Face-à-face entre étudiants et policiers lors de manifestations à Alger, le 5 mars 2019. / RYAD KRAMDI / AFP

Un important dispositif policier restait déployé à Alger, mercredi 6 mars, au lendemain de nouvelles manifestations organisées par les étudiants pour que le président Abdelaziz Bouteflika renonce à briguer un cinquième mandat.

Une demi-douzaine de camionnettes de police et un canon à eau étaient garés près de la place de la Grande-Poste, au cœur de la capitale, transformée mardi par les étudiants en immense agora festive durant plusieurs heures. Le même dispositif était visible place Audin, à environ 500 mètres, autre lieu de rassemblement habituel des manifestants.

Aucun rassemblement n’était prévu ce mercredi, mais les Algériens ont déjà l’esprit à vendredi, début du week-end et, désormais, jour traditionnel de manifestations, marqué ces deux dernières semaines par d’imposants défilés à travers le pays. Le 8 mars, la journée de mobilisation, qui s’annonce très forte, coïncidera avec la Journée internationale des femmes.

« Discours d’apaisement » du général Gaïd Salah

Mardi, le chef d’état-major de l’armée, le général Ahmed Gaïd Salah, a dénoncé ceux qui « veulent ramener » l’Algérie aux années de guerre civile (1992-2002) et rappelé que l’armée restait le « garant de la stabilité et la sécurité » du pays. Mercredi, la presse algérienne soulignait dans ce discours l’absence de référence explicite aux manifestations, de menace claire contre les manifestants et d’allusion à la présidentielle du 18 avril et à la candidature du président Bouteflika, dont le général, par ailleurs vice-ministre de la défense, est un fidèle.

Ahmed Gaïd Salah « semble abandonner le ton belliqueux qu’il usait jusque-là pour parler de la situation politique en Algérie », note le quotidien francophone El Watan. Dans son discours, « Gaïd Salah n’a pas soufflé mot » de la contestation actuelle, « préférant un discours d’apaisement » dans lequel il n’a « à aucun moment brandi une quelconque menace contre les manifestants », souligne de son côté Liberté, autre quotidien francophone.

Fin février, le général Gaïd Salah avait dénoncé dans un discours « ceux qui veulent pousser les Algériens vers l’inconnu à travers des appels anonymes douteux, prétendument en faveur de la démocratie », en référence aux appels à manifester relayés sur les réseaux sociaux. L’armée « considère que celui qui appelle à la violence par n’importe quel moyen et sous quelque prétexte que ce soit, à l’ombre de la conjoncture, est un homme qui ignore le désir du peuple de vivre dans la stabilité et la sécurité », avait-il prévenu.

Cette partie du discours, prononcé devant des militaires, avait été diffusée lors du journal de la télévision publique de la mi-journée, avant de disparaître des extraits diffusés le soir et de la retranscription officielle.

Les médecins et les avocats mettent la pression

Alors que n’est toujours pas annoncé le retour d’Abdelaziz Bouteflika, hospitalisé en Suisse depuis plus de dix jours pour, officiellement, des « examens médicaux périodiques », l’ordre des médecins a mis la pression, mercredi, sur le Conseil constitutionnel, qui juge de la validité des candidatures à la présidence de la République. Tout en saluant « le mouvement populaire pacifique » actuel, il rappelle « les règles de déontologie » concernant la rédaction des certificats médicaux pour les candidats et indique que ceux qui les rédigent doivent être « inscrits au tableau de l’ordre des médecins ».

De son côté, l’ordre des avocats de Tizi-Ouzou (100 km à l’est d’Alger) a, dans une lettre ouverte publiée dans la presse, « interpellé les membres du Conseil constitutionnel sur leurs devoirs » en rappelant que « les capacités physiques et mentales », conditions d’accès à la fonction de magistrat, « ne doivent être éludées concernant les candidats à la magistrature suprême ». M. Bouteflika, 82 ans, est handicapé par les séquelles d’un accident vasculaire cérébral depuis 2013, qui l’ont empêché depuis de s’adresser de vive voix aux Algériens et ont rendu rares ses apparitions publiques.

Notre sélection d’articles pour comprendre la contestation en Algérie

Depuis le 22 février, le mouvement de protestation le plus important des deux dernières décennies en Algérie a poussé des dizaines de milliers de personnes dans les rues pour exprimer leur opposition à un cinquième mandat d’Abdelaziz Bouteflika, avant l’élection présidentielle prévue le 18 avril.

Retrouvez ci-dessous les contenus de référence publiés par Le Monde pour comprendre la crise qui traverse le pays :

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