Des ouvriers construisent le bâtiment qui relie les terminaux Ouest et Sud de l’aéroport d’Orly, en avril 2018. / Gonzalo Fuentes / REUTERS

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C’est toute une époque qui s’achève. Le Orly des années 1960, avec ses deux aérogares Ouest et Sud, depuis la terrasse desquelles on venait voir, en famille, décoller et atterrir les avions, a vécu. Depuis lundi 18 mars, l’aéroport du Sud parisien se décline, sur le modèle de Roissy-Charles-de-Gaulle, en quatre zones de départ et d’arrivée, baptisées Orly 1, 2, 3 et 4.

Ce changement de dénomination n’est que la première étape d’un « mouvement stratégique », indique Edward Arkwright, directeur général exécutif du Groupe ADP, gestionnaire des deux aéroports parisiens. La seconde étape prendra effet le 16 avril, avec l’ouverture du bâtiment de jonction, une infrastructure de 80 000 mètres carrés créée de toutes pièces pour fusionner les ex-Orly Ouest et Orly Sud.

En 2018, il a vu transiter 33,1 millions de passagers, alors que sa capacité maximale a été fixée à 29 millions

Ce nouvel espace n’a rien de superflu. Construit, à l’origine, au milieu des champs, Orly se trouve désormais enclavé par plus d’un demi-siècle d’urbanisation. Aujourd’hui, l’aéroport est proche de la thrombose. En 2018, il a vu transiter 33,1 millions de passagers, alors que sa capacité maximale a été fixée à 29 millions.

Avec la mise en service du bâtiment de jonction, Orly et ses quatre nouvelles zones pourront accueillir 8 millions de passagers supplémentaires. Pour accroître la capacité de l’aéroport, ADP a investi près de 400 millions d’euros. Toutefois, le passage au terminal unique ne marque pas la fin de la transformation de l’aéroport. « Le renouveau d’Orly s’échelonne entre 2014 et 2024 » avec une facture totale de près d’un milliard d’euros, explique M. Arkwright. Outre l’infrastructure de 80 000 mètres carrés, ADP a déjà doté Orly d’une nouvelle « jetée internationale », une zone réservée aux vols hors de France et de l’espace Schenghen. Le gestionnaire d’aéroports a aussi financé « la rénovation du circuit international », notamment pour mettre aux normes les contrôles de sûreté et le passage des postes-frontières aux normes.

Davantage de commerces

L’augmentation de la capacité d’Orly fait écho à la transformation du trafic de l’aéroport. En seize ans, l’activité de l’aéroport préféré des Parisiens, notamment pour sa proximité, a considérablement changé. Les destinations domestiques, largement majoritaires en 2002 (59 % des vols), ont été supplantées par la montée en puissance des vols internationaux et les liaisons intra-européennes. En 2018, l’activité d’Orly se répartissait presque à parts égales entre les vols internes (31,4 %), les destinations dans l’espace Schenghen (34 %) et les liaisons internationales (34 %). Un rééquilibrage lié directement à la montée en puissance des compagnies à bas coût, telles easyJet ou Transavia, basées à Orly.

Limité dans son expansion géographique, Orly est aussi contraint dans le développement de son trafic, notamment à cause de son environnement urbain. L’aéroport doit ainsi respecter un couvre-feu, période pendant laquelle les vols sont interdits, entre 23 h 30 et 6 heures du matin. Surtout, le nombre des mouvements (décollages et atterrissages) de l’aéroport a été plafonné à 250 000 par an. Avec 219 000 mouvements en 2018, Orly n’est pas très loin de la saturation. Pour passer outre cette limitation, ADP a investi, depuis 2004, pour permettre au site d’accueillir des « avions plus grands et mieux remplis », précise le directeur général exécutif. En dix ans, le nombre de passagers par avion n’a cessé de progresser, passant de « 114, en moyenne, en 2008 à 145 aujourd’hui », ajoute-t-il.

Le nouvel Orly est aussi l’occasion pour ADP d’étendre la surface dévolue aux boutiques et à la restauration. Avec l’ouverture du bâtiment de jonction, ce sont « 6 000 mètres carrés supplémentaires de commerces et de restaurants » qui vont être proposés aux voyageurs, annonce M. Arkwright. Cette nouvelle offre commerciale « ne donnera pas lieu à une montée en gamme, car ce n’est pas le public de Roissy », signale le directeur général exécutif.

A Orly, ADP vise « une offre plus parisienne », mêlant magasins multimarques et gastronomie

A Charles-de-Gaulle, le gestionnaire d’aéroport a créé une sorte « d’avenue Montaigne », où se côtoient toutes les grandes marques du luxe. A Orly, ADP vise plutôt « une offre plus parisienne », mêlant magasins multimarques et gastronomie, et qui pourrait s’apparenter à ce que l’on peut trouver « sur les grands boulevards parisiens », précise encore M. Arkwright. Si, selon ADP, le panier moyen est de 18 euros, un passager de Roissy rapporte plus du double que celui d’Orly. Ce sont surtout les voyageurs venus de Chine qui font le bonheur d’ADP à Roissy, avec une dépense moyenne de plus de 100 euros. A Orly, le passager chinois est rare, avec une seule liaison avec l’empire du Milieu. L’augmentation des revenus liée à la hausse du trafic passager et des boutiques ne peut que faire progresser la valorisation d’un groupe en voie de privatisation.