Sylvie Serprix

C’est dans des conditions qui furent très défavorables sur les marchés que Le Monde – associé au cabinet d’étude des performances Fundclass –, les hebdomadaires luxembourgeois Le Jeudi et Tageblatt, le quotidien espagnol El Pais, son homologue italien La Stampa, la chaîne LCI et Fundsquare, plate-forme pour investir dans les fonds, remettent, le jeudi 7 mars, les trophées des fonds européens, récompensant les meilleures sociétés de gestion et les meilleurs fonds européens. Un cru 2019 qui met en lumière ceux qui ont fait preuve de résistance dans ce contexte agité. De mémoire de gérant, cela faisait longtemps que l’on n’avait pas connu une année aussi compliquée.

Les lauréats

  • Meilleurs fonds européens

Actions européennes larges capitalisations
Ric-Acadian European Equity
Société : Russel Investments

Marchés emergents
Sydinvest BRIK Akk
Société : Sydinvest

Actions internationales larges capitalisations
Seilern Stryx World Growth
Société : Seilern Investment Management

Obligations européennes à long terme
ALM Oblig Euro ISR
Société : AG2R LA MONDIALE Gestion d’actifs

Fonds diversifiés opportunistes
Varenne Sélection
Société : Varenne Capital Partners

  • Meilleures sociétés de gestion européennes

De 4 à 7 fonds : Yuki Management & Research Co
8 à 15 fonds : Bestinver
16 à 25 fonds : Aktia
26 à 40 fonds : Baillie Gifford
41 à 70 fonds : Renta 4 Gestora
71 à 100 fonds : Lazard Frères Gestion
101 à 200 fonds : Aviva
Plus de 200 fonds : Aegon Asset Management

  • Meilleures sociétés de gestion françaises

De 4 à 7 fonds : Egamo
8 à 15 fonds : SMA Gestion
16 à 25 fonds : Sycomore Asset Management
26 à 40 fonds : Ecofi Investissements
41 à 70 fonds : OFI Asset Management
71 à 100 fonds : Lazard Frères Gestion
101 à 200 fonds : Lyxor AM

  • Trophées Fundclass sur sept ans

De 4 à 7 fonds : H20 Asset Management
8 à 15 fonds : Hermes Investment Management
16 à 25 fonds : Comgest
26 à 40 fonds : T. Rowe Price
41 à 70 fonds : Vanguard Asset Management
71 à 100 fonds : Lazard Frères Gestion
101 à 200 fonds : Aviva
Plus de 200 fonds : Axa Investment Managers
 

En 2018, la plupart des marchés d’obligations ou d’actions ont terminé dans le rouge. « C’est la première fois, depuis une dizaine d’années, que la quasi-totalité des classes d’actifs ont été orientées à la baisse », observe Philippe Desurmont, directeur général de SMA Gestion, élue meilleure société de gestion française (catégorie « 8 à 15 fonds »).

Dans ces conditions, pour les gérants, afficher une performance positive pour leurs sociétés d’investissement à capital variable (sicav) ou leurs fonds communs de placement (FCP) a souvent été une gageure. Parmi les sociétés de gestion françaises, plusieurs styles se distinguent.

En ce qui concerne les actions, les processus d’investissement qui privilégient les entreprises fortement décotées en Bourse ont apparemment permis à certains gérants, comme Varenne Capital Partners (meilleur fonds européen dans la catégorie « diversifiés opportunistes »), de mieux résister à la baisse des marchés. « Nous recherchons des décotes assez importantes. Nous travaillons sans nous préoccuper du pays ou du secteur de l’entreprise ou de considérations macroéconomiques, mais nous nous attachons à analyser la qualité de chaque entreprise », indique pour sa part Philippe Desurmont. Une discipline qui a conduit les gérants à « ne pas acheter grand-chose » pendant des périodes plus ou moins longues, et à garder en portefeuille des sociétés pendant au moins cinq ans. « Ça ne sert à rien de vouloir battre le marché à court terme, c’est peine perdue », juge Philippe Desurmont.

Rester attentif à la mesure du risque

Du côté obligataire, ceux qui ont été attentifs à la mesure du risque qu’ils prenaient dans leurs investissements ont relativement bien affronté les vents contraires. « Notre appartenance au monde de l’assurance qui, pour des raisons réglementaires, doit faire preuve d’une vigilance particulière dans ce domaine, nous conduit à être tempérés dans nos choix d’investissements », explique Damien Colombel, directeur commercial d’Egamo, le véhicule d’investissement du groupe VYV, premier acteur de l’assurance-santé.

Dans un contexte baissier, bien peu de gérants sont parvenus à battre les indices boursiers auxquels ils se comparent pour jauger de leur performance. De façon un peu surprenante, c’est finalement une société de gestion qui fait la part belle aux fonds indiciels. Ceux qui répliquent fidèlement l’évolution de ces fameux indices se voient distingués. Lyxor est ainsi la meilleure société de gestion française, et pointe à la sixième place au niveau européen. Une récompense qui montre, par défaut, que bien peu de gérants actifs parviennent à faire mieux que le marché, même lorsque ces derniers baissent.

Autre enseignement de ce palmarès, l’investissement socialement responsable (ISR) semble montrer une certaine capacité de résistance. Il serait audacieux d’affirmer que cette gestion, qui consiste à intégrer de façon systématique et traçable des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance à la gestion financière fait mieux que les autres. Cependant, force est de constater que la plupart des lauréats français appliquent peu ou prou cette méthode dans la conduite de leurs produits. Il s’agit d’Egamo, de Sycomore Asset Management, d’Ecofi Investissements et d’OFI Asset Management.

Ainsi, depuis sa création, Sycomore Asset Management applique des critères extra-financiers qui mesurent les bonnes pratiques concernant les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) de l’entreprise pour sélectionner les titres qu’elle met dans le portefeuille de ces fonds. « Le non-respect de ces critères est souvent un indicateur avancé de contre-performance », souligne Christine Kolb, associée fondatrice et directrice du développement de Sycomore Asset Management. « Le fait d’intégrer des critères extra-financiers permet de mettre en évidence des failles dans la gestion de certaines entreprises », renchérit Jean-Pierre Grimaud, directeur général d’OFI Asset Management. La relative réussite des fonds ISR devra être confirmée dans un an.

ALM Obligations Euro ISR : élu meilleur fonds obligataire en 2019

Comme les marchés d’actions, les marchés obligataires n’ont pas été à la fête. « Dans la zone euro, alors qu’une hausse des taux était anticipée, c’est finalement une baisse quasi généralisée qui s’est produite », observe Laurent Gadreau, responsable de la gestion de taux d’AG2R La Mondiale et gérant d’ALM Obligations Euro ISR, qui obtient le prix du meilleur fonds européen dans la catégorie « obligations long terme ». « La principale qualité de la gestion, cette année, a certainement été sa prudence après le premier trimestre », indique-t-il. La résistance du fonds peut aussi s’expliquer par le biais ISR (investissement socialement responsable) qu’il a pris dès 2006. « Je ne vois pas ça comme une contrainte, cela me permet d’être plus sévère dans la sélection des titres », observe M. Gadreau. De fait, les titres d’Etat émis par certains ex-pays de l’Est, comme la Slovaquie et la Slovénie, n’entrent pas dans le portefeuille du fonds. En sont aussi exclues les obligations émises par des entreprises du secteur du tabac, de l’armement et, par exemple, les compagnies d’électricité dont plus de 30 % de la production est issue du charbon.