Des macaques rhésus dans l’université américaine de Wisconsin-Madison, en mai 2009. / Jeff Miller/U of Wisconsin-Madis / Jeff Miller

Des scientifiques chinois ont implanté à des singes un gène considéré comme jouant un rôle dans le développement du cerveau humain, dans le cadre d’une étude sur l’évolution de l’intelligence humaine. L’étude, parue en mars dans la publication anglophone de Pékin National Science Review, a été réalisée par des chercheurs de l’Institut de zoologie de Kunming et de l’Académie des sciences chinoises, travaillant avec des chercheurs américains de l’université de Caroline du Nord.

Les chercheurs ont implanté à onze macaques rhésus des versions humaines du gène MCPH1, qui pourrait jouer un rôle dans le développement du cerveau humain. Ils ont observé que les cerveaux de ces singes, comme ceux des humains, avaient mis plus de temps à se développer et que les animaux obtenaient de meilleurs résultats aux tests sur la mémoire à court terme et le temps de réaction, en comparaison avec les singes vivant dans la nature. La taille des cerveaux des singes de l’expérience n’était toutefois pas supérieure à celle des cerveaux de leurs congénères du groupe de contrôle.

Les singes ont été soumis à des tests de mémoire dans lesquels ils devaient se souvenir de couleurs et de formes sur un écran et à des IRM. Seuls cinq d’entre eux ont survécu jusqu’à la phase de tests.

Controverse éthique

Cette expérience est la dernière en date d’une série de recherches biomédicales effectuées en Chine qui ont suscité une controverse au plan de l’éthique. Dans leur étude, les chercheurs chinois affirment ainsi :

« Nos résultats démontrent que des primates transgéniques non humains (en dehors des espèces de grands singes) ont le potentiel pour fournir des aperçus importants – et potentiellement uniques – concernant des questions fondamentales sur ce qui rend l’homme unique. »

Selon les auteurs de l’étude, le macaque rhésus, bien que plus proche génétiquement des humains que les rongeurs, reste suffisamment éloigné de l’homme pour ne pas susciter de questionnement éthique, mais cela n’a toutefois pas dissuadé les critiques. 

« Dans l’imaginaire populaire, on se retrouve tout simplement sur La Planète des singes », a commenté Jacqueline Glover, une bioéthicienne de l’université du Colorado. Répondant à la MIT Technology Review, la spécialiste s’est insurgée :

« Les humaniser revient à faire quelque chose de mal. Où vivraient-ils et que feraient-ils ? Il ne faut pas créer un être vivant qui ne peut pas avoir une vie significative dans un contexte quelconque. »

Larry Baum, un chercheur du Centre for Genomic Sciences de l’université de Hongkong, a néanmoins relativisé ces craintes, soulignant que « cette étude n’a modifié que l’un de quelque 20 000 gènes ».

En janvier, une équipe de scientifiques chinois avait annoncé avoir cloné cinq singes à partir d’un spécimen unique dont les gènes avaient été modifiés pour le rendre malade, afin d’étudier les troubles du sommeil. Ils avaient découvert que ces singes montraient des signes de problèmes mentaux associés (dépression, anxiété, comportements liés à la schizophrénie). Ces résultats, publiés dans la National Science Review visaient, selon eux, à servir la recherche sur les maladies psychologiques humaines.