Des centaines de Tunisiens manifestent, entre autres, pour la dépénalisation de l’homosexualité et en faveur de l’égalité hommes-femmes devant l’héritage, le 18 août 2018, à Tunis. / FETHI BELAID / AFP

En Tunisie, un homme qui avait porté plainte pour viol, s’est retrouvé condamné à six mois de prison pour homosexualité, ont déclaré, lundi 11 février, le parquet et une association militant pour les droits des homosexuels à l’Agence France-Presse (AFP).

L’homme, âgé de 26 ans, s’était rendu à un rendez-vous de nature sexuelle avec un autre homme rencontré sur Facebook, selon l’association Shams. L’homosexualité étant illégale en Tunisie, les lieux de rencontre sont rares, et les réseaux sociaux forment une alternative, parfois risquée. Arrivée au rendez-vous, la victime s’est retrouvée face à deux hommes qui l’ont violée, puis lui ont volé ses effets, selon la version de la victime relayée par Shams.

Il s’est alors rendu au commissariat pour dénoncer ses agresseurs, mais le procureur a ordonné un test anal, pratique contestée mais fréquente en Tunisie, pour établir s’il avait déjà eu des relations homosexuelles par le passé. Il a été condamné à six mois de prison pour sodomie, et deux mois pour dénonciations calomnieuses, la cour ayant estimé qu’il ne s’agissait pas d’un viol mais d’une dispute à la suite de la relation sexuelle, a précisé le parquet de Sfax. Les deux autres hommes ont, quant à eux, été condamnés chacun à six mois de prison pour sodomie, quinze jours pour violences et un mois et demi pour vol, selon la même source.

« Violation flagrante » des droits de l’homme

Dans un communiqué, l’association tunisienne Damj, qui défend les droits des homosexuels, a dénoncé ce « genre de procès, qui représente une violation flagrante des droits de l’homme et de la dignité morale ». Elle a appelé à « l’arrêt immédiat » de toutes les poursuites judiciaires se basant sur l’article 230 qui pénalise les rapports homosexuels et de la fin des examens anaux « humiliants ». Cette association réclame « la révision de tous les textes juridiques discriminatoires qui vont à l’encontre de la liberté et ne correspondent plus avec les libertés individuelles stipulées dans la nouvelle Constitution ».

Les condamnations pour homosexualité se sont multipliées ces dernières années. En 2018, 127 personnes ont été condamnées à des peines de prison pour homosexualité, contre 79 en 2017 et 56 en 2016, selon Shams. « Les juges deviennent de plus en plus stricts sur les affaires de mœurs », a souligné l’avocat Mounir Baatour, qui dirige l’association Shams, mettant cela sur le compte de « l’influence grandissante » du parti d’inspiration islamiste Ennahda dans les tribunaux.