Jacques Poujol, directeur des achats du fournisseur français de viande Spanghero, au tribunal de Paris, le 21 janvier 2019. / ERIC FEFERBERG / AFP

L’ancien directeur de l’entreprise de fabrication de viandes Spanghero, jugé avec trois autres prévenus dans le principal volet du scandale de la viande de cheval vendue pour du bœuf, a été condamné mardi 16 avril, à Paris, à deux ans de prison, dont dix-huit mois avec sursis.

Le tribunal correctionnel a jugé Jacques Poujol coupable de tromperies liées à la viande de cheval. Il lui était notamment reproché d’avoir vendu entre 2012 et 2013 plus de 500 tonnes de viande de cheval pour de la viande de bœuf au fabricant de plats préparés Tavola, dans une entente frauduleuse avec un négociant néerlandais, Johannes Fasen, condamné à deux ans assortis d’un mandat d’arrêt. M. Fasen a déjà été condamné aux Pays-Bas dans une affaire similaire de tromperie.

Patrice Monguillon, ex-directeur du site de Castelnaudary (Aude) où la viande était conditionnée, et un autre négociant néerlandais, Hendricus Wimdmeijer, ont, eux, eu des peines de douze mois de prison avec sursis.

Les prévenus, qui devront également verser plusieurs dizaines de milliers d’euros aux parties civiles, ont été condamnés essentiellement pour tromperie et non pour escroquerie en bande organisée, l’un des chefs qui avait été retenu contre eux au terme de l’instruction.

Douze pays touchés

Tout est parti de la découverte en Irlande, en janvier 2013, de viande de cheval dans des steaks hachés « pur bœuf » vendus en supermarché, puis, par la société Findus, de viande chevaline dans des lasagnes fabriquées par une filiale luxembourgeoise du groupe Comigel spécialisé dans les plats surgelés, Tavola.

Or la viande utilisée dans ces lasagnes venait de Spanghero, qui s’approvisionnait auprès d’abattoirs roumains via la société de Johannes Fasen, Draap Trading, basée à Chypre, et celle de Hendricus Windmeijer, située à Breda, aux Pays-Bas.

L’enquête a établi que Spanghero, avant de revendre cette viande de cheval, avait remplacé les étiquettes roumaines par un numéro sanitaire français et la mention qu’il s’agissait de viande bovine, nettement plus chère.

Selon la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), l’arnaque porterait sur plus 750 tonnes de viande de cheval, dont près de 540 tonnes revendues à Tavola et plus de 200 tonnes utilisées par Spanghero, notamment pour fabriquer des merguez surgelées. Au total, estime la DGCCRF, cette viande de cheval s’est retrouvée dans 4,5 millions de plats cuisinés, vendus dans plus d’une douzaine de pays européens.

L’accusation a évoqué l’« organisation atypique et propice aux fraudes » de l’entreprise de Castelnaudary, créée par l’ex-rugbyman Laurent Spanghero, cédée en 2009 à une coopérative basque et qui ne s’est jamais relevée du scandale.

Picard, Findus, Carrefour parties civiles

Les deux principaux prévenus ont contesté les faits qui leur sont reprochés et se sont rejeté mutuellement la responsabilité de la fraude, Jacques Poujol affirmant notamment qu’il ne savait pas que le trader néerlandais lui vendait de la viande de cheval à la place de la viande de bœuf. Johannes Fasen s’est pour sa part défendu en affirmant avoir vendu de la viande de cheval à Jacques Poujol parce que celui-ci lui commandait de la viande de cheval.

Douze sociétés et associations s’étaient portées parties civiles, dont Picard Surgelés, Findus, Carrefour Hypermarchés, la Fédération nationale bovine et l’Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (Interbev).