Un peu comme la FM (ou modulation de fréquence), le Digital Audio Broadcast (diffusion radionumérique, ou DAB+) permet d’accéder à la radio gratuitement sur une partie du territoire, dans la rue comme chez soi. Le DAB+ présente toutefois quelques atouts et défauts qui le distinguent de la FM.

Lors du lancement de cette technologie, en 2014, dans trois grandes villes françaises, plusieurs importantes stations de radio avaient refusé de participer à l’aventure, mais, en 2017, l’annonce du déploiement national du DAB+ semble avoir modifié leurs intentions. Ces radios ont participé à l’appel d’offres lancé en automne 2018 pour les fréquences nationales du DAB+, dont le résultat sera connu dans les jours à venir. Mardi 5 mars, Radio France a déjà préempté six des vingt-quatre canaux nationaux disponibles. L’objectif du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) est de couvrir 70 % de la population métropolitaine d’ici à 2020, puis 85 % quelques années plus tard.

Mais comment fonctionne le DAB+ ? Explications.

  • Faut-il une radio spécifique pour en profiter ?

Oui, et seule une petite minorité de Français sont aujourd’hui équipés de radios capables de recevoir le DAB+ selon WorldDAB, une association chargée d’harmoniser le déploiement du DAB dans le monde. Les postes de radio ordinaires ne sont pas compatibles, même si certaines radios haut de gamme récentes en sont équipées, parfois sans que leur propriétaire le sache. Le prix des radios DAB+ commence à 30 euros, et l’on trouve des modèles de marques réputées dès 50 euros. Les voitures sont rarement équipées d’autoradios compatibles DAB+ (20 % seulement des voitures neuves en disposent). Le premier prix pour un autoradio DAB+ est de 70 euros.

  • Quand ma région sera-t-elle couverte ?

Le DAB+ n’a pas vocation à couvrir tout le territoire, et dans un premier temps sa couverture se limitera aux grandes agglomérations et aux grands axes routiers. Cette radio numérique est déjà disponible à Paris, Marseille, Nice, dans plusieurs grandes villes du nord de la France, d’Auvergne-Rhône-Alpes et d’Alsace.

Elle est attendue à Nantes en juin et à Rouen en septembre. Les détails de la couverture, ville par ville, sont disponibles sur le site officiel du DAB+. Le reste de la France suivra progressivement. Pour s’en faire une idée précise, on peut consulter, par exemple, la carte très claire bâtie par La Lettre pro, un média sur la radio. Pour le moment, la couverture française de la radio FM reste bien plus large, mais dans une dizaine d’années « le nombre d’antennes du réseau national DAB+ culminera à trois cents, selon un expert du CSA interrogé par nos soins, s’approchant de celui des antennes FM du plus vaste réseau national, celui de NRJ, qui totalise trois cent cinquante-cinq antennes ».

  • A la maison, captera-t-on le DAB+ aussi bien que la FM ?

Dans les endroits couverts par les deux réseaux, la FM pourrait rester un peu plus facile à capter que le DAB+. Dans les conditions les plus mauvaises, quand la réception est très faible, la FM continue de fonctionner en qualité audio très dégradée tandis que le DAB+ coupe net.

  • Captera-t-on bien le DAB+ en voiture ?

La réception du DAB+ s’annonce à terme excellente sur autoroutes et les très grands axes routiers, puisque le réseau DAB+ national a été conçu spécifiquement pour les couvrir, ce qui n’est pas le cas du réseau FM, selon l’expert du CSA interrogé par Le Monde. Sur le reste du réseau routier, les deux technologies pourraient se compléter. D’après le même expert, certains autoradios devraient passer automatiquement d’une station FM qu’on ne capte plus à la même station en DAB+, et inversement.

  • Le DAB+ fait-il vraiment progresser la qualité audio ?

Le discours de certains fabricants de radio laisse entrevoir un gain de clarté et de définition sonore, mais il y a des raisons d’en douter. Le DAB+ n’offre pas une qualité audio supérieure à la FM quand celle-ci est captée parfaitement. Cependant, la réception FM étant loin d’être toujours idéale, le DAB+ devrait sonner mieux dans certaines conditions, même s’il n’approchera jamais la qualité d’un CD audio. Car le DAB+ compresse le son pour réduire le canal de transmission dans lequel il voyage, en éliminant au passage quelques détails sonores, un peu comme le MP3, même si la technologie employée n’est pas la même. Le tout est de savoir à quel point la musique est comprimée.

