Au premier regard, le Galaxy Fold paraît curieusement étroit, mais quand on le déplie tel un livre, il révèle un spectaculaire écran interne, digne d’une petite tablette. Ce curieux smartphone deviendra le 3 mai le premier mobile à écran pliable à être commercialisé en France.

Les consommateurs découvriront cette étiquette sur son présentoir : « 2020 ». Ce n’est pas une erreur dans l’année de commercialisation, mais bien son prix français, en euros. Qui rendra tentant de ranger ce smartphone dans la panoplie des signes extérieurs de richesse réservés aux grandes fortunes.

Mais on peut aussi considérer le Fold comme une tentative radicale de redéfinition d’un objet de grande consommation. Une sorte d’« éclaireur » avant les modèles d’autres marques qui suivront, et dont les coûts de fabrication devraient peu à peu baisser. Au point que cette technologie finira peut-être par concurrencer celle de nos smartphones actuels les plus courants.

Le futur imaginé par Samsung est-il crédible ? Nous avons manipulé le Fold une bonne heure, et à première vue, cette vision paraît plutôt sensée. En revanche, on peut clairement s’interroger sur sa solidité.

• Est-il vraiment utile ?

L’atout principal du Fold est évidemment son écran interne de 7,3 pouces. Peu d’applications sont capables de profiter à fond de ce grand espace. Mais l’amélioration est très spectaculaire lorsqu’on travaille sur des documents A4, lorsqu’on consulte des photos, vidéos, jeux, magazines, etc.

Nous avons comparé l’affichage du Fold à celui du Samsung S10, un smartphone relativement grand. La différence se passe de commentaire :

Un article du « Monde » sur le Samsung S10 (à gauche) et sur le Fold. / NICOLAS SIX / « LE MONDE »

Une double page de magazine sur le Samsung S10 (à gauche) et sur le Fold. / NICOLAS SIX / « LE MONDE »

Un tableau affiché sur le Samsung S10 (à gauche) et sur le Fold. / NICOLAS SIX / « LE MONDE »

Une bande annonce sur le Samsung S10 (à gauche) et sur le Fold. / NICOLAS SIX / « LE MONDE »

Un document texte A4 sur le Samsung S10 (à gauche) et sur le Fold. / NICOLAS SIX / « LE MONDE »

Cette fête visuelle est un peu gâchée par l’immense encoche taillée en haut de l’écran du Fold. Elle abrite un appareil photo à selfie ainsi que divers capteurs.

Plus gênant encore, le milieu de l’écran est traversé par une immense pliure désagréable à l’œil. Sous certains éclairages, elle est soit invisible, soit suffisamment discrète pour qu’on l’oublie. Mais quand le soleil tombe sous certains angles, et que le fond de l’écran est noir, elle saute aux yeux. Seule l’expérience nous dira si on s’y habitue.

• Est-il pratique à utiliser ?

L’écran externe du Fold est petit (4,6 pouces), mais c’est loin d’être un problème. C’est même une vertu. On peut le manipuler à une main particulièrement rapidement, puisqu’un pouce de taille moyenne parvient à toucher toutes ses zones sans avoir à faire glisser le mobile en main. Un plaisir hélas perdu sur les smartphones récents.

A première vue, le grand écran interne du Fold s’utilise de manière fluide, à la différence du prototype du Mate X, le futur smartphone pliable de Huawei, qui s’est révélé agaçant lors de notre prise en main en mars. Son écran souffrait d’erreurs d’orientation et percevait des commandes tactiles qui n’en étaient pas.

Le fonctionnement du Samsung Fold est facile à comprendre. L’écran externe et l’écran interne ont chacun leur affichage propre. On peut ouvrir l’agenda à l’extérieur et une vidéo à l’intérieur. A une petite subtilité près : quelques applications sont synchrones sur les deux écrans. Lorsqu’on ouvre un plan sur Google Maps, par exemple, il s’ouvre aussi sur l’autre écran.

Sur le grand écran interne, si on le souhaite, on peut afficher deux applications côte à côte. Cette fonction existe sur les smartphones classiques de taille XL. Sur l’écran du Fold, l’espace est cette fois réellement suffisant pour afficher deux colonnes bien lisibles côte à côte.

