A l’entrée du Conseil constitutionnel, à Paris, en octobre 2018. / BERTRAND GUAY / AFP

C’est la deuxième fois de l’histoire de la Ve République qu’un président décide de soumettre aux « sages » un texte avant sa promulgation. Emmanuel Macron a décidé de faire appel au Conseil constitutionnel concernant la proposition de loi anticasseurs, qui devrait être adoptée définitivement mardi au Sénat. Le chef de l’Etat a « informé le gouvernement de son souhait de saisir le Conseil constitutionnel. Il est ainsi pleinement dans son rôle de garant des libertés publiques dans notre pays », a déclaré lundi le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, à l’issue du conseil des ministres.

Le passage du texte « visant à renforcer et garantir le maintien de l’ordre public
lors des manifestations »
en première lecture à l’Assemblée nationale avait été marqué par une rébellion inhabituelle d’élus de la majorité présidentielle, particulièrement remontés, comme la gauche, notamment sur les interdictions administratives de manifester et les fouilles dans les manifestations. Cinquante députés de La République en marche (LRM) s’étaient abstenus lors du vote début février, un chiffre jamais atteint depuis 2017 pour un texte soutenu par le gouvernement.

Les articles 2, 3 et 6 visés

L’article 2 adopté à l’Assemblée va plus loin que le texte de départ, rédigé quelques mois plus tôt par des sénateurs de droite, en permettant au préfet d’interdire à des personnes de prendre part à toute manifestation sur le territoire national durant un mois. Le texte permet aussi, sur réquisition du procureur, des fouilles des sacs et véhicules dans les manifestations et à leurs abords, afin de rechercher des « armes par destination » (marteaux, boules de pétanque, etc.).

Si le Sénat, dominé par l’opposition de droite, adopte le texte mardi dans les mêmes termes qu’à l’Assemblée, il sera définitivement adopté et priverait donc de fait le gouvernement et sa majorité d’éventuels aménagements qu’ils auraient souhaité apporter dans la version finale. « Le président de la République a donc informé le gouvernement de son intention de saisir le Conseil constitutionnel, en particulier sur trois articles de ce texte : l’article 2 sur la possibilité de procéder à des fouilles, l’article 3 sur les restrictions de manifester et l’article 6 sur la création d’un nouveau délit de dissimulation du visage », a rapporté M. Griveaux.

Les députés de gauche et du groupe « Libertés et territoires » ont également préparé un recours devant le Conseil constitutionnel, ont indiqué vendredi à l’AFP des sources parlementaires. François Hollande avait été le premier, et le dernier en date, président de la République à demander la saisie du Conseil constitutionnel avant la promulgation d’une loi en vertu du deuxième alinéa de l’article 61 de la constitution. Le projet de loi sur le renseignement avait été, après examen, globalement validé par le Conseil.

Loi « anticasseurs » : adoptée... mais contestée
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