Séries mania, Lille, saison 2. Un an après sa grande transplantation, depuis le cœur de Paris jusqu’à la capitale des Hauts-de-France, le festival français consacré aux séries télévisées, né en 2010 au Forum des images, poursuit son ancrage nordiste. Du 22 au 30 mars, cette neuvième édition entend prolonger la montée en puissance d’un événement non plus réservé avant tout aux sériephiles, mais ouvert au grand public et aux professionnels avec des rencontres, des master class, des animations et une programmation à la fois exigeante et populaire.

La liste des acteurs, scénaristes et showrunners présents durant ces neuf jours de compétition et de festival donne la mesure de ce positionnement : on y croisera – entre autres – la romancière Delphine de Vigan, membre du jury de la compétition officielle, la scénariste et productrice Marti Noxon (Buffy contre les vampires, Glee…), la présidente de ce jury, l’actrice Ingrid Chauvin (Demain nous appartient, TF1), le réalisateur et directeur artistique Eric Rochant (Le Bureau des légendes, Canal+), les acteurs de Clem (TF1), de Scènes de ménages (M6) ou de Skam (France Télévisions), sans oublier l’actrice Uma Thurman, le romancier Michael Connelly ou ­encore Charlie Brooker et Annabel Jones, créateurs de Black Mirror.

Marché protéiforme

Côté séries, véritable nerf de la guerre d’une manifestation qui a attiré 55 000 spectateurs en 2018, le festival poursuit sa mission, qui ­consiste à montrer ce qui se crée de plus audacieux ou d’original de par le monde aujourd’hui. Venues de Norgève (Twin), du Royaume-Uni (Baghdad Central, The Virtues, Chimerica), de Russie (Identification), d’Israël (Just for Today), d’Australie (Lambs of God) ou de France (Mytho, la nouvelle série du réalisateur des Revenants, Fabrice Gobert), les productions sélectionnées dans la compétition officielle témoignent aussi bien des maux du monde que d’une grande diversité de genres – le fantastique étant à l’honneur cette année, notamment du côté français. « Il faut trouver un juste équilibre entre l’esprit de découverte qui justifie l’existence du festival, notre rôle de passeur auprès du public et des médias, et un aspect festif avec des séries connues ou de nouvelles saisons d’œuvres populaires », explique Frédéric Lavigne, directeur artistique de Séries mania depuis 2010.

Au-delà de sa programmation, Séries mania se fixe une mission d’envergure : positionner la France et l’Europe sur la carte des séries, toujours dominée par les Anglo-Saxons

En ce sens, le festival se veut le miroir d’un marché sériel protéiforme qui irrigue aussi bien les chaînes généralistes que les plates-formes de streaming vidéo (Netflix, Amazon Prime ­Video…) ou les chaînes à péage. En 2018, deux ­séries récompensées à Séries mania, Ad Vitam, prix de la meilleure série française, et Il Miracolo, ont été programmées sur Arte. En revanche, On the Spectrum, grand prix du jury, attend toujours un diffuseur en France. « C’est notre mission que de présenter des séries de niche, comme les films d’art et d’essai dans un festival de cinéma, plaide Frédéric Lavigne, même si certains spectateurs peuvent se sentir frustrés de n’en découvrir que deux épisodes au festival et de ne pas les voir diffusées ensuite en France. »

Au-delà de sa programmation, Séries mania se fixe une mission d’envergure : positionner la France et l’Europe sur la carte des séries, toujours dominée par les Anglo-Saxons. D’autant que les grands festivals de cinéma, comme Berlin, Venise ou Toronto, captent de plus en plus de séries pour leurs écrans ; que l’Europe et les Etats-Unis bataillent toujours sur la question des quotas d’œuvres européennes diffusées sur les plates-formes ; et qu’un Netflix européen peine à voir le jour. Autant de problématiques qui seront au cœur de la rencontre organisée entre des décideurs européens (Delphine Ernotte-Cunci, PDG de France Télévisions, Nicolas de Tavernost, PDG de M6, Franck Riester, ministre de la culture) et américains (notamment Ted Sarandos, directeur des contenus de Netflix), mercredi 27 mars, dans le cadre du Lille Transatlantic Forum.

« Nous voulons rapidement imposer notre rendez-vous auprès du public et des professionnels comme la plate-forme de lancement des séries européennes, revendique Laurence Herszberg, directrice générale d’un festival qu’elle a créé lorsqu’elle dirigeait le Forum des images. L’Europe doit s’affirmer dans ce domaine ; sinon, ce rendez-vous aura lieu ailleurs. C’est pour cela que je souhaite développer Séries mania à l’étranger. » Cette déclinaison du festival existe déjà en ­Australie, avec Séries mania Melbourne, et pourrait se décliner à terme en Asie ou dans le Golfe. D’ici là, c’est à Lille et dans sa région que les amateurs de cliffhanger (effet de suspense) à épisodes ont rendez-vous pendant neuf jours de célébration d’un genre devenu majeur.

Cet article fait partie d’un dossier réalisé dans le cadre d’un partenariat avec le festival Séries mania, du 22 au 30 mars à Lille. Seriesmania.com