Le Capitole à Washington (D.C.), le 22 mars. / CARLOS BARRIA / REUTERS

Durant des mois, le procureur spécial Robert Mueller a mené son enquête sur une possible collusion entre Moscou et l’équipe de campagne de Donald Trump sans dire un mot. Mais les milliers de pages qu’il a livrés à la procédure parlent pour lui.

En attendant la publication du rapport qu’il a remis, vendredi 22 mars, au ministère de la justice, voici ce que l’on sait grâce à ces documents, dont des parties entières restent cependant confidentielles.

  • Le complot russe

Dans deux actes d’inculpation distincts, M. Mueller a décrit un « complot » orchestré par le gouvernement de Vladimir Poutine pour « discréditer » la candidate démocrate Hillary Clinton et « soutenir » le républicain Donald Trump pendant la présidentielle de 2016.

Le premier, daté du 16 février 2018, concerne treize Russes inculpés pour avoir animé une campagne de désinformation sur les réseaux sociaux depuis l’Agence de recherche sur l’Internet (Internet research Agency) basée à Saint-Pétersbourg et contrôlée par Evgueni Prighozine, un proche de l’homme fort du Kremlin.

Cette agence « avait pour but stratégique de semer la discorde dans le système politique américain », écrit Robert Mueller, en expliquant comment elle avait créé de faux comptes sur Facebook, Twitter, YouTube ou Instagram pour intervenir dans le débat outre-Atlantique.

En juillet 2018, c’est au tour de douze agents du renseignement de l’armée russe (GRU) d’être inculpés pour le vol de milliers d’emails de responsables démocrates. La publication de ses emails par le site WikiLeaks à l’été 2016 avait brouillé le message d’Hillary Clinton.

  • Les contacts russes de l’équipe Trump

Le procureur a dressé, au travers de la procédure, le tableau de contacts répétés entre une dizaine de proches du milliardaire républicain et des Russes.

L’ancien avocat de Donald Trump, Michael Cohen, a reconnu lors de ses interrogatoires avoir mené de 2015 à juin 2016 des discussions sur un projet de Trump Tower à Moscou.

Conseiller diplomatique du candidat, George Papadopoulos a, lui, admis avoir échangé avec des Russes en vue d’organiser une rencontre – qui n’a jamais eu lieu – entre MM. Poutine et Trump. Il s’était également vu offrir des informations compromettantes sur Hillary Clinton.

Une avocate russe avait suscité l’intérêt de la famille Trump avec la même promesse. Le fils aîné du candidat, Donald Trump Jr, son gendre Jared Kushner et son directeur de campagne Paul Manafort l’ont rencontrée en juin 2016 à la Trump Tower pour en discuter.

En parallèle, Paul Manafort continuait à échanger avec un de ses anciens associés, un Russe soupçonné par les Etats-Unis d’être lié aux services de renseignement de son pays. Il lui a notamment transmis un sondage d’opinion.

Entre l’élection et l’investiture de Donald Trump, son conseiller à la sécurité nationale Michael Flynn a eu des échanges confidentiels avec l’ambassadeur russe à Washington.

  • Les mensonges à répétition

Michael Cohen, George Papadopoulos et Michael Flynn ont tous reconnu avoir menti sur leurs contacts avec des Russes. L’ont-ils fait à la demande de M. Trump ? Celui-ci a-t-il tenté de faire obstruction à la justice ? Robert Mueller n’a pour l’instant rien écrit qui permette de répondre à ces questions.

Mais le locataire de la Maison Blanche a de lui-même alimenté les soupçons d’obstruction en mai 2017, en limogeant le chef du FBI James Comey alors chargé de l’enquête sur les ingérences russes.

  • Les révélations « hors sujet »

Le procureur Mueller a le droit de poursuivre toutes les malversations débusquées dans le cadre de son enquête, même déconnectées de son « sujet » initial.

Dans ce cadre, il a établi que Michael Cohen avait, pendant la campagne, acheté le silence de deux femmes qui prétendent avoir eu une liaison avec Donald Trump.

Il a aussi mis au jour de nombreuses fraudes commises par cet ancien bras droit de M. Trump, mais également par Paul Manafort et son ancien associé Rick Gates qui ont notamment dissimulé des millions de dollars au fisc.