Des enseignants manifestent contre les réformes du ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, à Paris le 19 mars 2019. / CHARLES PLATIAU / REUTERS

Après les manifestations de samedi – qui ont rassemblé quelque 36 000 enseignants d’écoles primaires, de collèges et lycées partout en France –, sept syndicats appellent à une nouvelle journée de mobilisation, jeudi 4 avril, pour protester contre les réformes du ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, en particulier le projet de loi « sur l’école de la confiance » et la réforme du lycée.

Selon le ministère de l’éducation nationale, 9,09 % des enseignants sont en grève jeudi – 14,47 % dans le primaire et 4,14 % dans le secondaire (collèges et lycées). La veille, le Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et PEGC-Fédération syndicale unitaire (SNUipp-FSU), principal syndicat des professeurs des écoles, annonçait une grève très suivie, avec un taux national de grévistes d’« au moins un enseignant sur quatre » et « des pics de grévistes de 70 % à Paris à 45 % dans l’Oise, en passant par 40 % en Loire-Atlantique ou en Haute-Garonne ou 60 % dans les Hauts-de-Seine ».

Le syndicat précise que le taux de grévistes n’est pas « le seul thermomètre de la mobilisation », car celle-ci prend de multiples formes : Nuits des écoles, Journée écoles mortes, Carnaval à Blanquer à Nîmes, rassemblements, occupations d’écoles par les parents d’élèves, pique-nique revendicatif dans les Hautes-Alpes…

Défiance des enseignants

Le projet de loi Blanquer suscite la défiance. Adopté en première lecture le 19 février à l’Assemblée, il doit encore passer au début de mai devant le Sénat, et les syndicats aimeraient le voir retoqué ou même abrogé. En cause, plusieurs dispositions, notamment la création d’« établissements publics des savoirs fondamentaux », dont l’objectif sera de rassembler en une seule entité un collège et une ou plusieurs écoles du même secteur.

Dans les communes rurales qui, rentrée après rentrée, voient leurs effectifs fondre, le projet a fait l’effet d’une bombe : on y lit la mise en péril des petites écoles de village. L’inquiétude est forte, aussi, parmi les directeurs d’école qui redoutent de « passer sous la coupe » des principaux de collège, voire de disparaître purement et simplement.

Le passage de l’instruction obligatoire de 6 à 3 ans fait également grincer des dents, car il oblige les municipalités à financer la mesure pour les maternelles privées. « C’est un cadeau estimé à 150 millions d’euros aux écoles privées que les municipalités vont devoir sortir de leurs poches déjà bien écorchées. Et un financement qui risque de se faire en baissant le budget consacré aux écoles publiques », expose le SNUipp-FSU.

Avant la manifestation de samedi, Jean-Michel Blanquer a écrit aux enseignants une lettre de soutien, les présentant comme à « l’avant-garde du progrès social ». Mercredi, c’est aux directeurs d’école qu’il a écrit, notamment pour apporter « toute garantie » sur le maintien de leurs fonctions.

Actions de désobéissance

« Le ministre voit bien que la loi ne convient pas aux enseignants, qu’elle ne correspond pas aux préoccupations de l’école », déclare Francette Popineau, secrétaire générale du SNUipp-FSU. Le 19 mars, les enseignants avaient déjà été nombreux à se mettre en grève lors d’une précédente journée de mobilisation interprofessionnelle (un quart des professeurs des écoles selon le ministère, 40 % selon les syndicats).

Dans le secondaire, de nombreux enseignants contestent aussi la réforme du lycée, qui se traduira l’an prochain par la suppression des séries (L, ES et S), remplacées par des choix de spécialité. Dans certains établissements, des enseignants mènent depuis plusieurs semaines des « actions de désobéissance » pour montrer leur désapprobation face à cette réforme. Plutôt que d’organiser une grève « qui coûte cher » et « ne fait réagir personne », ils sont ainsi de plus en plus nombreux à choisir le biais des notes pour alerter les parents d’élèves et l’opinion.

« Certains enseignants nous demandent de déposer un préavis de grève le premier jour des épreuves du bac, le 17 juin », évoque Frédérique Rolet, secrétaire nationale du Syndicat national des enseignements du second degré-Fédération syndicale unitaire (SNES-FSU), premier syndicat du secondaire. « Nous allons faire une consultation sur le sujet auprès de nos adhérents », dit-elle, ajoutant que ce serait « assez inédit ».

Jeudi, plusieurs organisations, dont l’Union nationale des étudiants de France (UNEF), l’Union nationale lycéenne (UNL) et les syndicats Snesup-FSU, SGEN-CFDT, FO, SUD…, appellent aussi à une « journée nationale de mobilisation » contre la hausse des frais de scolarité pour les étudiants étrangers.