Geneviève Legay, 73 ans, lors d’une manifestation interdite de « gilets jaunes » à Nice le 23 mars, au cours de laquelle elle a été blessée dans une charge de police. / Claude Paris / AP

Geneviève Legay, militante d’Attac blessée à Nice lors d’une charge de la police pour disperser une manifestation interdite des « gilets jaunes », passe à la riposte. Dans sa première interview diffusée lundi 8 avril par France Bleu Azur, elle répond au chef de l’Etat, qui lui avait souhaité, en sus d’un bon rétablissement, « une forme de sagesse » : « Macron n’est pas un exemple de sagesse mais de mépris et de violence », accuse-t-elle.

« En faisant ce que je fais, je défends un droit, le droit de manifester », ajoute la septuagénaire, jointe au téléphone par la radio. « Moi j’étais descendue pour la liberté de manifester, je n’avais pas vu que la place Garibaldi était dans l’arrêté d’interdiction, je n’ai pas bravé l’interdiction », assure la manifestante. Victime d’intenses douleurs liées à de multiples fractures, du crâne et du coccyx notamment, à la suite d’une chute provoquée par un policier, selon l’enquête, elle est toujours hospitalisée dans une unité de convalescence à Nice.

Emmanuel Macron avait affirmé dans un entretien à Nice-Matin, au surlendemain de la manifestation à Nice, que « cette dame [n’avait] pas été en contact avec les forces de l’ordre ». « Quand on est fragile, qu’on peut se faire bousculer, on ne se rend pas dans des lieux qui sont définis comme interdits et on ne se met pas dans des situations comme celle-ci », avait commenté le chef de l’Etat, lui souhaitant « peut-être une forme de sagesse ».

« Incompréhensible et surtout lamentable », estime Mme Legay, présente le 23 mars avec une cinquantaine de personnes place Garibaldi, malgré l’interdiction préfectorale et les renforts de police déployés pour éviter la casse et sécuriser la ville avant la visite du président chinois Xi Jinping.

Information judiciaire ouverte

« Le président de la République n’a pas eu une seule pensée pour mes filles qui attendaient à l’hôpital pour savoir si j’allais pouvoir m’en sortir et avec quelles séquelles. Et Estrosi [maire de Nice] se permet de dire de son côté que mes blessures sont légères. C’est une honte !, a-t-elle ajouté. Nous ne sommes plus dans un Etat de droit. La réponse d’Emmanuel Macron est autoritaire. »

Une information judiciaire a été ouverte pour violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique. L’avocat de la famille Legay, Arié Alimi, a demandé que le dossier soit traité ailleurs qu’à Nice, en raison de sa sensibilité, ce que le parquet général d’Aix-en-Provence a refusé, a fait savoir ce dernier à l’AFP.

Mme Legay revient aussi sur la façon dont, aux premiers instants de l’enquête, « les policiers ont insisté pour me faire dire que c’était un journaliste qui m’avait poussée. Or, c’est faux ». « Cela fait cinquante ans que je milite et à 73 ans, je n’ai jamais vécu pareille violence », dit-elle encore, mettant en cause toute la hiérarchie au-dessus du policier qui l’a poussée, en particulier le commissaire Rabah Souchi, qui assurait le commandement sur le terrain, ceint d’une écharpe tricolore.