Des policiers lors de l’acte XXIII des « gilets jaunes » à Paris le samedi 20 avril. / ZAKARIA ABDELKAFI / AFP

« Suicidez-vous, suicidez-vous » : un homme, jugé pour avoir participé aux appels au suicide lancés aux policiers lors de l’acte XXIII des « gilets jaunes », a été condamné mardi 30 avril à huit mois de prison avec sursis par le tribunal de Paris.

Ce cuisinier au chômage, âgé de 49 ans, devra également accomplir 180 heures de travail d’intérêt général, avec obligation de trouver un travail et de verser 500 euros à chacun des deux policiers qui ont porté plainte au titre du préjudice moral.

Le 20 avril, avec d’autres manifestants du cortège parisien des « gilets jaunes », il a crié « Suicidez-vous, suicidez-vous » aux forces de l’ordre, alors que la police est touchée par une vague de suicides sans précédent depuis le début de l’année.

« Ça a commencé après qu’une femme enceinte a été bousculée par les forces de l’ordre », a justifié le prévenu, vêtu d’un t-shirt noir à l’effigie de Pablo Escobar, l’ancien baron de la drogue colombien.

« La folie du moment »

Ce « gilet jaune », mobilisé à tous les actes « sans jamais être interpellé pour violences », s’est défendu d’être « un délinquant », assurant même « avoir déjà aidé pendant des manifs des policiers à s’en aller car ils risquaient de se faire taper dessus ».

« Mes paroles sont parties plus vite que mes pensées. (…) C’était la folie du moment », a-t-il ajouté, précisant ne pas être « l’instigateur » des cris.

Ces slogans avaient été vivement condamnés par la classe politique et les syndicats de policiers. « C’est le paroxysme de la haine, c’est d’une violence inouïe », a dénoncé Oriane Camus, l’avocate des policiers. « Cela a un effet dévastateur sur des policiers à bout depuis plusieurs mois », a-t-elle souligné.

« Il n’y a aucun lien de cause à effet évident entre ce déferlement de propos haineux et une quelconque violence des policiers contre une jeune femme qui n’est pas du tout avérée », a observé le procureur.

« Il n’avait pas conscience de la gravité des mots. Son Suicidez-vous, c’était un ras-le-bol, de voir ses amis blessés, de la violence, de l’injustice. Il a perdu son sang-froid pendant quelques minutes », a plaidé l’avocate de la défense Ingrid Theillaumas, demandant que son client « ne paye pas pour tous les autres ».

Ces appels aux suicides sont apparus dans un contexte de tension entre les forces de l’ordre et les « gilets jaunes », dont les manifestations hebdomadaires sont régulièrement émaillées de débordements.

28 suicides de policiers depuis le début de l’année

Les « gilets jaunes » dénoncent régulièrement l’usage par les forces de l’ordre du lanceur de balles de défense (LBD) et des grenades GLI-F4, à l’origine de nombreuses blessures, voire de mutilations.

Le fléau des suicides au sein des forces de l’ordre revient régulièrement sur le devant de la scène à la faveur de brusques accélérations du nombre de passages à l’acte. Alors que 28 suicides de policiers ont été dénombrés depuis le début de l’année, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner a installé lundi une cellule alerte prévention suicide (Caps).

Un rapport sénatorial remis en 2018 avait mis en lumière « un taux de suicide plus élevé que la moyenne nationale » chez les policiers, même en tenant compte des spécificités de cette population (population davantage masculine, jeune, ayant accès aux armes, etc.).