« Le Port de La Rochelle », de Paul Signac, présenté lors d’une conférence de presse au ministère de l’intérieur à Kiev (Ukraine), le 23 avril 2019. / EFREM LUKATSKY / AP

Un port, c’est fait pour emmener loin. Mais de la Charente-Maritime jusqu’à Kiev, en passant par la Meurthe-et-Moselle, c’est peu fréquent. C’est pourtant en Ukraine qu’a été retrouvé un tableau peint par Paul Signac en 1915, Le Port de La Rochelle, volé le 24 mai 2018 au Musée des beaux-arts de Nancy. A l’époque, le procureur de la République avait évoqué la piste du grand banditisme : « Le mode opératoire – rapidité d’exécution, découpe précise du tableau, repérage minutieux, puisque le tableau volé était hors du champ des caméras – laisse à penser que nous avons affaire à des malfaiteurs aguerris et particulièrement bien organisés. »

Il semble qu’il ne se soit pas trompé. Le tableau aurait été retrouvé par la police ukrainienne chez un homme par ailleurs suspecté d’avoir assassiné un bijoutier. « Nous avons reçu des informations sur un groupe de personnes en quête d’acheteurs pour des tableaux volés en Europe l’année dernière », a expliqué un responsable de la police, Serguiï Tykhonov, cité par l’AFP. Plusieurs autres œuvres d’art ont été découvertes.

« Une restitution à la ville de Nancy »

Après examen par des experts mandatés par la justice française visant à l’identifier, le tableau a été remis par le ministre de l’intérieur, Arsen Avakov, à l’ambassadrice de France à Kiev, Isabelle Dumont, lors d’une cérémonie, mardi 23 avril. Selon un communiqué de l’ambassade, « le ministre de la culture, Franck Riester, et le maire de Nancy, Laurent Hénart, se sont réjouis de la collaboration avec les autorités ukrainiennes qui permettra, au terme des procédures d’enquête, une restitution de ce tableau à la ville de Nancy. »

Estimée lors du larcin à 1,5 million d’euros, l’huile sur toile (46 × 55 cm) faisait partie d’un ensemble de 117 œuvres léguées au musée de Nancy par la veuve du verrier Emile Gallé. Signac l’avait exécutée l’année où il fut nommé peintre officiel de la marine – lui-même possédait un petit yacht à Saint-Tropez et était considéré comme un fin navigateur. Peint par petites touches juxtaposées, Le Port de La Rochelle évoque un peu le pointillisme dont Signac fut, avec Seurat, un des fondateurs. Toutes voiles dehors, un bateau avance au premier plan vers le spectateur, encadré par les tours (Saint-Nicolas, la Chaîne et la Lanterne) qui défendent le vieux port rochelais. Plus redoutables que la sécurité du musée de Nancy.

Lire la critique d’une exposition à Lausanne en 2017 : Ports, voiliers et aquarelles, signé Signac