Plusieurs sociétés françaises impliquées dans l’affaire « Pétrole contre nourriture » – dont Renault Trucks, Legrand et Schneider Electric – ont été condamnées vendredi 15 février en appel pour avoir accepté des surfacturations en échange de contrats du régime irakien de Saddam Hussein, alors soumis à embargo.

Après une relaxe générale en 2015, la cour d’appel de Paris a condamné plusieurs sociétés pour « corruption d’agent public étranger », en l’occurrence l’Etat irakien, à des peines d’amende avec sursis allant de 30 000 euros à 430 000 euros et, dans la plupart des cas, « sans inscription au casier judiciaire ».

« C’est cosmétique, on condamne parce qu’on ne peut pas ignorer la décision de la Cour de cassation, mais cela n’a aucune conséquence », a commenté un avocat de la défense. La cour a en effet tenu compte de la jurisprudence de la Cour de cassation qui avait, en mars 2018, rejeté le pourvoi du pétrolier Total contre sa condamnation en 2016 à l’amende maximale pour corruption d’agent public étranger (à l’époque de 750 000 euros).

Système imposé par le régime irakien

Au cœur de ce procès « pétrole contre nourriture II », quatorze sociétés plus ou moins grosses qui avaient accepté un système imposé par le régime irakien aux abois aux firmes étrangères désireuses de commercer avec le pays.

L’Irak était alors soumis à un embargo strict à la suite de l’invasion du Koweït en 1991, mais l’Organisation des Nations unies (ONU) avait mis en place le programme « Pétrole contre nourriture », qui, de 1996 à 2003, avait pour objectif d’encadrer des ventes d’hydrocarbures censées financer des importations devant répondre aux besoins humanitaires de la population.

Le régime de Saddam Hussein en avait profité pour mettre en place un système occulte de surfacturation à son profit : les sociétés étrangères souhaitant bénéficier du programme devaient surévaluer leurs factures de 10 %. Ces sommes étaient qualifiées de « frais de transport » ou de « service après-vente », mais étaient en réalité reversées par des circuits parallèles dans les caisses du pouvoir.

En première instance, les magistrats avaient relevé que ce système avait bien été « mis en place par les plus hautes autorités irakiennes », voire Saddam Hussein lui-même, et que l’argent avait atterri dans les caisses de la banque centrale irakienne. Pour le tribunal, il n’avait alors pas été « établi » d’intervention « d’agents étrangers » ayant bénéficié d’un enrichissement personnel.