Alors que ses partenaires faisaient pression pour une levée du moratoire, l’Allemagne a annoncé jeudi 28 mars qu’elle prolongeait de six mois son gel des ventes d’armes à l’Arabie saoudite, jusqu’au 30 septembre.

L’Allemagne a imposé un gel sur les exportations, y compris les ventes déjà approuvées, vers l’Arabie saoudite depuis l’assassinat en octobre 2018 du journaliste saoudien Jamal Khashoggi à Istanbul. Cette interdiction temporaire avait été prolongée à deux reprises déjà, la dernière fois jusqu’au 31 mars.

Concernant les programmes communautaires et les autorisations d’exportations correspondantes en rapport avec l’Arabie saoudite et les Emirats Arabes Unis, l’Allemagne « va s’employer dans ses consultations avec ses partenaires à ce que les équipements militaires produits en commun ne soient pas utilisés dans la guerre au Yémen », et ce pendant « neuf mois », jusqu’au 31 décembre, a précisé le porte-parole du gouvernement, Steffen Seibert, dans un communiqué. La guerre au Yémen, qui a fait plus de 10 000 morts depuis 2015, oppose des forces progouvernementales, soutenues par l’Arabie Saoudite, aux rebelles Houthis.

Une décision synonyme de tensions avec Paris et Londres

L’Allemagne fera aussi le nécessaire pour qu’aucun armement des projets qu’elle mène en collaboration avec d’autres pays ne puisse non plus être livré à l’Arabie saoudite ou aux Emirats jusqu’à la fin de l’année. Quant aux bateaux du chantier de Wolgast (nord-est) qui devaient être livrés aux Saoudiens, M. Seibert a assuré que le gouvernement trouverait une « solution », soit en vendant les navires sans les livrer dans l’immédiat, soit en les vouant à une utilisation par l’Allemagne.

Cela faisait plusieurs semaines que les partis au pouvoir en Allemagne étaient en désaccord sur le gel de ventes d’armes. Les conservateurs de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) d’Angela Merkel militaient pour une levée du moratoire quand les sociaux-démocrates du SPD martelaient qu’ils ne voulaient pas que le pays vende des armes dans des zones de crise ou à des dictatures. Cette question a aussi envenimé ces derniers mois les relations entre Berlin, Paris et Londres ; Français et Britanniques faisant pression pour une levée du moratoire. Des systèmes communs avec la France et le Royaume-Uni étaient en effet concernés par ce gel des ventes d’armement en raison de la présence de composants allemands.

Dans une lettre fort peu diplomatique adressée à son homologue allemand Heiko Maas en février, le ministre des affaires étrangères britannique Jeremy Hunt avait accusé Berlin de manque de loyauté. Mardi, l’ambassadrice de France en Allemagne, Anne-Marie Descôtes, avait critiqué le caractère « imprévisible » de la politique allemande d’exportations d’armes.

L’Allemagne fait partie des quatre ou cinq plus grands pays exportateurs d’armes au monde derrière les leaders américain, russe ou français.