Manifestation contre un cinquième mandat d’Abdelaziz Bouteflika, à Alger, le 1er mars 2019. / ZOHRA BENSEMRA / REUTERS

C’est une journée décisive pour l’Algérie, qui va décider de la suite de la contestation que connait le pays depuis 10 jours. Ce dimanche 3 mars marque la date limite de dépôt des candidatures à l’élection présidentielle du 18 avril : passé minuit, plus personne ne pourra se porter candidat.

Tous les regards sont bien sûr tournés vers Abdelaziz Bouteflika, qui devrait déposer sa cinquième candidature, malgré les appels de la rue pour qu’il y renonce.

  • Le directeur de campagne de Bouteflika limogé

Samedi, le président Bouteflika a limogé son directeur de campagne, Abdelmalek Sellal, au lendemain de manifestations massives.

M. Sellal, un ancien premier ministre qui avait animé les trois précédentes campagnes victorieuses (2004, 2009, 2014) de M. Bouteflika, a été remplacé par le ministre des transports, Abdelghani Zaalane, a annoncé simplement l’agence APS, citant « la direction de campagne » du chef de l’Etat.

Aucune explication n’a été donnée à ce changement. En l’absence physique de M. Bouteflika, qui ne s’est pas adressé aux Algériens depuis un accident vasculaire cérébral en 2013 et qui n’apparaît plus que rarement en public, M. Sellal se retrouvait en première ligne depuis le début de la contestation.

  • Abdelaziz Bouteflika hospitalisé en Suisse

Le chef de l’Etat algérien, qui a fêté samedi ses 82 ans, est hospitalisé en Suisse depuis sept jours, officiellement pour « des examens médicaux périodiques ». Son retour en Algérie n’a toujours pas été annoncé.

Aucune disposition légale ne semble cependant obliger un candidat à se présenter en personne au Conseil constitutionnel pour y déposer son dossier.

Et toute la semaine, le camp présidentiel a réaffirmé que la contestation n’empêcherait pas le scrutin de se tenir dans les délais et que le dossier de candidature du chef de l’Etat serait remis dimanche au Conseil constitutionnel.

  • Peu d’adversaires crédibles face à M. Bouteflika

Peu de candidats semblent être en mesure de faire le poids face au président sortant. Trois figures de l’opposition semblent tergiverser quant à leur candidature :

  • Principal adversaire de M. Bouteflika aux présidentielles de 2004 et 2014, son ancien premier ministre Ali Benflis doit annoncer dimanche s’il se porte ou non candidat.
  • Abderrezak Makri, président et candidat déclaré du Mouvement de la société pour la paix (MSP), principal parti islamiste qui a rompu en 2012 avec l’alliance présidentielle, doit lui aussi se décider dans la journée.
  • Ali Ghediri, général à la retraite débarqué sans parti fin 2018 de façon fracassante sur la scène politique en promettant notamment une « IIe République » et qui était extrêmement discret ces dernières semaines, devait lui déposer son dossier dimanche matin, a annoncé son coordinateur de campagne, Mokrane Ait Larbi, sur Facebook.

Pour l’heure, seuls quatre petits candidats ont déposé leur dossier de candidature:

  • Abdelaziz Belaïd, 55 ans : transfuge du Front de libération nationale (FLN), la formation du président Bouteflika, qu’il a quitté en 2011 pour créer le Front Al-Moustakbel. Il a recueilli 3 % des voix à la présidentielle de 2014;
  • Un ancien ministre du tourisme, Abdelkader Bengrina, président du Mouvement El Bina (islamiste), a annoncé avoir déposé samedi son dossier de candidature auprès du Conseil constitutionnel;
  • Deux quasi inconnus : Ali Zeghdoud, président du microscopique Rassemblent algérien (RA) et Abdelkrim Hamadi, un indépendant. Déjà candidats déclarés lors de précédentes présidentielles, leur dossier n’avait pas été validé.

Le Parti des Travailleurs (PT), petite formation d’extrême-gauche, a renoncé, en raison de la contestation, à présenter un candidat, pour la première fois depuis 2004. Enfin, l’homme d’affaires Rachid Nekkaz, omniprésent sur les réseaux sociaux et qui draine des foules de jeunes enthousiastes, semble ne pas remplir les conditions d’éligibilité. Il dit avoir obtenu la perte de sa nationalité française, mais la loi électorale prévoit qu’un candidat ne doit jamais « avoir possédé une autre nationalité » qu’algérienne.

Une fois les dossiers déposés, le Conseil constitutionnel statuera dans les dix jours sur leur validité.

Notre sélection d’articles pour comprendre la contestation en Algérie

Depuis le 22 février, le mouvement de protestation le plus important des deux dernières décennies a poussé des dizaines de milliers d’Algériens dans les rues pour exprimer leur opposition à un cinquième mandat d’Abdelaziz Bouteflika avant l’élection présidentielle prévue le 18 avril 2019.

Retrouvez ci-dessous les contenus de référence publiés par Le Monde pour comprendre la crise qui traverse le pays :

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