Lors de la manifestation contre le Brexit, samedi 23 mars, dans les rues de Londres. / Tim Ireland / AP

C’est à ce type de publications qu’on mesure à quel point le « no deal » est désormais tangible. « De plus en plus probable », a même estimé la Commission européenne, lundi 25 mars, à dix-neuf jours du nouveau D-Day : le 12 avril prochain. L’institution européenne a tenu, dans ce contexte anxiogène, et alors que l’impasse politique se prolonge à Londres, à insister sur l’état de préparation des Vingt-Sept. A l’en croire, il serait excellent : « Les pays membres sont prêts », assure un officiel européen.

Le 13 avril au matin, si les députés britanniques n’ont toujours pas validé l’accord de retrait déjà rejeté à deux reprises par Westminster, ou si le gouvernement n’a pas sollicité de nouveau report du divorce, plus aucune loi de l’UE ne s’appliquera au Royaume-Uni, qui deviendra brutalement un « pays tiers ». Il n’aura en outre droit à aucune période de transition, censée encadrer un quasi-maintien du Royaume-Uni dans l’UE, puisque cette phase est conditionnée à l’adoption du traité du divorce.

La Commission a déjà proposé 19 législations afin d’éviter des blocages chaotiques (dans l’aérien, le transport routier, la pêche, etc.). Dix-sept d’entre elles ont d’ores et déjà été définitivement adoptées par le Parlement de Strasbourg et le Conseil (les Etats membres). Ces textes, complexes, assurent une forme de continuité (accès aux zones de pêche maintenues, licences de transport toujours valides pour certains trajets, etc.), mais ne répondent pas aux questions du quotidien, pour les presque 5 millions de citoyens, britanniques et européens, à court terme directement affectés par le Brexit, surtout s’il est « dur ».

C’est la raison pour laquelle, une fois n’est pas coutume, la commission a fait œuvre de pédagogie, lundi, en publiant, dans toutes les langues de l’Union, une série de notes, très pratiques, à l’intention de tous ceux que la perspective d’un no deal commence à paniquer. Ainsi qu’un numéro vert, le 00 800 6 7 8 9 10 11, pour des questions plus spécifiques de la part des particuliers.

  • Citoyens européens vivant au Royaume-Uni

Ceux qui ont l’intention de prolonger leur séjour au-delà du 31 décembre 2020 doivent faire une demande de « settled status », statut de résident permanent, auprès de l’administration britannique. Pour ceux qui arriveront après le Brexit, ils devront demander une autorisation d’entrée ou de séjour au Royaume-Uni.

Par ailleurs, à partir de la date du divorce, les droits liés au travail et à la sécurité sociale des ressortissants européens au Royaume-Uni seront régis par la législation britannique. Il ne sera plus possible d’importer les droits de son pays membre, contrairement à ce que prévoient en partie les règles européennes d’harmonisation des sécurités sociales.

  • Ressortissants britanniques vivant dans un Etat membre de l’UE

Ils devront réclamer des titres de séjour. S’ils séjournent depuis plus de cinq ans de manière ininterrompue dans un Etat membre, ils pourront demander le statut de résident de longue durée. Cela vaut pour les conjoints britanniques de ressortissants européens vivant dans leur Etat membre d’origine.

  • Contrôles aux frontières

Pour les ressortissants britanniques voyageant dans l’UE, ils devront se munir d’un passeport et pourront faire l’objet de contrôles approfondis à la douane : durée et but du séjour, moyens de subsistance sur place. Les bagages et marchandises feront aussi l’objet de contrôles poussés : des restrictions s’appliqueront aux produits d’origine animale (viande, lait, etc), aux produits végétaux, aux sommes en liquide (pas plus de 10 000 euros). Le Royaume-Uni a pour le moment fait savoir que les ressortissants de l’UE pourront se rendre dans le pays sans visa pour des séjours jusqu’à trois mois. La carte d’identité nationale n’y sera valable que jusqu’au 31 décembre 2021.

  • Animaux de compagnie

Les voyageurs accompagnés d’animaux de compagnie venant du Royaume-Uni devront faire la preuve qu’ils ont fait l’objet d’une vaccination antirabique et qu’ils disposent d’une identification par puce électronique. Le Royaume-Uni n’a pas encore précisé ses conditions, mais, à tout le moins, il est probable que les Européens devront disposer du certificat sanitaire de leur animal, pour toucher le sol britannique en sa compagnie.

  • Itinérance téléphonique

Attention, la suppression des frais d’itinérance télécom dans l’UE ne vaudra plus pour le Royaume-Uni. Ainsi, les opérateurs pourront facturer des frais supplémentaires aux Britanniques utilisant des services d’itinérance (appels vocaux, SMS, données) dans l’UE (appelant d’un pays de l’UE vers le Royaume-Uni) ou aux citoyens de l’UE utilisant ce type de services au Royaume-Uni.

  • Permis de conduire

Le Royaume-Uni a d’ores et déjà prévenu que les ressortissants européens pourront continuer de conduire au Royaume-Uni avec un permis européen. En revanche, la reconnaissance des permis délivrés dans des pays tiers étant définie au niveau national, les Britanniques, considérés comme des ressortissants d’un pays tiers, devront vérifier auprès de chacun des pays de l’UE où ils comptent conduire.

  • Droits des passagers

La carte européenne d’assurance maladie ne sera plus valable pour les Européens, au Royaume-Uni, pour y avoir accès à des soins de santé remboursés. Idem pour les Britanniques ayant besoin de soins dans l’UE. Si les frais médicaux d’urgence ne sont pas couverts dans les pays tiers par leur caisse d’assurance, ils devront envisager une assurance voyage privée.

Pour ce qui est des titres de transport (vol au départ ou à destination du Royaume-Uni). Ils seront toujours valides au-delà de la date du no deal, mais la Commission conseille aux voyageurs de vérifier les conditions d’annulation de leurs billets. Ils ne bénéficieront des lois très protectrices de l’UE en matière de remboursement, qu’à condition que leur vol parte d’un pays de l’UE vers le Royaume-Uni.

  • Droits des consommateurs

Les Européens procédant à un achat en ligne sur le site d’un e-commerçant britannique devront s’acquitter de droits d’importation et de la TVA. En cas de litige, le citoyen européen pourra poursuivre un commerçant britannique devant une législation européenne dès lors que ce commerçant a vendu le bien dans son Etat de résidence.