« Eden », la série franco-allemande réalisée par Dominik Moll, sera présentée au festival Séries Mania en compétition officielle. / PIERRE MEURSAUT

Durant neuf jours, Séries Mania permettra aussi bien de faire connaissance avec les comédiens de Dix pour cent (France 2), de Scènes de ménages (M6) ou de Demain nous appartient (TF1) que de suivre une master class du créateur de la série dystopique Black Mirror, Charlie Brooker, ou encore d’assister à un échange entre deux maîtres de l’espionnage, le Français Eric Rochant (Le Bureau des légendes) et le Britannique Hugo Blick (The Honourable Woman).

Mais le festival est aussi et surtout l’occasion de prendre le pouls de la création mondiale. Sur quelque 450 séries visionnées, dont certaines venues de Russie, de Corée ou du Japon, Laurence Herszberg, directrice générale du festival, et Frédéric Lavigne, son directeur artistique, en ont retenu soixante et onze, présentées dans différentes catégories, dont dix en compétition officielle.

Géopolitique, migrants et dystopies

Première grande tendance générale, remarquent-ils : la multiplication des séries politiques, lesquelles reviennent globalement sur les années 1980-1990 ou le début des années 2000. Il en va ainsi de deux séries britanniques, présentées en première mondiale dans la compétition officielle : Chimerica, créée par Lucy Kirkwood, qui interroge les rapports géopolitiques entre les géants chinois et américain depuis les événements de la place Tiananmen en 1989 ; et Baghdad Central, de Stephen Butchard, située en 2003, après la chute de Saddam Hussein, qui voit un policier irakien contraint de collaborer avec la coalition internationale. Même tonalité politique dans le cas d’une série russe, Blackout, de Sergei Ursuliak, dans laquelle des vétérans, laissés-pour-compte à leur retour de la guerre en Afghanistan, en 1990, s’entraident et s’organisent en mafia dans un pays à bout de souffle.

Autre thématique récurrente, connexe à l’explosion de séries politiques : les migrants. Cela vaut, par exemple, pour la série franco-allemande Eden, réalisée par Dominik Moll et en compétition officielle, dans laquelle l’arrivée d’un canot de migrants sur une plage grecque va bouleverser des destins croisés dans toute l’Europe ; une série qui évoque également la politique de gestion des camps de réfugiés. Pour sa part, le thriller social israélien Asylum City, réalisé par Eitan Tzur, se focalise sur une juriste, indépendante et activiste, en lutte pour défendre les demandeurs d’asile africains parqués dans un quartier du sud de Tel-Aviv.

Autre tendance encore, elle aussi apparentée à la politique : les séries dystopiques, qui interrogent l’impact des technologies sur nos vies dans le sillage de la britannique Black Mirror. Ce questionnement peut concerner les conséquences du changement climatique (en recourant souvent au fantastique, comme dans La Dernière Vague) ou notre soumission aux algorithmes… même lorsqu’il s’agit de trouver l’amour, comme c’est le cas dans Osmosis, la nouvelle série française de Netflix (à partir du 29 mars) créée par Audrey Fouché, dans laquelle une application promet à chacun de trouver son âme sœur.

Le domaine de l’intime, enfin, met majoritairement en scène des personnages tourmentés ou rongés par l’incertitude. Dans des tonalités très diverses, ces séries font écho aux problématiques liées à la recomposition des familles, à la renaissance d’un grand amour ou aux enfants abusés. Elle s’insère également dans des réalités sociales tragiques, à l’image de The Red Line, la série d’ouverture, créée par Caitlin Parrish et Erica Weiss, avec notamment Noah Wyle (Urgences), dont le point de départ est l’homicide d’un jeune médecin noir par un policier blanc à la suite d’un braquage.

Cet article fait partie d’un dossier réalisé dans le cadre d’un partenariat avec le festival Séries mania, du 22 au 30 mars à Lille. Seriesmania.com