Un manifestant brandit une affiche hostile à Abdelkader Bensalah, nouveau chef de l’Etat par intérim, figure de l’appareil mis en place par Bouteflika. / RYAD KRAMDI / AFP

Alger et les grandes villes du pays s’apprêtent à vivre une nouvelle journée de mobilisation, vendredi 12 avril. Les contestataires entendent se rassembler massivement lors du premier vendredi de manifestation en Algérie depuis l’annonce d’une présidentielle le 4 juillet.

Ils craignent que ce scrutin soit frauduleux et ne serve qu’à conforter le pouvoir intérimaire dont ils réclament le départ. Sur les réseaux sociaux, où est née la contestation qui a abouti à la démission d’Abdelaziz Bouteflika, les appels à manifester continuent d’être relayés pour la 8e semaine d’affilée, notamment sous le mot-dièse « Ils partiront tous ».

La présidentielle a été fixée au 4 juillet par le tout nouveau chef de l’Etat par intérim, Abdelkader Bensalah, 77 ans, figure de l’appareil mis en place par Bouteflika. Désigné par la Constitution pour assurer l’intérim, il est devenu la cible des slogans qui visaient initialement Bouteflika, président malade dont il était ces dernières années la « doublure » officielle, en Algérie et à l’étranger.

Pour les protestataires, cette présidentielle organisée en trois mois ne peut être libre et équitable, car elle serait organisée dans un cadre juridique et par des institutions et des personnalités héritées des vingt ans de pouvoir de Bouteflika, marqués par des scrutins frauduleux selon l’opposition.

Manifestants et voix de la société civile réclament la mise en place d’institutions ad hoc, en vue d’une véritable transition post-Bouteflika. Le pouvoir, lui, veut rester dans le cadre prévu par la Constitution : une présidentielle sous quatre-vingt-dix jours.

Retour de l’armée au cœur du débat

Chaque camp reste sur ses positions. M. Bensalah a reçu le soutien implicite de l’armée, revenue au centre du jeu politique algérien depuis que son chef d’état-major, le général Ahmed Gaïd Salah, a lâché M. Bouteflika rendant inéluctable sa démission.

Le général Gaïd Salah a dénoncé des « slogans irréalistes », faisant allusion aux appels au départ de tous les acteurs du « système » au pouvoir. Il a estimé « irraisonnable » une transition hors du cadre institutionnel actuel, et promis aux manifestants que l’armée garantirait « la transparence et l’intégrité » du scrutin.

Le pouvoir va scruter attentivement la mobilisation dans l’espoir d’un affaiblissement. Si des millions d’Algériens envahissent à nouveau les rues du pays comme les semaines précédentes, comment imaginer qu’ils se rendront aux urnes dans trois mois ? Et s’ils s’abstiennent, de quelle légitimité bénéficiera le nouveau président ?

L’attitude des forces de sécurité sera également examinée vendredi, alors que mardi la police a pour la première fois depuis le 22 février tenté de disperser une manifestation pacifique d’étudiants à Alger et qu’elle a empêché jeudi tout rassemblement devant la Grande Poste.