Le niveau de compression employé par le DAB+ en France, comme dans d’autres pays, est assez franc. Le débit du flux audio est ramené à 80 kbit/s. Or, dans un rapport du CSA datant de 2015, on peut lire que ce seuil semble tout juste suffisant pour égaler la qualité de la FM.

Le rapport précise toutefois que, étant donné que la qualité de la réception FM varie beaucoup en fonction de l’endroit où l’on se trouve, le numérique peut offrir une bonne solution de rechange :

« Un équipementier automobile a indiqué qu’une large partie de l’écoute de la FM en voiture se fait avec un son en monophonie (…). Dès lors, la réception de signaux numériques, lorsque le signal peut être correctement reçu, apporte un rendu qualitatif notable. »

Dans des conditions de mauvaise réception, le DAB+ devrait mieux résister à la dégradation sonore que la FM, car, selon l’expert du CSA, il résiste mieux aux brouillages et aux échos. Même si, contrairement à la FM, le DAB+ ne fonctionne plus du tout dans des conditions de réception très fortement dégradées.

A noter, la qualité audio du DAB+ pourrait varier en fonction des stations, car les groupes de radios qui bénéficient de plusieurs canaux peuvent ajuster la taille de chaque canal, pour favoriser la qualité audio de certaines stations au détriment d’autres, dans les limites du raisonnable. En Suisse, la qualité audio varie de façon importante d’une station à l’autre.

  • Le DAB+ offre-t-il plus de stations ?

Les ténors de la bande FM ont longtemps boudé le DAB+. Parmi les grosses radios qui ont refusé d’embarquer sur le navire en 2014, beaucoup ont toutefois participé à l’appel d’offres de 2018 pour la couverture nationale. C’est le cas d’Europe 1, RTL et NRJ. Le résultat de cet appel d’offres sera connu courant mars.

Selon le CSA, le DAB+ a le pouvoir de distribuer aux Français des stations auxquelles ils n’avaient pas accès en FM, et d’apporter une réponse à la saturation de la bande FM. Le site officiel du DAB+ cite l’exemple lillois : trente-huit radios ont été lancées en DAB+ en 2018, dont vingt-six n’étaient jusqu’alors pas disponibles en FM, comme Nova ou TSF Jazz. Le DAB+ est donc complémentaire à l’éventail des stations FM de Lille, laquelle offre néanmoins une vingtaine de stations inaccessibles en DAB+, comme Chérie FM ou France Culture. A la suite de l’appel de fréquences DAB+ national, certaines de ces radios pourraient prochainement être disponibles en DAB+ à Lille.

  • Techniquement, quelle est la différence avec la FM ?

La radio numérique terrestre utilise de grandes antennes radio qui diffusent sur la fréquence de la télévision analogique VHF, qui a cessé d’émettre en 2005. Comme la FM, le DAB+ véhicule donc la musique par la voie des ondes, mais en ajoutant une étape : la musique est d’abord convertie en informations numériques avant de voyager dans les airs. Le format numérique offre la possibilité d’accompagner la musique d’informations riches, comme la photo de la couverture d’un album. Les usagers du DAB+ sont anonymes : les postes de réception sont incapables de faire remonter des informations sur leurs utilisateurs.

Le DAB+ est-il une technologie nouvelle ?

Le DAB est une norme d’émission numérique qui remonte aux années 1990. Sa version améliorée, le DAB+, a été lancée en 2007, mais elle est longtemps restée confidentielle en France. Son lancement officiel n’est intervenu qu’en 2014 à Paris, Nice et Marseille. Le réseau a repris sa croissance en 2018, avec le lancement local du DAB+ dans plusieurs grandes villes françaises.

  • La FM va-t-elle disparaître ?

Le DAB+ ne devrait par aboutir à la fin de la FM, si l’on en croit les propos de l’ancien président du CSA, Olivier Schrameck, en 2018 ; il déclarait alors que « le développement du DAB+ ne saurait en rien mettre en cause l’avenir de la FM ». A très long terme toutefois, il serait imprudent d’écarter complètement cette hypothèse, puisqu’en Norvège le DAB+ a définitivement remplacé la FM, qui a cessé d’émettre en 2017, et qu’en Suisse la coupure est prévue pour 2024.