Devant la Bourse de New York, en février 2018. / Brendan McDermid / REUTERS

La Silicon Valley devrait encore envoyer une de ses entreprises à Wall Street. Pinterest, le site de découverte d’images, a déposé, vendredi 22 mars, son dossier d’introduction en Bourse. La société fondée en 2011 pourrait être cotée dès la mi-avril sur le New York Stock Exchange. Selon Bloomberg, elle pourrait lever 1,5 milliard de dollars (1,3 milliard d’euros).

Pinterest permet à ses utilisateurs, une fois qu’ils ont renseigné leurs centres d’intérêts (mode, cuisine, décoration, d’intérieur, voyages…), de parcourir des images sur ces sujets et de publier les leurs. Ils peuvent, ensuite, les collectionner en les « épinglant » sur leur profil – d’où le nom du site, de l’anglais pin your interest, soit « épingler vos passions ».

Le concept a déjà séduit plus de 250 millions d’utilisateurs mensuels dans le monde, à en croire le document déposé par Pinterest au gendarme des marchés financiers. L’entreprise californienne affiche, en 2018, un chiffre d’affaires de 756 millions de dollars, en hausse de 60 % sur un an. De quoi réduire ses pertes, qui s’élèvent à 63 millions de dollars en 2018, moitié moins qu’en 2017.

Utilisée par huit mères de famille américaines sur dix

Certes, sa base de fidèles pèse peu face aux 2,2 milliards d’utilisateurs de Facebook ou au milliard d’actifs sur Instagram. Mais, comme aime à le rappeler, à chaque interview, son cofondateur Ben Silbermann, un ancien de Google, Pinterest « n’est pas un réseau social, mais un catalogue d’idées ». Un message subtilement adressé aux annonceurs publicitaires, sur lesquels repose son modèle économique.

Le mot n’est pas choisi au hasard. Le site a développé un environnement idéal pour les marques, en leur permettant de distiller des images de leurs produits dans le flux proposé aux internautes. Comme elles le feraient dans leur catalogue. Plus que son nombre d’utilisateurs, l’intérêt de cette plate-forme pour les annonceurs est « la raison pour laquelle les gens viennent sur Pinterest », assure l’entreprise. « Trouver de l’inspiration pour sa maison, son style ou ses voyages veut souvent dire que vous cherchez activement des produits ou des services à acheter. » Et la société de se targuer d’être utilisée par huit mères de famille américaines sur dix, « souvent premières décisionnaires quand il s’agit de faire un achat pour leur foyer ».

L’entreprise doit toutefois réussir à faire valoir ces atouts à l’étranger. Car, si 70 % de ses utilisateurs et de ses utilisatrices se trouvent en dehors des Etats-Unis, Pinterest a généré 94 % de ses revenus sur le sol américain, au quatrième trimestre de 2018. Pour y remédier, le site a récemment ouvert ses espaces publicitaires aux annonceurs européens.

Evolution vers un site marchand

Pinterest a également diversifié sa monétisation, en misant sur le commerce en ligne. Depuis fin 2017, les utilisateurs peuvent acheter – directement sur son site ou sur celui des marques, après y avoir été redirigés – les meubles, vêtements ou bijoux qui leur auront été recommandés. Un segment sur lequel le catalogue d’images fait maintenant face à la concurrence du géant Instagram, qui teste, depuis le 19 mars, la même fonctionnalité sur son application.

Valorisée à 12 milliards de dollars en 2017, la société fait partie du cercle très fermé des « licornes », ces start-up qui valent plus de 1 milliard de dollars. « On peut s’étonner de l’écart considérable entre cette valorisation et la croissance lente de son nombre d’utilisateurs, alors que les grands réseaux sociaux ont commencé avec un rythme fulgurant », souligne Nicolas Reffait, associé du cabinet BearingPoint, en saluant, malgré tout, « le fait qu’une plate-forme arrive à ce stade en restant indépendante ». Comprendre : sans avoir été rachetée par un mastodonte comme Facebook (WhatsApp, Instagram) Google (YouTube) ou Microsoft (LinkedIn).

Plusieurs autres start-up, situées comme Pinterest à San Francisco, prendront, elles aussi, le chemin de la Bourse en 2019. Il en est ainsi des applications de voiture avec chauffeur Uber et Lyft, du service de messagerie Slack ou de la plate-forme de livraison de repas Postmates. Une affluence qui a poussé Pinterest à accélérer sa mise sur le marché.