Syrie. Camp de transit d’Al-Hol, saturé par des civils ayant fui Baghouz, la dernière poche encore tenue par Daech. Les civils attendent d’être dispatchés dans des tentes ou dans d’autres camps. / LAURENCE GEAI POUR « LE MONDE »

Face à une « situation qui se détériore de jour en jour » pour les enfants français de djihadistes retenus en Syrie, deux avocats, maîtres Marie Dosé et Henri Leclerc, ont déposé plainte contre l’Etat français auprès du Comité contre la torture de l’Organisation des nations unies (ONU), annoncent-ils à France Inter, lundi 18 mars.

Par cette action, ils réclament le retour de ces mineurs en France et demandent à l’ONU « des mesures provisoires de protection afin d’éviter un préjudice irréparable ». Dès janvier 2018, quatre avocats – Mes Marc Bailly, William Bourdon, Marie Dosé et Martin Pradel – avaient déjà déposé plainte pour « détention arbitraire » auprès du procureur de la République de Paris. Face à cette impasse, le 28 février, ces mêmes avocats ont saisi le Comité des droits de l’enfant de l’ONU.

Par cette nouvelle plainte, Mes Dosé et Leclerc souhaitent « réveiller les autorités françaises, leur dire qu’il y a urgence, que c’est pressé ». Les deux avocats s’inquiètent notamment de la situation de dizaines de femmes et d’enfants français qui sont retenus dans les camps syriens d’Al-Hol et de Roj, précise France Inter. « Les enfants ne sont pas lavés depuis des semaines, puisqu’il n’y a pas assez d’eau pour tous les détenus », font savoir les avocats dans leur plainte.

« Les enfants ne bénéficient d’aucun soin, alors qu’ils se trouvent dans un état psychologique et psychiatrique particulièrement inquiétant. L’accès à l’infirmerie nécessite plus de six heures d’attente, et aucun médicament n’est administré, même du paracétamol. »

Retour de cinq enfants de djihadistes

Sur le sujet, le président de la République, Emmanuel Macron, avait annoncé en début de semaine dernière que ces retours seraient décidés au « cas par cas ». « Pour ce qui est des enfants, c’est une approche au cas par cas qui est menée, en particulier en lien avec la Croix-Rouge internationale, c’est une approche humanitaire qui est suivie et avec beaucoup de vigilance en lien avec tous les acteurs qui sont sur le terrain », avait-il précisé lors d’un déplacement au Kenya.

Quelques jours après, le 15 mars, la France a annoncé avoir rapatrié de Syrie cinq enfants orphelins de djihadistes. Parmi eux, selon nos informations, se trouve au moins une petite fille qui était dans le camp de Roj, dont le père est présumé mort depuis 2013. Trois autres de ces enfants rapatriés sont issus d’une seule et même fratrie. Agés de 1, 3 et 5 ans, il s’agit des garçons de Julie Maninchedda, une jeune femme originaire de Libercourt (Pas-de-Calais), brillante lycéenne, violoniste à ses heures, qui avait rejoint les rangs de l’organisation Etat islamique (EI) avec son époux, en 2014 – aujourd’hui incarcéré et détenu par les Kurdes.

Le dernier des enfants à avoir été rapatrié vendredi est une autre fillette âgée de 5 ans qui était retenue au camp d’Al-Hol. Elle « était jusque-là prise en charge par une femme (…) qui a recueilli cette orpheline comme sa fille, elle lui a sauvé la vie », a expliqué à l’Agence France-Presse Me Marie Dosé, l’avocate de sa famille restée en France. Mais pour cette dernière ce n’est pas suffisant et même « discriminatoire ». « Seuls les enfants orphelins ont le droit de rentrer ? », se demande-t-elle.