Des forces de sécurité évacuent l’un des blessés après l’attaque dans la prison de Condé-sur-Sarthe, le 5 mars. / JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP

Michaël Chiolo, le détenu radicalisé de 27 ans qui a poignardé mardi 5 mars deux surveillants à la prison de haute sécurité de Condé-sur-Sarthe, a été interpellé dans la soirée à l’issue d’un assaut des forces de l’ordre au cours duquel sa compagne a été tuée. Voici ce que l’on sait des deux assaillants :

  • Un jeune désocialisé, converti à l’islam

Né en Moselle le 11 juillet 1991, à la frontière franco-allemande, Michaël Chiolo a fait l’objet de plusieurs enquêtes. Selon les éléments rassemblés, il est désocialisé depuis l’âge de 17 ans et en fuite de son foyer quand il est arrêté à 20 ans, en avril 2012. Quelques jours plus tôt, au sein d’un trio de marginaux, il a séquestré et tué un ancien résistant de 89 ans dont il convoitait le coffre-fort. Son ancienne avocate, Me Pauline Brion, se souvient d’un garçon « intelligent, très cultivé », sans formation ni profession, « devenu un peu vagabond » après avoir coupé les ponts avec sa famille.

En 2010, il s’affichait pourtant heureux et amoureux sur son blog, fier de ses origines italiennes et converti à l’islam, sous le nom d’Abdel-Karim. Mais l’année se conclut sur un procès pour des faits d’escroquerie et un vol aggravé commis entre 2008 et 2010.

  • De l’attaque d’une bijouterie au meurtre d’un ancien résistant

Deux ans plus tard, le 13 avril 2012, le voilà donc mené par un ami d’enfance, de cinq ans son aîné, dans l’attaque d’une bijouterie en Sarre, de l’autre côté de la frontière. 4 000 euros de butin et l’envie de recommencer les mènent le 17 avril, avec un troisième complice, au domicile de Roger Tall, un octogénaire qui avait pu s’échapper du camp de concentration de Dachau, et qui avait décoré de la Croix de guerre.

Michaël Chiolo a donc 20 ans quand il tue – pour 300 euros et quelques médailles – ce rescapé de la Shoah, qui succombe à ce vol à main armé, étouffé par du scotch à son domicile de Montigny-lès-Metz. Le jeune homme est arrêté après deux semaines de cavale.

Pour l’expert psychiatre du procès, Michaël Chiolo présente un « trouble de la personnalité grave de type dissociale », sur lequel les psychothérapies sont « sans effet ». « Risque de récidive violente majeure » et « grande dangerosité », note-t-il.

  • En prison, la radicalisation

Mi-décembre 2015 à Metz : Michaël Chiolo est condamné en appel à 30 ans de réclusion criminelle pour enlèvement et séquestration suivi de la mort d’un ancien résistant. Là aussi, l’enquête le décrit comme « dangereux et manipulateur », sans remords.

Son procès et celui de ses complices se tient après un autre jugement qui illustre l’évolution du jeune homme en détention. Un mois plus tôt, le tribunal de Mulhouse l’a reconnu coupable d’apologie du terrorisme. Michaël Chiolo avait demandé à ses codétenus de rejouer la tuerie du Bataclan dans la cour de la maison d’arrêt.

Me Dominique Rondu, avocat de la sœur de la victime, se souvient, au premier procès à Nancy en 2014, d’un « garçon assez froid, indifférent à la situation » et à sa gravité. La condamnation du jeune homme à 28 ans de réclusion criminelle semble marquer un tournant. Il fait appel et au second procès « on avait affaire à quelqu’un qui visiblement s’était radicalisé, qui avait toujours cette froideur, cette indifférence », se souvient l’avocat.

Marlène Schott, avocate de l’ami de Michaël Chiolo, décrit « un jeune homme paumé » au premier procès, sans signe de radicalisation. « Au deuxième procès, il était beaucoup plus inquiétant (…) sur la défensive » et le sujet s’impose à l’audience. Les débats mentionnent un incident en détention à Epinal : « Il avait obligé ses codétenus à boire huit litres d’eau par jour pour se purifier », raconte-t-elle.

  • En détention, il rencontre Hanane Aboulhana

Suivi par le renseignement pénitentiaire et inscrit au fichier pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT), Michaël Chiolo n’était libérable qu’en 2038. « Personne n’est venu témoigner pour lui au procès », se souvient son ancienne avocate. Me Brion avait néanmoins fait citer sa nouvelle compagne à la barre, « une femme rencontrée en prison ». « Il avait écrit à quelqu’un pour qu’on lui trouve une épouse », se souvient-elle.

Selon nos informations, Hanane Aboulhana, 34 ans et enceinte, n’était pas fichée pour des faits de radicalisation. Blessée dans l’assaut du Raid, elle est décédée mardi soir.