Les deux défilés, baptisés sur Facebook « Tsunami jaune » et « Tous aux Champs Elysées, on ne lâche rien », partiront à 12 heures et 13 heures de l’Arc de Triomphe et se disperseront à partir de 17 heures place du Trocadéro. / ERIC FEFERBERG / AFP

Les « gilets jaunes » réinvestissent la rue, samedi 23 février, pour leur acte XV, espérant endiguer le déclin de leur mobilisation depuis un mois, avec de nouveaux rassemblements à Paris et en province.

A Paris, cinq manifestations ont été déclarées, dont trois sous la forme de rassemblements, a indiqué par communiqué la préfecture de police. Les deux défilés, baptisés sur Facebook « Tsunami jaune » et « Tous aux Champs Elysées, on ne lâche rien », partiront à 12 heures et 13 heures de l’Arc de Triomphe et se disperseront à partir de 17 heures place du Trocadéro. Cette « marche dans les beaux quartiers » doit notamment descendre les Champs-Elysées, traverser le quartier de l’Opéra, contourner le musée du Louvre et faire une pause devant le siège du Medef avant de rallier l’esplanade du Trocadéro.

Près de 4 000 personnes ont annoncé vendredi soir leur intention de participer à ces rassemblements, et plus de 18 000 se sont déclarées « intéressées », des chiffres qui ne présument pas de l’affluence dans la rue : samedi dernier, 5 000 « gilets jaunes » ont défilé dans la capitale, selon les autorités.

  • Eric Drouet au Salon de l’agriculture à Paris

Les principales figures du mouvement ont annoncé leur présence dans différents lieux de rassemblement. La figure des « gilets jaunes » Eric Drouet s’est rendu samedi matin au Salon de l’agriculture à Paris, avant d’en repartir vers midi, pour tenter d’« approcher » le président Emmanuel Macron, qui a inauguré l’événement et commencé une déambulation dans les allées de la manifestation. « Le dialogue a été rompu il y a un certain temps » et « on voulait voir si on pouvait s’approcher du président », a affirmé Eric Drouet, sans son gilet jaune, à des journalistes de l’Agence France-Presse.

Une autre figure du mouvement, Benjamin Cauchy, a également annoncé sur Twitter samedi matin qu’il allait se rendre au salon de l’agriculture. « #Giletsjaunes libres et agriculteurs veulent plus de pouvoir d’achat et une Europe des nations qui protège », a-t-il écrit, sans préciser à quel moment il s’y rendrait.

  • Clermont-Ferrand s’est barricadée

Sur Facebook, Maxime Nicolle a indiqué qu’il participerait au rassemblement à Rennes tandis que Priscillia Ludosky se joindra au pique-nique organisé devant le Château de Chambord, un pied de nez à Emmanuel Macron qui y avait fêté ses 40 ans fin décembre 2017.

D’autres rassemblements en province sont prévus, notamment à Bordeaux, qui est avec Toulouse l’une des places fortes de la mobilisation, théâtre régulier de heurts violents avec les forces de l’ordre. Les syndicats de police bordelais ont d’ailleurs alerté vendredi leur hiérarchie nationale sur la situation « critique » et la « lassitude morale et physique » des policiers, réclamant des moyens de lutte plus efficaces contre « la guérilla urbaine ». « Si certains pensent que les policiers seront épuisés et qu’on les aura à l’usure, ils se trompent », a cependant assuré le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, lors d’un déplacement à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). « Les policiers seront présents et feront leur métier », a-t-il ajouté.

Nombre d’entre eux, ainsi que des gendarmes, seront d’ailleurs mobilisés à Clermont-Ferrand, où 3 000 personnes sont attendues, depuis toute la région Auvergne-Rhône-Alpes. La ville entière s’est barricadée : commerces, parcs et bâtiments publics seront fermés dans l’après-midi, tandis que les concerts et les spectacles ont été annulés. Tout ce qui peut servir de projectiles a été retiré (horodateurs, poubelles, bancs publics, etc.) pour un coût total estimé à 300 000 euros.

  • Toulouse, blocage de la plateforme Amazon

Une centaine de personnes, dont des « gilets jaunes », bloquaient samedi matin la plateforme Amazon de Toulouse, qui a été fermée, empêchant toute livraison, a constaté un journaliste de l’AFP. Près de la plateforme, devant laquelle des pneus ont été entassés, des manifestants – membres du mouvement « Gilets jaunes » Toulouse mais aussi d’Attac ou d’ANV COP21 notamment – distribuaient aux automobilistes des tracts affirmant « Amazon détruit les emplois et la planète ». « Emmanuel Macron veut faire payer la transition écologique par les plus pauvres. Pourquoi ne pas faire payer les gros pollueurs qui doivent déjà de l’argent à la société ? », pouvait-on lire aussi sur les tracts.

Les manifestants dénoncent aussi « l’exploitation » par Amazon « des salariés », « la pollution de l’environnement » et fustigent le montant « dérisoire » des impôts payés en Europe et en France par le géant américain de la distribution en ligne, une « fraude fiscale » selon eux. Le blocage de la plateforme toulousaine pourrait durer « une grande partie de la journée, sauf si de nombreux gilets jaunes rejoignent la manifestation » prévue en début d’après-midi dans le centre de Toulouse, a précisé le communicant d’ANV COP21.

Depuis quatre week-ends consécutifs, l’affluence décroît selon le ministère de l’intérieur, dont les chiffres sont régulièrement contestés par les manifestants. Le dernier samedi avait mobilisé 41 000 personnes en France, contre 282 000 lors de la première journée d’action du 17 novembre, date du lancement de ce mouvement de contestation sociale inédit.

« Gilets jaunes » : le leader grenoblois Julien Terrier en garde à vue

Le leader grenoblois des « gilets jaunes », Julien Terrier, et un autre membre actif du mouvement ont été placés en garde à vue, samedi 23 février au matin, a-t-on appris auprès du parquet de Grenoble. Les deux hommes sont « dans les locaux de la gendarmerie dans le cadre d’une enquête de flagrance », a précisé le procureur de la République. L’enquête a été ouverte pour « participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences ou dégradations » et « organisation d’une manifestation sur la voie publique sans déclaration préalable ».

Julien Terrier et Jérôme Bouzendorffer avaient appelé cette semaine à une opération péage gratuit à Voreppe, sur l’autoroute A48, à l’occasion de l’acte 15 du mouvement national des « gilets jaunes », alors que ce week-end de chassé-croisé s’annonce très chargé sur les routes. Le 8 décembre, Julien Terrier avait déjà été placé en garde à vue à Grenoble. Il lui était reproché d’avoir organisé une manifestation illégale.