Diviser l’écran en deux permet, par exemple, de copier des fragments de texte d’une page Web vers une application de notes. / NICOLAS SIX / « LE MONDE »

Un regret : certaines applications mériteraient d’être repensées pour tirer profit de la largeur accrue de l’écran. Par exemple, Gmail pourrait fonctionner comme sur ordinateur, en affichant deux colonnes : les dossiers à gauche et les messages à droite. Avec le temps, espérons que des applications évolueront dans ce sens.

• Est-il fragile ?

Hélas oui, et c’est la principale menace qui plane sur son avenir. L’écran pliable du Fold résiste mal aux coups de griffes, de l’aveu même de Samsung.

Mais la réalité pourrait être encore pire. Le constructeur a distribué quelques Galaxy Fold à la presse américaine : plusieurs journalistes ont cassé son écran immédiatement en retirant sa couche protectrice, qu’ils pensaient être un film amovible. Bien plus inquiétant encore, deux journalistes de The Verge et de CNBC ont vu leur écran se casser après l’avoir utilisé normalement pendant un jour ou deux.

Il paraît douteux que Samsung parvienne à corriger ces problèmes avant la sortie de son smartphone : ses premiers acheteurs devront vivre avec ce risque. Pour mettre toutes les chances de leur côté, ils devront être attentifs. En poche, ou dans un sac, il faudra veiller à séparer le Fold du trousseau de clés, des bijoux, ou de tout objet métallique. Car les deux parties du Fold, une fois repliées, ne collent pas parfaitement l’une à l’autre. Une boucle d’oreille pourrait se glisser dans l’interstice, comme une petite clé de boîte aux lettres. Il faudra aussi éviter les contacts avec l’eau, car contrairement aux autres Samsung haut de gamme, le Fold n’est pas étanche.

A première vue, d’autres parties du Galaxy Fold paraissent plus solides, comme la charnière. Le mécanisme qui permet au smartphone de se replier est habillé par une robuste coque en aluminium. Il faudra patienter pour déterminer son niveau de résistance aux torsions. Le Fold a un dernier point faible : sa coque externe en verre. Elle pourrait bien céder en cas de chute. Samsung fournit d’ailleurs d’office une coque en Kevlar pour la protéger.

Le Fold revêtu de la coque de protection fournie d’office. / NICOLAS SIX / « LE MONDE »

Les casses lors d’une utilisation normale du Galaxy Fold seront, on l’espère, couvertes par la garantie. Dans les cas où celle-ci ne pourrait pas jouer, les possesseurs de Fold disposeront d’un joker, une garantie supplémentaire offerte par Samsung, qui échange sans conditions le Fold la première année, peu importent les conditions de casse. Mais une fois seulement.

• Est-il encombrant ?

Long comme un smartphone XL (16 centimètres), il est moins large d’un bon centimètre (6,3 centimètres), mais deux fois plus épais (1,6 centimètre). On ne rencontre aucun problème pour le glisser dans un sac, mais comme beaucoup de smartphones XL, le Fold ne rentre pas dans toutes les poches. Il exerce même une pression inhabituelle sur la cuisse, mais la plupart des utilisateurs s’y habitueront.

Le Fold pèse 263 grammes, soit cent grammes de plus qu’un smartphone actuel. On sent clairement ce surpoids, mais lorsqu’on le tient plié dans la main, il demeure confortable. Son format étroit tient particulièrement bien dans la paume. Déplié, et à deux mains, son confort est très correct.

Le dos argenté du Fold dans sa finition la plus sage. / NICOLAS SIX / « LE MONDE »

• Est-il agréable à l’œil ?

Chacun en sera juge, mais les lignes du Fold ne semblent pas particulièrement harmonieuses. Samsung a habillé son dos de verre, ce qui lui confère une finition assez flatteuse. Le modèle que nous avons pris en main joue sur les nuances de gris, mais Samsung propose plusieurs coloris nettement plus audacieux.

• Est-il performant ?

Le Fold intègre une électronique et des capteurs photos très proches de ceux des Galaxy S10. Il est équipé d’une antenne 5G qui restera inutile en France jusqu’à l’ouverture du réseau 5G hexagonal, probablement à la fin de 2020. Sa mémoire est très confortable : 512 Go. Le Fold ne dispose ni d’un tiroir à carte SD ni d’une prise audio mini-jack. Mais il est fourni avec des écouteurs sans fil.