Lors des manifestations contre le président haïtien à Port-au-Prince, le 12 février. / JEANTY JUNIOR AUGUSTIN / REUTERS

Des scènes de chaos. Haïti a connu mardi 12 février une nouvelle journée de tensions. Au moins six personnes ont trouvé la mort depuis le début de la contestation jeudi, contre le président, dont les manifestants demandent la démission. Celui-ci est resté muet.

Les 78 détenus de la prison d’Aquin, une petite ville sur la côte sud, se sont évadés à la mi-journée, a confirmé le porte-parole de la police nationale d’Haïti (PNH). Les circonstances exactes de l’évasion ne sont pas encore déterminées. Selon les témoins, un rassemblement contre l’exécutif avait lieu devant le commissariat jouxtant l’établissement pénitentiaire.

A 200 km au nord, le centre-ville de la capitale Port-au-Prince a été le théâtre d’affrontements entre la police et des centaines de manifestants des quartiers populaires. Un jeune homme a été tué par balle sur un carrefour proche du palais présidentiel.

La police n’a fourni un bilan des pertes en vies humaines qu’après la première journée de mobilisation nationale de l’opposition, le 7 février : deux personnes avaient alors trouvé la mort. Depuis, quatre autres décès par balle ont été recensés par les journalistes de l’Agence France-Presse (AFP).

« Une colère populaire légitime »

Voitures incendiées, quelques magasins pillés : après la dispersion du cortège qui a rassemblé plusieurs milliers de personnes dans la capitale, mardi, les opposants les plus déterminés ont exprimé avec rage leur frustration contre les inégalités sociales grandissantes, aggravées par la corruption systémique.

La frustration populaire a été exacerbée par la publication, fin janvier, d’un rapport de la Cour supérieure des comptes sur la gestion calamiteuse et les possibles détournements des fonds prêtés depuis 2008 par le Venezuela à Haïti pour financer son développement.

Des scènes de pillage lors d’une manifestation contre le président haïtien à Port-au-Prince, le 12 février. / JEANTY JUNIOR AUGUSTIN / REUTERS

Une quinzaine d’anciens ministres et hauts fonctionnaires sont épinglés. De même qu’une entreprise dirigée à l’époque par le président Jovenel Moïse, identifiée comme bénéficiaire de fonds pour un projet de construction d’une route sans signature de contrat. Face à cet audit, à la colère populaire et aux violences, le pouvoir exécutif s’enfonce dans un mutisme troublant.

Lundi soir, les associations du secteur privé ont déploré, via une note de presse, « une colère populaire légitime qui est malheureusement orientée à tort vers les entreprises qui créent des emplois » et souhaitent l’instauration d’un dialogue entre acteurs politiques.

Face à la dégradation de la situation en Haïti, Washington a ordonné mardi à tous les enfants du personnel diplomatique de l’ambassade des Etats-Unis de quitter le territoire. Dans son communiqué, le département d’Etat « approuve » également le départ du personnel non essentiel et des membres adultes des familles de personnel américain.