísli Sigurmundsson enregistre, sous le nom de Junius Meyvant, des merveilles de pop soyeuse et délicate teintée de soul à l’ancienne. Son premier album, en 2016, donnait, par son titre Floating Harmonies (« harmonies flottantes »), le ton de son univers. Voici Across The Borders, publié, comme le précédent, par la petite compagnie phonographique islandaise Record Records. Une formation de cordes, un ensemble de vents, des chœurs, viennent à nouveau enrober des mélodies lumineuses, la voix de Junius Meyvant, à la belle expressivité, dont la légère raucité évoque par moments celle de Rod Stewart à ses débuts. Si le premier album avait par endroits quelques poussées appuyées dans les arrangements, Across The Borders, toujours dans cet équilibre entre pop et soul, a gagné en légèreté sans pour autant perdre en intensité musicienne. S. Si

1 CD Records Records

  • Leyla McCalla
    Capitalist Blues

Pochette de l’album « Capitalist Blues », de Leyla McCalla. / JAZZ VILLAGE / PIAS

Il y a une dizaine d’années, Leyla McCalla a quitté New York pour la Nouvelle-Orléans. Elle raconte y avoir trouvé un « nouveau plaisir de vivre », dit y avoir rencontré une musique « vibrante, vivante partout et tout le temps ». Le troisième album de la chanteuse fait écho à ce ressenti et aux couleurs musicales de l’endroit, dont elle s’est imprégnée avec gourmandise. Pour preuve la nonchalance de la voix, l’indolence de son blues irrigué des notes perlées de son banjo (elle n’utilise désormais quasiment plus le violoncelle avec lequel on l’a connue), les élans alertes de cuivres, de clarinette, de violon (le groupe King James and The Special Men)… Elle n’a pour autant pas oublié son identité créole, transmise par ses parents partis d’Haïti, autrefois, et reprend trois traditionnels haïtiens. Au final, un joli recueil de chansons, certaines révélant une verve piquante, telles que The Capital Blues, Money is King ou Aleppo (« Bombs are falling in the name of peace… »). Patrick Labesse

1CD Jazz Village/PIAS