Des manifestantes favorables à la dépénalisation de l’avortement, à Séoul, le 11 avril 2019. / KIM HONG-JI / REUTERS

La plus haute juridiction sud-coréenne a jugé, jeudi 11 avril, que l’interdiction de l’avortement – le fait de lancer des poursuites contre des femmes se faisant avorter et contre les médecins pratiquant des interruptions volontaires de grossesse (IVG) – était « anticonstitutionnelle ».

La Cour constitutionnelle a aussi ordonné la modification, d’ici à la fin de l’année, de la loi de 1953 réprimant l’IVG.

« L’interdiction de l’avortement limite le droit des femmes à accomplir leur propre destin et viole leur droit à la santé en restreignant leur accès à des procédures sûres en temps opportun », a écrit la Cour dans un communiqué.

« Les embryons dépendent complètement pour leur survie et leur développement du corps de la mère, ce qui fait qu’on ne peut conclure qu’ils sont des êtres vivants séparés et indépendants ayant un droit à la vie. »

L’annonce de cette décision a été accueillie par des cris de joie et des embrassades de centaines de femmes rassemblées devant la Cour constitutionnelle dans le centre de Séoul.

La Corée du Sud est une des dernières économies développées où l’avortement demeure illégal, sauf en cas de viol, d’inceste ou s’il y a risque pour la mère. Hormis ces exceptions, les femmes qui se font avorter sont passibles d’un an de détention et d’une amende. Les médecins encourent deux ans.

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L’IVG est déjà très répandue

La loi de 1953 interdisant l’IVG est largement bafouée et les poursuites sont rares. Mais les associations militant pour la légalisation dénoncent le fait que certaines jeunes femmes n’ayant pas les moyens s’exposent à des avortements réalisés dans de mauvaises conditions sanitaires et risquent l’isolement social.

Les appels à la légalisation se sont multipliés ces dernières années, mais l’interdiction compte aussi un grand nombre de partisans dans une société très conservatrice à l’égard des femmes et où les Eglises évangéliques ont toujours une influence.

La dernière fois que la Cour constitutionnelle s’est penchée sur cette question remonte à 2012. Elle avait estimé que l’avortement « finirait par se généraliser » s’il n’était pas puni.

Les associations rapportent que l’IVG est déjà très répandue en Corée du Sud et dénoncent l’arbitraire de l’application de la loi : les poursuites visent essentiellement les femmes jeunes et non mariées davantage susceptibles d’être ostracisées par la société.