Le mandat de protection future entre en application lorsque vous ne pouvez plus pourvoir seul à vos intérêts / Manuel Sulzer/Cultura / Photononstop / Manuel Sulzer/Cultura / Photononstop

Très répandu au Québec, en Espagne ou en Allemagne, le mandat de protection future est encore peu utilisé en France mais gagne à être connu. Mis en place depuis le 1er janvier 2009, il permet de désigner une personne qui se chargera de gérer vos biens et de prendre les décisions vous concernant au cas où, à la suite d’un accident ou d’une maladie, vous seriez dans l’impossibilité de le faire. « Il s’agit d’une mesure d’assistance privée qui remplace les dispositifs judiciaires comme la tutelle ou la curatelle. Dans ce contrat, c’est la personne qui désigne pour elle-même un mandataire pour la représenter, et non un juge qui choisit à sa place », explique Nathalie Peterka, professeure de droit à l’université Paris-Est-Créteil (Upec).

En pratique, le contenu du mandat est large : il peut, par exemple, préciser si vous souhaitez être maintenu le plus longtemps possible à domicile, lequel de vos biens vendre pour financer une maison de retraite ou la fréquence désirée de vos promenades… « C’est une feuille de route rédigée par le mandant qui organise ses propres souhaits de vie en cas d’éventuelle dépendance », précise Nathalie Couzigou-Suhas, notaire à Paris.

Tant que vous conservez toutes vos facultés, le mandat ne produit aucun effet, vous pouvez le révoquer ou en changer et le mandataire peut y renoncer. Il entre en application lorsque vous ne pouvez plus pourvoir seul à vos intérêts. Cela doit néanmoins être constaté par un médecin habilité par le procureur de la République. Un exemplaire du certificat médical et du mandat de protection future doit être remis au greffe du tribunal d’instance.

Désigner un mandataire

Choisir son ou ses mandataires n’est pas toujours simple. Ils peuvent faire partie ou non de votre famille et doivent avoir accepté formellement le mandat en le signant. « Il est possible d’en désigner un pour la gestion de ses biens et un autre pour la gestion de sa personne. Dans les deux cas, il est recommandé qu’ils soient plus jeunes que vous, précise Nathalie Couzigou-Suhas. S’appuyer, par exemple, sur ses enfants, ses neveux ou nièces suppose une concertation familiale, car le mandat de protection future est une lourde responsabilité », ajoute-t-elle. Le mandataire que vous désignerez peut se faire assister par un spécialiste si cela est nécessaire (gestion d’un placement financier, par exemple). Une rémunération peut être prévue ou, au minimum, le défraiement des dépenses engagées (transports…).

Concrètement, le mandat peut être rédigé sous seing privé, à partir d’un modèle fourni par le ministère de la Justice, ou avec l’aide d’un avocat. Son enregistrement aux impôts coûte 125 euros. Autrement, il peut être établi chez un notaire (obligatoire si le mandat concerne un enfant handicapé). Pour cela, il faut compter environ 400 euros (enregistrement compris). Selon la formule choisie, les pouvoirs du mandataire sur votre patrimoine sont plus ou moins étendus. Un mandat sous seing privé ne lui autorise que des « actes d’administration », la gestion au quotidien de votre patrimoine (par exemple, souscrire un contrat d’assurance).

Pour les autres, il devra demander l’autorisation du juge des tutelles. Avec un mandat établi chez le notaire, il pourra réaliser des « actes de disposition », comme vendre vos biens immobiliers, sous la surveillance du juge. Le notaire a aussi plusieurs obligations, dont celle d’un suivi régulier. « Le mandataire doit lui présenter les comptes chaque année afin qu’il les contrôle », précise Nathalie Couzigou-Suhas. Ce travail est facturé entre 140 et 415 euros par an, en fonction du patrimoine.