LA LISTE DE LA MATINALE

Les saisons, les jours de la semaine, les mois de l’année, des dates particulières constituent une source d’inspiration pour des compositions instrumentales ou des chansons. Le mois d’avril se retrouve ainsi dans de nombreuses créations musicales, du classique à la pop, de la variété au jazz. Annonciateur du réveil des sens au début du printemps, parfois encore teinté d’une douce mélancolie, le voici en quatre chansons (dont une triste) et un instrumental.

« Fille d’avril », par Laurent Voulzy

Laurent Voulzy - La fille d'avril (Clip officiel)
Durée : 03:57

Publié en décembre 2001, l’album Avril de Laurent Voulzy venait récompenser toutes celles et ceux qui depuis son précédent disque, Caché derrière en 1992 attendaient des nouvelles phonographiques du chanteur, guitariste et compositeur. Un formidable grand œuvre pop tout en guitares, claviers, harmonies vocales, emportements de cordes avec les épiques Slow Down, Mary Quant, Quatre Nuages, Jaguar, Une héroïne, I Want You (13 minutes psychédéliques) et les délicatesses de ballades émouvantes, Je suis venu pour elle, Jésus, ou cette Fille d’avril qui « ne veut pas/découvrir d’un fil/tout ce qu’elle a/ni son cœur, ni son corps ».

Le texte, écrit par le complice artistique et ami de longue date Alain Souchon, évoque aussi les autres mois de l’année et les habitudes d’autres filles à ces moments-là. Avec cet album, le duo avait signé l’une des ses plus belles créations. Sylvain Siclier

« Aprile », de Francesco Paolo Tosti par Giuseppe di Stefano

Giuseppe Di Stefano - Aprile (Tosti)
Durée : 03:31

Grand faiseur de romances de salon, le prolifique Francesco Paolo Tosti (1846-1916), considéré comme « le Elton John de la fin du XIXe siècle », a été chanté par les plus grands ténors italiens, de Caruso à Joseph Calleja, en passant par Bergonzi et Pavarotti. Sa musique, très mélodique, flatteuse par la voix, et facile à fredonner pour l’auditeur, permet au chanteur de briller sans se mettre techniquement en danger.

Aprile, avec ses arpèges de harpe, son hautbois agreste et ses flûtes joyeuses, chante comme il se doit le printemps et la saison de l’amour (« È l’April ! È l’April !/È la stagion d’amore ! »). La version de Giuseppe di Stefano (1921-2008), outre la couleur naturellement solaire de la voix, séduit par sa fluidité, sa diction parfaite et sa musicalité à la fois ardente et aérienne. Marie-Aude Roux

« April’s Song », par Real Estate

Real Estate - April's Song
Durée : 03:28

Difficile de trouver plus pauvre en glamour que ce nom de groupe, Real Estate (en français, immobilier). Et pourtant, les chansons pop de Real Estate sont bel et bien l’élégance et la sensibilité incarnées. Originaire de la petite bourgade de Ridgewood dans l’Etat du New Jersey, cette formation, qui a enregistré quatre albums depuis 2009, remet au goût du jour les guitares carillonnantes et les chœurs feutrés de la pop-folk des années 1960. Une tradition locale qu’ils perpétuent sur les traces de leurs modèles et aînés, les Feelies, pionniers post-punk originaires du même Etat.

La douce et vaporeuse mélancolie de Real Estate se marierait a priori davantage avec des teintes automnales, mais April’s Song fait ainsi figure d’exception. Si cette composition s’avère l’unique instrumental de leur troisième album Atlas (Domino) paru en 2014, elle n’en demeure pas moins mémorable : un enchevêtrement d’arpèges lumineux posé sur une rythmique à la fois nerveuse et ouatée, ou la brise printanière selon Real Estate. Franck Colombani

« Sometimes It Snows in April », par Prince

Sometimes It Snows In April
Durée : 06:50

A l’annonce de la mort de Prince, le 21 avril 2016, si sa chanson la plus connue, Purple Rain, a été mentionnée et diffusée à l’envi, une autre aura été souvent évoquée, Sometimes It Snows in April, ballade amoureuse coécrite par Wendy Melvoin et Lisa Coleman pour l’album Parade publié en mars 1986, dont les musiques et chansons ont été utilisées dans le film Under The Cherry Moon, réalisé par Prince, et sorti en juillet 1986. « Parfois il neige en avril. Pour tous les fans, cette neige a dû se transformer en larmes », écrivions-nous dans la nécrologie consacrée au chanteur, pianiste, guitariste, producteur et auteur-compositeur.

La chanson est centrée sur le personnage de Christopher Tracy, qu’interprète Prince dans le film, exubérant gigolo, qui tombe amoureux d’une jeune riche héritière. A la fin du film, au moment où il a décidé de changer de vie pour la belle, il meurt assassiné par les hommes de main du père de cette dernière. « I often dream of heaven/And I know/that Tracy’s there » (je rêve souvent du paradis et je sais que Tracy s’y trouve). Est-ce Tricky, le camarade de Christopher Tracy, est-ce son amoureuse, est-ce Prince évoquant son double, qui font part de leur tristesse ? Pas plus à l’époque, que maintenant, les fans ne sont d’accord. S. Si.

« April in Paris », par Ella Fitzgerald

Ella Fitzgerald, live - April In Paris
Durée : 03:55

Parmi les thèmes écrits pour des musicals de Broadway et des comédies musicales au cinéma, adoptés par le jazz, il fallait choisir entre April in Paris, composé en 1932 par Vernon Duke avec un texte de Yip Harburg, et I’ll Remember April, qui date de 1942, composition de Gene de Paul avec un texte de Patricia Johnston et Don Raye. A pile ou face, April in Paris l’a emporté. Vision romantique (« je ne savais pas que mon cœur pouvait chanter (…) avant de passer avril à Paris ») de la capitale avec ses châtaigniers en fleurs (ce qui est un peu tôt).

Charlie Parker, Count Basie, Thelonious Monk, Stan Kenton, Thad Jones, Ahmad Jamal, Miles Davis notamment ont mis la mélodie à leur répertoire. Et parmi d’autres Frank Sinatra, Sarah Vaughan, Nat King Cole, Doris Day (dans le film de 1952) l’ont chanté. Tout comme Ella Fitzgerald que nous retrouvons ici lors d’un concert à Bruxelles, en 1957, s’élançant dans une allègre improvisation scat. S. Si.